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Un certain José Bové est, avec Marizette, Christiane, Pierre et Léon, l'une des stars, drôles et émouvantes du documentaire "Tous au Larzac", dans lequel Christian Rouaud retrace une incroyable lutte : celle des paysans d'un plateau rural et magnifique, situé au centre de la France, contre l’Etat et l'armée. Arte le diffuse pour la première fois à la télévision ce soir. Et chance, c'est à 20h50 !
Gardarem lo Larzac !
Pot de terre contre pot de fer, David contre Goliath, "Tous au Larzac", c'est l'affrontement du faible contre le fort. Un combat déterminé et joyeux, qui a uni les défenseurs du Larzac dans un combat sans merci pour sauver leurs terres, mais parfois aussi éprouvant et périlleux. Et surtout gagné. Ce qui est rarissime dans l'histoire des luttes écologiques et sociales. A part l'abandon du projet de construction de la centrale nucléaire de Plogoff en Bretagne, en 1981, on a beau se creuser la cervelle, on ne voit pas d'autre exemple similaire.
Un western épique
Comme "Paysan et rebelle, un portrait de Bernard Lambert" (2002) et "Les Lip, l’imagination au pouvoir" (2007), les deux premiers volets de la trilogie, "Tous au Larzac " repose sur la parole de ses protagonistes. C'est pourtant le contraire d’un film bavard. Peut-être parce que les paysages grandioses et désertiques du causse "fabriquent de l’imaginaire tant et plus", avance le réalisateur Christian Rouaud. Le documentaire évoque en effet immanquablement un western, où le récit choral est porté par une incontestable dimension épique. Comme dans ses précédents films, Christian Rouaud joue aussi sur l’effet de surprise : l’engagement résolu dont témoignent ces activistes à la retraite se révèle à ce point porteur d’humour et d’aventure, qu'il bat définitivement en brèche l'image toute faite que certains pourraient avoir des militants écolos. "Tous au Larzac" enterre définitivement le mythe de tristes mangeurs de carottes et buveurs de tisanes bio, jamais contents et toujours condamnés à l'échec... Sur ce dernier point précis de l'échec, il est vrai que les temps modernes sont bien plus durs que les années 70 : les militants qui luttent contre le projet de l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes pourraient en causer abondamment... On comprend qu'ils n'aient pas vraiment le sourire.
Quelle histoire...
Pour le Larzac, tout commence en 1971, lorsque le gouvernement, par la voix de son ministre de la Défense Michel Debré, déclare que le camp militaire du Larzac doit s’étendre. Radicale, la colère se répand aussi sec comme une trainée de poudre sur le causse. Les paysans se mobilisent et signent un serment : jamais ils ne cèderont leurs terres. Dans le face à face quotidien avec l’armée et les forces de l'ordre, ils déploient des trésors d’imagination pour faire entendre leur voix. Bientôt des centaines de comités Larzac naissent dans toute la France... Et, dix ans de résistance plus tard, c'est une forme rare d'intelligence collective et de solidarité, qui les porte vers la victoire.
Couronné du César du meilleur documentaire en 2012, "Tous au Larzac" a remporté en salles un grand et légitime succès public. Alors, ce soir, à vos télés !
"Il était une fois... une forêt". Pour faire de ce conte un film-documentaire, Luc Jacquet s'est associé au botaniste et universitaire montpelliérain Francis Hallé. Résultat: "Il était une forêt" qui sort dans les salles aujourd'hui, nous invite à une plongée exceptionnelle dans la vie de la forêt amazonienne, à la découverte d'un monde sauvage resté dans son état originel, en parfait équilibre, où chaque organisme - du plus petit au plus grand - joue un rôle essentiel.
Les arbres sont prodigieusement vivants
Depuis des années,Luc Jacquet (photo ci-contre) filme la nature, pour émouvoir et émerveiller les spectateurs à travers des histoires uniques et passionnantes, comme celle de "La Marche de l'Empereur ", oscar du meilleur film documentaire en 2006, ou encore du "Renard et l'Enfant". Ce nouveau film événement qu'il a voulu consacrer à la forêt, est né de sa rencontre avec le botaniste Francis Hallé,membre du Radeau des cimes, pour qui les plantes ne "végètent" pas : elles sont même plus évoluées que nous. Dans ses différents livres, le spécialiste de la canopée, aime à le raconter : les arbres sont prodigieusement vivants. Ils communiquent entre eux en émettant des parfums, et certains savent rendre leurs feuilles toxiques pour repousser les herbivores, comme l'acacia, qui change la composition chimique de ses feuilles en quelques secondes, pour se protéger des gazelles... Certains arbres "convoquent" la pluie, grâce à des molécules volatiles qui favorisent la condensation de l'eau. D'autres se clonent et se déplacent. Enfin, les arbres peuvent être immortels, car les plantes ne sont pas programmées génétiquement pour mourir, contrairement à l'homme et aux animaux. Leur fin est toujours due à des éléments externes : une inondation, un coup de froid, un bûcheron, un incendie. Mais si tout va bien, il n'y a aucune raison pour qu'ils disparaissent : le plus vieil arbre identifié à ce jour, le houx royal de Tasmanie, a 43. 000 ans...
