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Politique - Page 212

  • Nitrates : la France condamnée par l'Europe

     

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    Uh lanceur d'alerte manifeste contre la pollution des plages par les algues vertes en Bretagne. Photo archives AFP

    Le 13 juin, l'Europe a condamné la France pour ses eaux polluées par les nitrates agricoles et pourrait lui infliger une lourde amende.

    La France prend la marée "verte"

    nitrates,engrais chimiques,marée verte,europe,qualité de l'eau,eutrophysationLes nitrates : un lourd contentieux, qui ne date pas d'hier. L'Hexagone est empêtré dans des problèmes de pollution agricole qui contamine ses cours d'eau depuis des années.  Avec le retour saisonnier des marées vertes en Bretagne, la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a rendu un arrêt qui constate les " manquements " chroniques de notre pays et le condamne pour non-respect de la directive nitrates de... 1991. Si la France ne se met pas rapidement en conformité, cette décision pourrait être suivie d'une amende de dizaines de millions d'euros, assortie d'astreintes journalières qui alourdiraient considérablement le montant réclamé. Comme pour la qualité de l'air, où le pays est passible d'une amende européenne de , pour non-respect de la loi sur l'air.

    nitrates,engrais chimiques,marée verte,europe,qualité de l'eau,eutrophysation6 ans de réflexion

    Concernant les nitrates,  le contentieux  avec la Commission européenne porte précisément sur le recensement des " zones vulnérables " qu'il faut impérativement protéger. Il est reproché à la France de ne pas avoir procédé à un recensement complet et de ne pas faire respecter les bassins versants risquent d'être affectés pas des teneurs en nitrate dépassent les 50 milligrammes par litre. Dans le différend qui l'oppose à l'Europe depuis six ans, le pays aurait dû inclure dix zones vulnérables supplémentaires dans son inventaire des bassins Rhin-Meuse, Loire-Bretagne, Rhône-Méditerrannée-Corse et Adour-Garonne. En outre, la CJUE ne compte pas en rester là et prépare dores et déjà un deuxième rappel à l'ordre, qui devrait épingler d'ici à fin 2013 la frilosité des programmes tricolores pour redresser la situation dans ces mêmes zones.

    Les nitrates, kesaco ? C'est grave ?

    Les composés azotés utilisés par l'agriculture intensive pour nourrir les plantes proviennent essentiellement des engrais chimques et organiques (fumier, lisier) épandus par les agriculteurs. Transformés en nitrates, leur présence excessive entraîne avec celle des phosphates qu'on trouve aussi dans les eaux usées, l'eutrophisation des rivières et fait proliférer les algues vertes. Très mauvais pour les poissons, la biodiversité et la qualité des nappes phréatiques et de l'eau potable.

    55 % des terres agricoles

    Les zones vulnérables concernent 55 % des surfaces agricoles selon l'état des lieux révisé fin 2012. La liste actuelle englobe 18.860 communes. Les porte-parole de l'agriculture intensive se sont récriés contre ce classement soi-disant excessif, et la FNSEA a déposé plusieurs recours devant les tribunaux. Après avoir manifesté en janvier dernier à Paris contre la directive nitrates qu'ils jugent excessive, ils ont obtenu en mars de l'actuel gouvernement un sursis de trois ans pour se mettre en conformité et modifier leurs pratiques, afin de réduire les nitrates. Soit jusqu'en 2016.

    C'est "'ensemble des contribuables" qui paiera la note

    nitrates,engrais chimiques,marée verte,europe,qualité de l'eau,eutrophysationLa ministre de l'écologie Delphine Batho estime que l'arrêt de la CJUE  "était prévisible". Pour la ministre, il vient sanctionner "une faiblesse de longue date " et  "la politique écologique de la droite". Pas faux. Mais s'il est vrai qu'une délimitation plus réaliste des zones vulnérables aurait dû être faite fin 2011, sous le gouvernement précédent de Nicolas Sarkozy, c'est oublier que la directive nitrates remonte à 1991 et que la situation présente est bien l'héritage de longues années de mauvaise gestion des deux principales familles politiques françaises, la gauche comme la droite...

