Le projet de loi Macron et l'éternel retour des déchets nucléaires

Le projet du centre d'enfouissement profond des déchets radioactifs de Bure (Meuse) a été retiré de la loi Macron. Photo archives AFP
Le projet de loi Macron, très controversé jusque - et peut-être surtout - dans les rangs de la gauche, est examiné par les députés depuis ce lundi 26 janvier. Nombre de points de la loi "Economie : croissance et activité" portée par le ministre de l'Economie vont faire l'objet de chauds débats dans l'hémicycle. Notamment l'avenir des professions réglementées et l'extension du travail le dimanche, pour ne citer que les deux thèmes les plus médiatisés.
L'article qui fâche
Les 201 articles d'un texte fleuve souvent qualifié de "fourre-tout" qui veut réformer une grande variété de l'activité économique, du logement à l'environnement en passant par les transports et les licenciements collectifs,devaient être 202. L'un d'eux a disparu. Il concernait le projet très polémique du centre de stockage des déchets radioactifs profonds Cigéo de Bure (Meuse) et aurait pu mettre le feu avec les écologistes qu menaçaient de ne pas voter la loi. Il ne sera finalement pas débattu car il a été supprimé par Emmanuel Macron, lors de la présentation en conseil des ministre du texte final, le 10 décembre dernier.
Déjà dans le projet de loi Royal sur la transition énergétique...
Pourquoi revenir alors dessus ? C'est que l'histoire de cet article de loi qui visait à "définir la notion de réversibilité, adapter la procédure d'autorisation des centres de stockage en couche géologique profonde et le calendrier du projet Cigéo pour sécuriser sa réalisation dans le délai imparti" - autrement dit shunter le débat public pour imposer le projet - à défaut d'être amusante, mérite d'être connue. Il avait en effet déjà été retiré en juin dernier du projet de loi sur la "transition énergétique et la croissance verte", où Ségolène Royal avait essayé de l'introduire subrepticement.
Rebelote avec Macron
Et voilà que courant novembre, rebelote : les écologistes de la Coordination Bure-Stop, du Réseau Sortir du nucléaire et des Amis de la Terre montent au créneau en apprenant que le projet Cigéo tentait de refaire surface dans un article du projet de loi pour la croissance et l'activité, dit loi Macron. Les associations font aussitôt monter la pression par l'intermédiaire des députés Europe Ecologie-Les Verts, pour lesquels "la loi Macron ne peut être le cheval de Troie du projet Cigéo". Le ministre aurait alors cédé aux pressions du parti qui a menacé de ne pas voter la loi si Cigéo y figurait, à la satisfaction des associations. "Il aurait été inacceptable que les prochaines étapes et la définition de ce projet soient votées au détour d'une loi fourre-tout. La question des déchets radioactifs est trop grave et mérite un vrai débat de société", a déclaré le Réseau Sortir du nucléaire qui avait demandé l'abandon du projet.
Les députés écologistes voteront-ils tous comme un seul homme le texte sur la croissance et l'activité d'Emmanuel Macron, considéré comme ultra-libéral par une partie de la gauche ? Rien n'est moins sûr. Pour ce qui est du projet d'enfouissement des déchets nucléaires Cigeo, lui, en tout cas, il a disparu du texte. En attendant de renaître,tel le phénix de ses cendres, pour revenir dans un autre projet de loi ? A suivre...
►LIRE AUSSI
- Les articles de Ma planète sur le nucléaire : cliquer ICI



Alors voilà. Une fois de plus, c'est le chamboule-tout, on ne sait plus où on en est. La France s'est engagée récemment à fermer ses plus vieux réacteurs, comme ceux de Fessenheim (photo ci-contre), pour des raisons de coût et par mesure de sécurité. La France s'est aussi engagée à ne plus construire de réacteurs nouveaux pour se substituer à ceux qu'elle va fermer et démanteler, afin de réduire de 75% à 50% la part du nucléaire dans le mix énergétique tricolore à l'horizon 2025. Pas pour faire plaisir aux écolos. Mais pour favoriser les énergies décarbonées, ménager les ressources d'énergies fossiles et développer les renouvelables, les plus durables, les plus écologiques et les plus sûres de toutes les sources d'énergies. Bref, préparer un avenir climatiquement correct qui nous permette d'assurer aussi notre indépendance énergétique en développant la croissance verte et de nouveaux emplois dans de nouvelles filières industrielles. Tout ce beau programme étant contenu dans une loi, votée en décembre dernier à l'Assemblée, et bientôt examinée par le Sénat :
Montebourg en avait rêvé, Ségolène l'a fait
"Pourquoi de nouveaux réacteurs nucléaires, si l'idée c'est de commencer par économiser l'électricité, comme le prévoit la loi sur la transition énergétique et de faire monter en puissance les renouvelables?", se demandent les existentialistes, forcément en quête de sens. " Et où les mettra-t-on, et que fera-t-on de leurs déchets?", se demandent les pragmatiques ? Avec ses 58 réacteurs répartis sur 19 sites, la France est le pays au monde qui compte déjà le plus de centrales nucléaires au km2. Restera-t-il encore des surfaces naturelles dans notre beau pays en 2100 ? "Et en cas d'accident, ou d'attentat, on fait comment?", s'interrogent les anxieux. "Et puis, comment va-ton les financer, vu le coût déjà pharamineux d'entretien du parc existant et de sa remise à niveau post-Fukushima (55 milliards d'euros d'ici à 2025) ?", osent les radins. Ce sont des installations extrêmement coûteuses, pour un prix du kilowattheure très cher et pour un uranium importé. "Comment va-t-on financer parallèlement le développement des renouvelables ?", rêvassent les naïfs. Enfin, question ultime des écolos : "Mais comment peut-on être aussi incohérent ?"
Le fin mot de l'histoire pourrait venir du Commissariat à l'énergie atomique. "A l'horizon 2050-2055, toutes les centrales qui existent auront été arrêtées", faisait remarquer en avril 2014