Les forêts tropicales, berceau de l'humanité
Quoi de plus vivant alors que les forêts tropicales, qui constituent 6% des terres émergées et abritent 75% de la biodiversité mondiale ? Berceau de l'humanité et poumon vert de la planète, elles sont aussi, pour Francis Hallé (photo ci-contre), les meilleurs alliés des hommes dans la lutte contre le réchauffement climatique. D'où l'importance de les connaître et de les comprendre, afin de freiner la déforestation et d'arrêter le massacre des dernières forêts primaires: malgré les efforts entrepris pour sa conservation, l’Amazonie perd en effet en moyenne 27.000 km2 de surface boisée chaque année, à cause de la poursuite de l’abattage continuel des arbres, de l’exploitation minière et de la reconversion des terres.
4,5 millions d'euros pour une histoire qui dure 700 ans
Véritable plaidoyer pour la défense de notre environnement, "Il était une forêt" nous donne justement à voir, pour la première fois, la naissance, la vie et la mort d'une forêt tropicale. Images incroyables d'arbres géants, filmés de la racine à la cime par la caméra, modélisations par ordinateur... Luc Jacquet n'a pas lésiné sur les budgets, le documentaire a coûté la bagatelle de 4,5 millions d’euros. Pour notre plus grand émerveillement: de la première pousse à l’épanouissement des arbres géants de la canopée, en passant par le développement des liens cachés entre plantes et animaux, ce ne sont pas moins de sept siècles qui vont s’écouler sous nos yeux et nous replonger là d'où nous venons. Même si nous l'avons oublié...
"Aux origines des plantes", éditions Fayard. Tome I : Des plantes anciennes à la botanique du XXIe siècle, sous la direction de Francis Hallé, 675 p., 52 euros. Tome II : Des plantes et des hommes, sous la direction de Francis Hallé et de Pierre Lieutaghi, 665 p., 52 euros.
Le Radeau des cimes est le nom d'expéditions scientifiques menées par Dany Cleyet-Marrel (pilote), Francis Hallé (botaniste), Gilles Ebersolt (architecte), Patrick Blanc et Olivier Pascal (collaborateurs scientifiques) notamment, sur la biodiversité de la forêt. Elles se sont déroulées à partir de 1986 pour explorer la canopée des forêts tropicales. Site internet: www.radeau-des-cimes.org
La canopée est l'étage supérieur de la forêt, directement influencée par le rayonnement solaire. Elle est parfois considérée comme un habitat ou un écosystème en tant que tel, notamment en forêt tropicale où elle est particulièrement riche de biodiversité et de productivité biologique. Des arbres dits "arbres émergents" peuvent dominer de leur hauteur la canopée.
"Snowpiercer", un film de Bong Joon-ho, avec Chris Evans, et Kang-ho Song Photo DR
"Parcourant la blanche immensité d'un hiver éternel et glacé d'un bout à l'autre de la planète, roule un train qui jamais ne s'arrête: c'est le Transperceneige, aux millle et un wagons"...
"Le Transperceneige", c'est d'abord une bande dessinée française,dont le premier album publié en1984 par Casterman, est aussitôt devenu culte. Ecrite par Jacques Lob et dessinée par Jean-Marc Rochette, puis Benjamin Legrand pour le scénario pour les albums 2 et 3, elle raconte une histoire assez classique, celle de la révolte des misérables contre les très riches, le tout dans une société du futur post-cataclysmique. Les rares rescapés de la bombe qui a rayé l'humanité de la planète Terre, se retrouvent enfermés dans un train condamné à rouler sans fin autour du monde, dans un éternel hiver gelé, hostile à toute forme de vie.
Attention, film culte en vue
"Le Transperceneige, Snowpiercer", est désormais un film, sorti en octobre dernier, destiné à devenir tout aussi culte que la BD qui l'a inspiré. Réalisé par un surdoué du cinéma, le sud-coréen Bong Joon-ho, auteur de"Barking Dog" (2000) et de trois autres très bons films, "Memories of Murder" (2003), "The Host"(2006) et "Mother" (2009), il bénéficie d'un casting international de prestige, dont Ed Harris, Tilda Swinton (exceptionnelle), Chris «Captain America» Evans, John Hurt, Kang-ho Song... Doté en outre de gros moyens en effets spéciaux, avec un budget de 39,2 millions de dollars, "Snowpiercer" aurait pu être un nième film catastrophe décrivant la fin du monde en surfant sur la vague écolo, genre "Le jour d'après", ou"2012" (très estimables au demeurant).
Train d'enfer
Aurait pu. Car pour notre plus grand bonheur, c'est raté : "Snowpiercer" ne se contente pas d'être une excellente BD bien adaptée au cinéma, pas plus qu'un simple film catastrophe très réussi. C'est une oeuvre cinématographique magistrale et complexe, dont les métaphores contemporaines mettent en mouvement, à un train d'enfer, une magnifique allégorie futuriste de la violence sociale et écologique. Seule la "baseline" de la BD demeure : on y gagne un film unique en son genre, sombre et drôle, violent et tendre, cynique mais pas désespéré, abstrait mais bourré de situations crédibles, tout à la fois sobre et démesuré, divertissant et... écolo.