     Un nouveau plan d'actions

    Remise du rapport sur l'agro-écologie à Stéphane Le Foll, 11 juin 2013.

    "J'ai l'intention de rencontrer rapidement Bruxelles pour présenter notre programme d'actions", annonce-t-elle aussi. Un nouveau plan d'actions français est en effet prévu pour septembre 2013, avec, entre autres, le séduisant projet d’agro-écologie initié par Stéphane Le Foll, qui doit contribuer structurellement à réduire le lessivage des nitrates par des évolutions dans les modes de culture. Mais ne va-t-il pas se heurter d'emblée notamment au sursis de trois ans obtenu cette année par les agriculteurs pour réduire les nitrates et changer leurs pratiques?  Il faudra davantage que des annonces de décisions encore à venir pour convaincre l'Europe et éviter une lourde condamnation pour une accumulation de manquements.

    Alors, comnitrates,engrais chimiques,marée verte,europe,qualité de l'eau,eutrophysationbien ?

    La France semble avoir toujours fait le pari que la Commission européenne n'irait pas jusqu'au bout de sa démarche et ne la condamnerait pas. Ou que, si elle la condamnait, elle n'exigerait pas d'elle qu'elle règle les amendes qui lui seraient infligées. C'est valable pour l'eau, c'est valable pour l'air. Or, si la  CJUE ne constate pas de progrès de la qualité de l'eau dans les prochains mois, elle pourra saisir à nouveau les magistrats et leur suggérer des pénalités journalières. Combien devra alors payer la  France? 60 millions d'euros et plus de 150.000 euros par jour, conformément à  certains calculs? Plus, ou moins ? C'est l'unique question qui demeure. Et, comme l'eurodéputée EELV Sandrine Bélier (photo ci-dessus) le souligne : "si la France ne rectifie pas le tir, les coûts des pollutions d'origine agricole seront portés par l'ensemble des contribuables". Contribuables qui paient déjà la taxe d'assainissement de l'eau. La double peine : on est bien loin du principe "pollueur-payeur"...

    Pourtant, par les temps qui courent, l'Etat a plus que jamais bien d'autres dépenses utiles à envisager que de payer des amendes à l'Europe pour ses manquements au respect de normes environnementales, qui impactent en outre, la santé des habitants pour peser aussi, au final, sur les comptes de la sécurité sociale. Air, pesticides, nitrates... : c'est drôle, on calcule le montant de l'évasion ou de la fraude fiscale, à juste titre, de même qu'on diminue constamment le nombre de médicaments remboursés, mais on ne pense jamais à évaluer le montant pourtant colossal du gaspillage engendré par les manquements de la France dans le domaine environnemental.

    Cathy Lafon

    PLUS D'INFO

    • Les nitrates sur le site du ministère de l'Ecologie  : cliquer ICI
    • Le rapport sur l'agro-écologie remis à Stéphane Le Foll: cliquer ICI
    • Les articles de Ma Planète sur les nitrates : cliquer ICI
  • Les pesticides provoquent bien des cancers et des troubles neurologiques

    pesticides vignes épandage.jpg

    Epandage de pesticides dans les vignes  DR

    Les pesticides ont bel et bien des effets néfastes pour la santé. C'est ce qui ressort des résultats d'un important rapport d'expertise collective de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), mené sur l'ensemble des connaissances internationales actuelles concernant les expositions professionnelles et les expositions précoces (fœtus et jeunes enfants).

