Pollueur-payeur : pourquoi Paris veut passer au péage de transit poids lourds
Le périphérique parisien. Photo AFP
Le Conseil de Paris s'apprête à voter ce lundi la mise en fonctionnement du péage de transit poids lourds sur le boulevard périphérique, une taxe destinée à succéder à l'écotaxe, impôt vert mort-né. Le point.
Péage transit poids lourds : de quoi s'agit-il ?
Après l'abandon des ZAPA destinées à réduire les émissions de particules fines et la pollution de l'air dans les grandes villes et après le recul de l'Etat sur la mise en place d'une écotaxe destinée au financement d'infrastructures alternatives au tout routier, le problème de l'amélioration de la qualité de l'air reste quasi entier. Près de 200 projets d'extension de tramway, de lignes de bus à haut niveau de service ou encore d'aménagement ferroviaires et fluviaux restent en rade ou sont menacés de ne pas se concrétiser du tout partout en France, dont 5 dans la région. Et les grandes métropoles de la France, toujours en infraction avec les normes européennes sur la qualité de l'air, continuent de connaître des pics de pollution de l'air, néfastes pour la santé des habitants. D'où l'amendement voté par l'Assemblée nationale le 26 juin dernier, qui remplace l'écotaxe par un péage de transit poids lourds, initialement prévue pour entrer en vigueur au 1er janvier 2015. Après trois mois de "une marche à blanc" durant l'automne, les camions de plus de 3,5 tonnes devraient être taxés à hauteur de 0,13 euros en moyenne par kilomètre.
Combien la taxe poids lourds doit-elle rapporter ?
Le manque à gagner des recettes de l'écotaxe est de 800 millions d'euros en 2014. Pour l'avenir, c'est environ 1,2 milliards d'euros qui manquerait à l'Hexagone pour financer ses projets d'infrastructures. S'il reste encore 250 millions d'euros à trouver, avec le nouveau péage transit poids lourds, l'Hexagone bénéficierait au total d'une manne de 550 millions d'euros pour l'ensemble du pays. Le grand Paris, quant à lui, devrait percevoir cinq millions d'euros par an. Le boulevard périphérique parisien, ainsi que l'ensemble des autoroutes d'Ile-de-France, fait partie des 4.000 km touchés par ce péage dans l'Hexagone. La capitale se prépare donc à mettre en application le dispositif en commençant par une première "marche à blanc" de trois mois, durant laquelle le système est activé à compter du 1er octobre. Les camions ne paieront qu'à la mise en oeuvre définitive au 1er janvier 2015.
Inciter à recourir aux modes de transport alternatifs à la route
Ce péage entend s'attaquer au "transit international" du boulevard périphérique, "source de beaucoup de nuisances pour les riverains", selon Christophe Najdovski, adjoint écolo à la mairie de Paris en charge du dossier (photo ci-contre). En réponse aux critiques sur une possible augmentation des prix, notamment de denrées alimentaires, en région parisienne du fait de ce nouvel impôt, l'élu EELV explique : "le montant de cette taxe est extrêmement modeste" et vise à "inciter le ressort vers les autres modes de transport, ferroviaire ou fluvial".
Bientôt, le retour des ZAPA ?
L'opposition UMP à la mairie de Paris, conduite pour Nathalie Kosciusco-Morizet, ancienne ministre de l'Ecologie, relève que "pendant ce temps, on ne parle pas des ZAPA", ces zones restreintes, interdites aux véhicules les plus polluants, que voulait expérimenter la droite à l'issue du Grenelle de l'environnement. L'actuelle maire socialiste de Paris, Anne Hidalgo, avait alors appelé à "zapper les zapa", une mesure jugée alors par la gauche antisociale et peu efficace pour l'environnement. Après un mois de septembre de nouveau marqué par un pic de pollution en Ile-de-France, le principe de ces zones urbaines interdites aux véhicules les plus polluants, déclinaison française des LEZ, ferait son retour à Paris. Il devrait même figurer au prochain Conseil de la ville et Anne Hidalgo pourrait compter sur le vote des élus du groupe UMP.
Tout cela est bel et bien. Mais quid de la mise en application du dispositif de la taxe poids lourds sur le reste du territoire ? Elle a déjà été repoussée par le secrétariat d'Etat aux Transports aux "premiers mois de 2015" au lieu du 1er janvier, pour "laisser le temps à la négociation"... Les autres grandes villes de l'Hexagone, victimes elles aussi régulièrement de pics de pollution, vont-elles ré-étudier à leur tour la possibilité d'introduire enfin des zones urbaines de circulation à basses émissions de particules, présentes un peu partout en Europe? Voilà les vraies questions. La seule action de Paris ne suffira pas, en effet, à régler le problème français de la pollution de l'air qui, si elle s'inscrit dans un contexte planétaire (la pollution n'a pas de frontière), ne se résume pas, hélas, aux émissions ponctuelles d'un volcan islandais en éruption...
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