Une catastrophe climatique majeure comme point de départ
Première bonne surprise, pas de 3D pour ce film tourné dans le huis clos futuriste d'un train qui devient le décor d'une fable sur l'avenir qui pourrait guetter l'humanité, au cas où la crise écologique et le changement climatique iraient à leur terme. En 2014, suite au bidouillage hasardeux d'experts scientifiques, mobilisés de part le vaste monde pour juguler par des moyens artificiels et techniques le réchauffement climatique qui menace de rendre invivable la Terre, cette dernière se retrouve subitement plongée dans une ère glaciaire sans précédent : le gaz injecté dans l'atmosphère par les savants fous pour refroidir le climat, le CW7, ça n'était pas vraiment la bonne idée du siècle. Toute ressemblance avec des événements ayant réellement existé, reste, pour l'heure, totalement fortuite.
Le train : un monde fini, aux écosystèmes fragiles
Une génération plus tard et dix-sept ans après, en 2031, on retrouve les rares survivants de la catastrophe, un échantillon de l'humanité enfermé à vie dans un train, un monde fini, aux ressources énergétiques limitées. Conçu pour transpercer la neige et les glaciers, le "super train" symbolise le rude biotope d'un univers post-catastrophe climatique, où la fragilité des écosystèmes doit être scrupuleusement préservée pour la survie de ceux qui sont à son bord.Comme dans les sociétés humaines, dans le train, chacun a sa place. L'ordre d'une sorte de fascisme "vert" y règne, rigoureux, inhumain, violent et manipulateur : pour le bien-être des habitants privilégiés des premières classes, on maintient pour leur plus grand malheur les classes populaires dans un ghetto ignoble, en queue de train, et on veille à la régulation de l'espèce humaine, moyennant des exécutions en masse, dès qu'elle devient surnuméraire pour l'écosystème du train.
« Contrôler la Machine, c’est contrôler le Monde ! ». Ou pas...
Comme dans la bande dessinée, il y a un héros. Ou plutôt un anti-héros, Curtis, au passé trouble, devenu malgré lui le guide de la révolution fomentée par ses semblables, les "queutards", condamnés à un semblant de vie. Il parvient à vaincre Mason, interprétée par l'actrice écossaise Tilda Swinton, géniale en Joseph Goebbles au féminin chargée de la "propagande" de la dictature qui gouverne le train, pour remonter tous les wagons jusqu'à conquérir la Machine, qui fait rouler le train dans un tour du monde perpétuel. L'affrontement final avec l'inventeur de "Sainte Loco", Wilford (étonnant Ed Harris), un "dictateur" fou, plus élégant que Hitler mais tout aussi machiavélique et criminel, montre que, comme dans la vraie vie, tout n'est pas si simple, rien n'est entièrement noir ou blanc. Quant à l'idéal des révolutionnaires, aussi juste soit-il, il se révèle parfois manipulé par ceux-là même qu'ils combattent au péril de leur vie... Effrayant de réalisme.
L'ours polaire
Puisqu'on est dans un train, l'issue est inévitable. C'est un méga-déraillement qui met fin à l'histoire du film, un de ceux qui font qu'on réfléchit à deux fois avant de composter son billet, mais pas à celle de l'humanité. Rien que pour la malice du clin d'oeil final, on claquerait bien la bise à Bong Joon-ho: c'est en effet un magnifique ours blanc, en très grande forme, qui accueille les deux derniers survivants du train, une jeune fille asiatique et un jeune enfant afro-américain, perdus dans un univers toujours enneigé et glacé, mais redevenu vivable. Une fin que les 30 militants de Greenpeace emprisonnés en Russie apprécieront à leur juste valeur... dès qu'ils pourront voir le film.
Moralité : l'homme survit et survivra toujours. Oui, mais comment et au prix de quelles souffrances... Ne pourrait-en éviter certaines, en se décidant à agir dès à présent efficacement contre le réchauffement climatique ? A ceux qui maintiennent que l'écologie n'est qu'un luxe pour les bobos , "Snowpiercer" oppose l'évidence : ce sont toujours les plus pauvres qui paient les crises au prix le plus fort, même et surtout écologiques. Magistral, vous dis-je.
"Snowpiecer", réalisé par Bong Joon Ho, sorti dans les salles le 30 octobre 2013 , avec Chris Evans, Song Kang-Ho, Ed Harris, Tida Swinton... Un drame science-fiction, Sud-coréen (2h05min).
►A LIRE
A la faveur de la sortie du film de Bong Joon-ho, "Le Transperceneige - L’Intégrale", de Benjamin Legrand, Lob, Jean-Marc Rochette a été rééditée en août 2013, chez Casterman, 35,00 €. Cette intégrale rassemble les trois tomes originaux du "Transperceneige" à savoir : "Le Transperceneige" (1984, réédition sous le titre "L'Echappée" en 1999), "L'Arpenteur" (1999), "La Traversée" (2000). Un excellent cadeau pour les fêtes de fin d'année...