    vigne grappe.jpgUne info qui va faire le buzz dans les rangs de vignes

    A défaut de faire plaisir, ces conclusions qui vont à l'encontre des dénégations des industriels du secteur, confortent les scientifiques, les associations, les écolos lanceurs d'alerte et les victimes de maladies professionnelles qui tirent depuis longtemps la sonnette d'alarme sur les dangers des phytosanitaires. Au premier rang desquels les travailleurs de la vigne, tout particulièrement exposés et très concernés dans la région en Charente et dans le Bordelais, comme l'a montré l'étude APAChe : Analyse de Pesticides Agricoles dans les CHEveux, publiée en février dernier. La vigne à elle seule, utilise 20% des pesticides consommés en France ! S'il n'est pas sûr que l'on cause du rapport de l'Inserm dans les travées de Vinexpo, le grand salon professionnel du vin qui s'ouvre à Bordeaux ce dimanche 16 juin, dans les rangs de vignes en revanche, l'info devrait faire le buzz....

    Les pesticides et les hommes : liaisons dangereuses

    Sollicités par le ministère de la Santé, épidémiologistes et biologistes ont analysé les données publiées en France et dans le monde, au premier semestre 2012. Les études sur les phytosanitaires  (herbicides, insecticides, fongicides) portent sur une centaine de familles chimiques (organophosphorés, organochlorés, carbamates, pyréthrinoïdes, triazines...), réparties en 10.000 dénominations commerciales et utilisées sous forme solide ou liquideIl en ressort que les pesticides majoritairement utilisés dans l'agriculture, mais que l'on retrouve partout dans l'environnement (air, poussières, denrées alimentaires...), sont impliqués dans des pathologies graves. En outre et malheureusement, s'il est nécessaire, le retrait du marché des produits ne suffit pas toujours à résoudre les problèmes. Ainsi, comme le précise le document, certains pesticides, à l'instar des organochlorés, persistent pendant des années dans l'environnement et se retrouvent dans la chaîne alimentaire...

    Les ravages des pesticides en milieu professionnel : cancers, infertilité, tumeurs cérébrales. Sympa.

    En milieu professionnel, c'est la peau qui représente la principale voie d'exposition aux pesticides. Dans la population en général, l'exposition est orale via l'alimentation. Mais comme tout travailleur est avant tout un être humain qui se nourrit pour vivre, on ne peut s'empêcher de penser que, pour celui qui est exposé professionnement aux phytosanitaires, c'est la double peine...  Les experts établissent la "forte présomption" d'un lien entre les pesticides et la survenue de cancers de la prostate et d'autres pathologies cancéreuses (lymphomes non hodgkinien, myélomes multiples) chez des personnes exposées, comme les agriculteurs et les viticulteurs, mais aussi les ouvriers de l'industrie qui les fabriquent ou les appliquent ou les personnes qui les stockent et les transportent, de même que les productions agricoles qui contiennent des résidus de pesticides. Les chercheurs relèvent également une augmentation du risque de maladie de Parkinson, et précisent qu'"un excès de risque de leucémie ne peut être écarté". L'implication des pesticides dans des problèmes de fertilité est également évoquée.  Enfin, un lien avec des tumeurs cérébrales (cancéreuses ou non) est aussi suspecté. Le registre spécialisé des cancers de Gironde, région viticole, montre ainsi une tendance à l'augmentation de leur incidence (+ 2,3% par an sur la période 2000-2007). 

    pesticides,produits phytosanitaires,chimie,maladie professionnelle,victimes,inserm,invs,ansesLes conséquences sur la grossesse, le développement de l'enfant et sa santé future

    La donnée la plus nouvelle du rapport de l'Inserm concerne la période prénatale. Chez les femmes exposées aux pesticides, professionnellement et/ou par leur alimentation, c'est aussi la double peine : les chercheurs ont observé une augmentation significative de risque de fausse couche. Idem pour les enfants exposés aux pesticides pendant la grossesse de leur mère et leur alimentation durant leur petite enfance : l'Inserm pointe pour cette population le risque de développer une leucémie, une tumeur cérébrale, une malformation génitale ou des troubles du développement (motricité, déficit cognitif ou hyperactivité).

    Le cocktail chimique : plus on en mange, plus on en garde !

