Fiscalité verte : une taxe carbone-diesel dès 2014 ?
Réduire l'écart de taxation entre le diesel et l'essence : l'ambition du Comité pour la fiscalité écologique (CFE)
Le Comité pour la fiscalité écologique (CFE), présidé par l'économiste Christian de Perthuis, propose d'introduire une taxe carbone dès 2014, accompagnée d'une réduction de l'écart fiscal entre le diesel et l'essence de 1 centime par an.
Objectifs de la fiscalité verte : améliorer la qualité de l'air et financer l'emploi
Jeudi 13 juin, les membres du CFE doivent adopter, en assemblée plénière, les pistes d'un verdissement de la fiscalité française qui seront proposées pour le projet de loi de Finances 2014. Selon l'AFP, ce scénario, défendu par Christian de Perthuis, combine deux mesures phares envisagées par le gouvernement qui a jusqu'à présent bien du mal à les concrétiser: la création d'une taxe carbone et la réduction de l'écart de taxation entre le diesel et l'essence, pour les aligner, et financer le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), qui équivaut à une baisse de cotisations sociales.
Aligner le diesel sur l'essence
Le CFE propose ainsi d'introduire dès 2014, une assiette carbone dans la fiscalité avec un taux qui augmenterait progressivement jusqu'en 2020. Parallèlement, l'écart de taxation entre l'essence et le diesel serait réduit progressivement à partir de 2015 de 1 centime d'euro par an et par litre, pour revenir à la moyenne européenne (12,8 centimes) trois ans plus tard. D'environ 18 centimes par litre actuellement, cet écart en faveur du diesel passerait à 10,6 centimes en 2020. Dans un avis adopté en avril, le comité avait estimé que l'avantage fiscal du gazole ne se justifie plus au regard de l'impact sur la santé du moteur diesel. Les vieux véhicules diesels sont pointés du doigt en raison de leur rôle dans la mauvaise qualité de l'air en ville alors que la France, en contentieux avec Bruxelles sur la question des particules, risque de lourdes amendes : 100 millions d'euros d'amende et 240.000 euros de pénalité par jour de retard...
Introduire une composante "carbone" dans l'ensemble de la fiscalité de l'énergie
Pour les émissions de CO2, l'originalité de ce plan est de se fonder sur une taxe déjà en vigueur : la taxe intérieure de consommation (TIC), qui frappe les carburants et les combustibles (l'ancienne TIPP). C'est l'assiette de cette taxe qui serait élargie pour prendre en compte non pas de nouvelles sources d'énergie, mais l'« empreinte carbone » de celles qui sont déjà taxées. Concrètement, le président du CFE propose donc qu'une composante carbone (taxation des émissions de CO2) soit introduite dès 2014 dans la fiscalité de l'énergie dans son ensemble.
Neutre pour les ménages et les entreprises la première année
Pour ne pas pénaliser les ménages et les entreprises, cet élargissement serait compensée par une baisse de la fiscalité hors carbone et donc indolore la première année. La "montée en régime" du système, (2015-2020) s'effectuerait ensuite en relevant progressivement le prix du carbone, qui passerait de 7 euros la tonne de CO2 en 2014, soit la "moyenne des cours observés sur le marché européen en 2012", à 20 euros en 2020.
Compenser et redistribuer aux ménages et aux entreprises les nouvelles recettes
Le scénario de Christian de Perthuis repose enfin sur un système de compensations visant à redistribuer aux ménages et aux entreprises les nouvelles recettes fiscales (5 milliards d'euros estimés en 2020). Pour les ménages, il imagine un crédit d'impôt dégressif pour les foyers à faible revenu et des mesures comme une incitation financière au retrait des vieux véhicules diesel. Pour les entreprises, la "mesure principale" consisterait à financer le crédit d'impôt compétivité emploi (CICE), selon le document. L'inconvénient étant que le rendement des mesures serait nul en 2014 pour atteindre 2 milliards d'euros en 2016, soit moitié moins que les 3,5 milliards d'euros attendus par le gouvernement pour financer le crédit d'impôt compétitivé emploi (CICE). D'autres mesures sur la fiscalité écologique devraient donc devoir être prises.
Juridiquement correct
Le premier avantage de ce plan, est qu'il ne fait que modifier le calcul de l'assiette des taxes énergétiques existantes et ne crée pas un nouvel impôt. Il ne pose donc pas de difficultés juridiques, contrairement à la taxe carbone voulue par Nicolas Sarkozy mais taclée par le Conseil constitutionnel en décembre 2009.
Des mécanismes "intéressants", selon les écolos
Ces mécanismes visant à redistribuer intégralement les nouvelles recettes vont dans le sens des préconisations de l'eurodéputé EELV, Yannick Jadot, qui fait aussi partie du CFE et qui milite, comme de juste, pour une hausse des taxes sur le gazole. Pour ne pas pénaliser financièrement les automobilistes, il propose lui aussi un alignement progressif sur quatre ans de la fiscalité du diesel sur celle de l'essence : en 2017, les taxes seraient égales. Comme il l'expliquait dans le quotidien le Parisien du 17 avril, selon lui, ce serait 1,2 millards d'euros par an de recettes fiscales supplémentaires qui permettraient de financer la reconversion du vieux parc diesel. Ajouté au bonus écologique, cela pourrait se traduire par 3.000 € à 5.000 € d'aide à l'achat d'un véhicule neuf, répondant à la nouvelle norme Euro6 sur la polluton, en émettant moins de 90 g/CO2 par an.
Accueil plutôt favorable aussi du côté des ONG. Matthieu Orphelin, porte-parole de la Fondation Nicolas Hulot, contacté par l'AFP, juge ces mesures "intéressantes". L'ONG regrette en revanche le manque d'ambition des valeurs retenues, tant pour le prix de la tonne de CO2 en 2020 que pour le rythme de rattrapage entre diesel et essence ."A ce rythme d'un centime par an, il faudra 17 ans pour compenser l'écart", a remarqué Mathieu Orphelin...
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