    Les pesticides sont présents partout dans l'environnement : l'air intérieur et extérieur, les poussières, l'eau, le sol et les denrées alimentaires. Récemment, l’Institut de veille sanitaire (InVS) s'est inquiété de l’accumulation de ces substances dans le corps humain, spécialement en France. Alors que l’Europe décidait le 29 avril la suspension de trois insecticides pour protéger les abeilles, l'InVS publiait dans le même temps son rapport consacré à l’exposition de la population française aux substances chimiques de l’environnement. Avec un constat alarmant : l'étude réalisée entre 2006 et 2007, montre que les habitants de l’Hexagone sont largement plus exposés à certains pesticides que les Allemands, les Canadiens et même les Américains, premiers utilisateurs mondiaux alors que la France est championne d’Europe et quatrième au niveau mondial. L'étude, qui n’évoque que quelques familles de pesticides (polychlorobiphényles, organochlorés, organophosphorés et pyréthrinoïdes) que nous sommes susceptibles d’ingurgiter à chaque repas, nous apprend ainsi que 13% des femmes en âge de procréer (18-45 ans) subissent une contamination aux PCB  (polychlorobiphényles) supérieure aux seuils critiques définis par l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire, alimentaire, de l’environnement et du travail).

    Alors, que faire ?

    pesticides,produits phytosanitaires,chimie,maladie professionnelle,victimes,inserm,invs,ansesTout d'abord, poursuivre les recherches et informer. De plus amples études sur ces "périodes de vulnérabilité" (grossesse, petite enfance) et sur la "toxicité des mélanges" sont nécessaires, estime l'Inserm, qui préconise aussi que la transparence soit faite sur la composition des produits incriminés quand ils sont soumis au "secret" industriel. Quant aux ministres en charge de la Santé, de l'Ecologie et de l'Agriculture, ils se sont dits favorables, vendredi 14 juin, à une réévaluation des autorisations de commercialisation des pesticides. Dans un communiqué commun, Marie-Sol Touraine, Delphine Batho et Stéphane Le Foll,  indiquent que "ces nouveaux éléments seront transmis sans délais aux autorités européennes afin qu'ils puissent être pris en compte dans la réévaluation des substances actives autorisées au niveau communautaire". Ils annoncent aussi avoir saisi l'Anses (agence nationale de sécurité sanitaire) "afin qu'elle évalue l'impact de ces nouvelles données sur les autorisations nationales existantes".

    paul françois.jpgReconnaître les maladies professionnelles, réduire l'usage des pesticides et exclure les plus dangereux

    Le céréalier Paul François, (photo ci-contre) président de l'association Phyto-Victimes née en Charente en mars 2001, a aussitôt demandé que "le législateur inscrive dès à  présent aux tableaux des maladies professionnelles du régime agricole toutes les pathologies listées" dans la publication de l'Inserm. Les écologistes, comme l'ONG Générations futures, se félicitent de ce que « les conséquences néfastes des pesticides pour la santé soient désormais officiellement reconnues par la recherche française ». Mais la reconnaissance n'est pas suffisante. Son président, François Veillerette, « exhorte les pouvoirs publics à prendre des mesures fortes et rapides pour réduire l'usage des pesticides et exclure les plus dangereux d'entre eux » et à prendre en compte, comme le demande de son côté l'Inserm,  «les effets des mélanges de pesticides et des produits formulés, et que la plus grande transparence soit faites sur la composition des produits et sur le contenu des dossiers d’évaluation de ces derniers. » 

    Cathy Lafon

    PLUS D'INFO

    • Pesticides : Effets sur la santé - Une expertise collective de l’Inserm : cliquer ICI
    • Exposition de la population française aux substances chimiques de l'environnement INVS : cliquer ICI
    • Le site internet de Générations futures :  : cliquer ICI.
    • Le site internet de Phyto-Victimes : cliquer ICI

    LIRE AUSSI

    LES PESTICIDES EN CHIFFRES

    • Marché. Une production mondiale en forte progression. En 2011, le marché mondial des pesticides s'élevait à 44 milliards de dollars (33 milliards d'euros), en progression de 13,6 % par rapport à 2010. 27,7 % de ce chiffre d'affaires est réalisé en Europe. Viennent ensuite l'Asie, de l'Amérique latine, l'Amérique du Nord et de l'Afrique. 
    • Types. En Europe, le marché phytosanitaire est dominé par les herbicides et les fongicides.
    • Utilisation. Les Etats-Unis constituent le premier consommateur mondial de pesticides. Suivent l'Inde, la France et l'Allemagne. Rapporté à l'hectare cultivé, le Japon arrive en tête (12 kg/ha) devant l'Europe (3 kg/ha), les Etats-Unis (2,5 kg/ha) et l'Inde (0,5 kg/ha).
    • Le cas de la France. Troisième consommateur mondial, la France reste le premier utilisateur de pesticides en Europe avec 62.700 tonnes de substances actives vendues en 2011. Malgré le lancement du plan Ecophyto en 2008, et l’objectif affiché de réduction de 50% des pesticides en 10 ans ainsi que l’exclusion des substances les plus dangereuses, la consommation de pesticides (NODU) a augmenté entre la période de 2009-2010 et la période 2010-2011 de 2.7%. Avec 783 milliers d’hectare en 2011, la vigne représente 3.7% de la Surface Agricole Utile  mais elle consomme à elle seule environ 20% des pesticides (en masse) dont une majorité de fongicides (80%).
  • Fiscalité verte : une taxe carbone-diesel dès 2014 ?

     diesel essence.jpg

    Réduire l'écart de taxation entre le diesel et l'essence : l'ambition du Comité pour la fiscalité écologique (CFE)

    Le Comité pour la fiscalité écologique (CFE), présidé par l'économiste Christian de Perthuis, propose d'introduire une taxe carbone dès 2014, accompagnée d'une réduction de l'écart fiscal entre le diesel et l'essence de 1 centime par an. 

    Objectifs de la fiscalité verte : améliorer la qualité de l'air et financer l'emploi

    perthuis.jpgJeudi 13 juin,  les membres du CFE doivent adopter, en assemblée plénière, les pistes d'un verdissement de la fiscalité française qui seront proposées pour le projet de loi de Finances 2014.  Selon  l'AFP, ce scénario, défendu par Christian de Perthuis, combine deux mesures phares envisagées par le gouvernement qui a jusqu'à présent bien du mal à les concrétiser: la création d'une taxe carbone et la réduction de l'écart de taxation entre le diesel et l'essence, pour les aligner, et financer le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), qui  équivaut à une baisse de cotisations sociales.

    pollution air bdx7029.jpgAligner le diesel sur l'essence

    Le CFE propose ainsi d'introduire dès 2014, une assiette carbone dans la fiscalité avec un taux qui augmenterait progressivement jusqu'en 2020. Parallèlement, l'écart de taxation entre l'essence et le diesel serait réduit progressivement à partir de 2015 de 1 centime d'euro par an et par litre, pour revenir à la moyenne européenne (12,8 centimes) trois ans plus tard. D'environ 18 centimes par litre actuellement, cet écart en faveur du diesel passerait à 10,6 centimes en 2020.  Dans un avis adopté en avril, le comité avait estimé que l'avantage fiscal du gazole ne se justifie plus au regard de l'impact sur la santé du moteur diesel. Les vieux véhicules diesels sont pointés du doigt en raison de leur rôle dans la mauvaise qualité de l'air en ville alors que la France, en contentieux avec Bruxelles sur la question des particules, risque de lourdes amendes : 100 millions d'euros d'amende et 240.000 euros de pénalité par jour de retard...

    Introduire une composante "carbone" dans l'ensemble de la fiscalité de l'énergie

    Pour les émissions de CO2, l'originalité de ce plan est de se fonder sur une taxe déjà en vigueur : la taxe intérieure de consommation (TIC), qui frappe les carburants et les combustibles (l'ancienne TIPP). C'est l'assiette de cette taxe qui serait élargie pour prendre en compte non pas de nouvelles sources d'énergie, mais l'« empreinte carbone » de celles qui sont déjà taxées.  Concrètement, le président du CFE propose donc qu'une composante carbone (taxation des émissions de CO2) soit introduite dès 2014 dans la fiscalité de l'énergie dans son ensemble.

    Neutre pour les ménages et les entreprises la première année

    Pour ne pas pénaliser les ménages et les entreprises, cet élargissement serait compensée par une baisse de la fiscalité hors carbone et donc indolore la première année.  La "montée en régime" du système,  (2015-2020) s'effectuerait ensuite en relevant progressivement le prix du carbone, qui passerait de 7 euros la tonne de CO2 en 2014, soit la "moyenne des cours observés sur le marché européen en 2012", à 20 euros en 2020.

    Compenser et redistribuer aux ménages et aux entreprises les nouvelles recettes

    Le scénario de Christian de Perthuis repose enfin sur un système de compensations visant à redistribuer aux ménages et aux entreprises les nouvelles recettes fiscales (5 milliards d'euros estimés en 2020). Pour les ménages, il imagine un crédit d'impôt dégressif pour les foyers à faible revenu et des mesures comme une incitation financière au retrait des vieux véhicules diesel. Pour les entreprises, la "mesure principale" consisterait à financer le crédit d'impôt compétivité emploi (CICE), selon le document. L'inconvénient étant que le rendement des mesures serait nul en 2014 pour atteindre 2 milliards d'euros en 2016, soit moitié moins que les 3,5 milliards d'euros attendus par le gouvernement pour financer le crédit d'impôt compétitivé emploi (CICE). D'autres mesures sur la fiscalité écologique devraient donc devoir être prises.

    Juridiquement correct

    Le premier avantage de ce plan, est qu'il ne fait que modifier le calcul de l'assiette des taxes énergétiques existantes et ne crée pas un nouvel impôt. Il ne pose donc pas de difficultés juridiques, contrairement à la taxe carbone voulue par Nicolas Sarkozy mais taclée par le Conseil constitutionnel en décembre 2009.

    Des mécanismes "intéressants", selon les écolos

    YANNICK JADOT.jpgCes mécanismes visant à redistribuer intégralement les nouvelles recettes vont dans le sens des préconisations de l'eurodéputé EELV, Yannick Jadot, qui fait aussi partie du CFE et qui milite, comme de juste, pour une hausse des taxes sur le gazole. Pour ne pas pénaliser financièrement les automobilistes, il  propose lui aussi un alignement progressif sur quatre ans de la fiscalité du diesel sur celle de l'essence : en 2017, les taxes seraient égales.  Comme il l'expliquait dans le quotidien le Parisien du 17 avril, selon lui, ce serait 1,2 millards d'euros par an de recettes fiscales supplémentaires qui permettraient de financer la reconversion du vieux parc diesel. Ajouté au bonus écologique, cela pourrait se traduire par 3.000 € à 5.000 € d'aide à l'achat d'un véhicule neuf, répondant à la nouvelle norme Euro6 sur la polluton, en émettant moins de 90 g/CO2 par an.

    orphelin.jpgAccueil  plutôt favorable aussi du côté des ONG. Matthieu Orphelin, porte-parole de la Fondation Nicolas Hulot, contacté par l'AFP, juge ces mesures  "intéressantes". L'ONG regrette en revanche le manque d'ambition des valeurs retenues, tant pour le prix de la tonne de CO2 en 2020 que pour le rythme de rattrapage entre diesel et essence ."A ce rythme d'un centime par an, il faudra 17 ans pour compenser l'écart", a remarqué Mathieu Orphelin...

    Cathy Lafon

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