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pesticides - Page 34

  • Gironde: l'enquête d'une femme en lutte contre les pesticides dans les rangs de vigne

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    En Gironde, Marie-Lys Bibeyran, mène un combat de fond contre l'usage des pesticides. Photo DR

    Le dossier des pesticides ne cesse de s'alourdir. Dernier élément à charge : des élèves ont été intoxiqués début mai à Villeneuve-de-Blaye, en Gironde, suite à un épandage de fongicide dans les vignes, à proximité de leur école primaire. Selon "Sud Ouest", l'enquête administrative a conclu à l'utilisation "inappropriée" d'un produit autorisé. La préfecture veut mettre en place des mesures de prévention pour les riverains et le Conseil interprofessionnel des vins de Bordeaux (CIVB) reconnaît que les pratiques des viticulteurs doivent évoluer... Il serait temps, est-on tenté de dire.

    veillerettte.jpgLes enquêtes de Générations futures

    L'affaire scandalise d'autant plus qu'une enquête de l'association environnementale Générations Futures, vient d'analyser les mèches de cheveux d'une trentaine d'enfants vivant dans des zones agricoles et y a relevé des traces de pesticides. Déjà, en février 2013, l'association avait publié les résultats d'une première étude réalisée dans le Médoc, qui avait  mis à jour la surexposition au cancer des salariés de la vigne.  Cette fois-ci, au total, 600 résidus de produits qui perturbent le système hormonal ont été retrouvés dans les cheveux des enfants. Sur ces 30 enfants, 6, 4 garçons et 2 filles de 7 à 10 ans,  sont scolarisés à l'école primaire de Listrac (Gironde).  "Cette étude montre que nos enfants sont exposés au quotidien à une véritable soupe chimique", a souligné le 29 avril le porte-parole de Générations Futures, François Veillerette, dans "Le Parisien". Outre l'émergence de cancers, ces perturbateurs endocriniens peuvent avoir des effets néfastes sur l'obésité, le développement neurologique, la sexualité ou la fertilité.

    abeille.jpgProtéger les abeilles, oui, mais les enfants ?

    Dans le même temps, le 28 avril, le ministre de l'agriculture Stéphane le Foll annonçait que les épandages de pesticides seraient bientôt interdits en journée pendant les périodes de floraison afin de protéger les abeilles. Une bonne mesure, certes. Mais l'association Générations Futures demandait quant à elle "le retrait de tous les pesticides perturbateurs endocriniens" listés dans son rapport. La santé des abeilles, c'est important, car la vie sur Terre en dépend. Mais celle des êtres humains et de leurs enfants ne devrait-elle pas être considérée en premier ?

    bibeyran et son frère.jpgLe combat d'une soeur contre les pesticides

    Dans les vignes girondines, notamment mais pas seulement, des salariés ont déjà été victimes de l'usage des pesticides. En Dordogne, une salariée dans un domaine viticole intoxiquée par une pulvérisation de pesticides, a ainsi obtenu en avril dernier, la reconnaissance de la "faute inexcusable de son employeur". En Gironde, Marie-Lys Bibeyran est la soeur de l'une de ces victimes. Denis, employé dans une propriété viticole de Listrac-Médoc en Gironde, est décédé à 47 ans, en 2009, d'un cancer des voies biliaires. Depuis 2011, sa soeur se bat pour sa mémoire. Salariée viticole elle-même, elle a entamé des démarches auprès de la MSA de Gironde pour obtenir la reconnaissance post-mortem du cancer de son frère comme maladie professionnelle due aux phytosanitaires qu'il utilisait en tant qu'ouvrier agricole.

    L'enquête de Marie-Lys

    Marie-Lys Bibeyran veut aller au-delà du combat juridique. En mai 2013, la trentenaire a commencé à son tour une enquête sanitaire sur deux échantillons de population, en Médoc (53 personnes) et hors-Médoc (27 personnes), afin de mettre en valeur les effets sur leur santé de l'exposition des salariés agricoles et des riverains aux pesticides.  Dans les deux groupes, elle a dégagé quatre sous-catégories : les salariés agricoles, les riverains (dans une limite de 300 mètres de la zone de traitement), les riverains de 300 à 500 mètres, et enfin les personnes vivant en zone non-agricole ou en zone agricole, mais au-delà de 500 mètres. Un travail sérieux, même s'il ne peut revendiquer aucune prétention scientifique, comme elle le précise elle-même. Mais dont les résultats qu'elle a obtenus, analysés et communiqués le 8 avril dernier, interrogent sérieusement.

    pesticides vignes épandage.jpgDe 70 à 75 % des salariés agricoles ont des problèmes de santé aigus

    Dans les deux groupes, les deux tiers des salariés agricoles exposés aux traitements par pesticides sont affectés par des problèmes de santé aigus (allergies, problèmes cutanés et/ou respiratoires, de concentration, près d'un quart souffre de problèmes de santé chronique (cancer, pleurésie). En Médoc, les proches riverains (de 0 à 500 mètres) sont atteints dans les mêmes proportions que les salariés agricoles par des problèmes de santé aigus (70 %). Ils sont moins nombreux à en souffrir hors Médoc (43 % hors Médoc). 20 % d'entre eux ont des problèmes de santé chronique, 20 % en Médoc, et 14% hors Médoc. Enfin, pour les personnes habitant à plus de 500 mètres de ces zones de traitement aux pesticides ou en zone non agricole, aucune d'entre elles n'est atteinte de problème de santé chronique, en revanche, entre 20 à 7 % d'entre elles disent avoir des problèmes de santé aigus.

    La petite enquête sans prétention de Marie-Lys semble rejoindre les conclusions des études scientifiques de Générations Futures : plus on vit près des lieux d'épandage agricole de pesticides, et plus on court de risque sanitaire. La bonne idée ne serait-elle pas que les pouvoirs publics commandent de véritables enquêtes scientifiques similaires à celle qu'a conduite, en amatrice, la salariée agricole ? Un jour, peut-être? 

    Cathy Lafon

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    PLUS D'INFO

    • Marie-Lys Bibeyran. Désormais militante anti-pesticides, elle est membre de Générations Futures et de Phyto-Victimes. À Listrac (Gironde) qui est entouré de vignes, elle s'est également attelée à recenser les personnes atteintes de cancers ces dix dernières années pour prouver que l’effet des traitements utilisés dans le vignoble peut aussi avoir des effets sur  sa population. Elle vient aussi de réaliser un Bulletin d'Information sur les Traitements des Vignes destiné à être distribué chez les habitants riverains de vignes, à Listrac-Médoc. Ce bulletin est le fruit d'une collaboration avec Nadine Lauverjat et l'association Générations Futures.
    • L'enquête APAChe : Analyse de Pesticides Agricoles dans les CHEveux, de l'association Générations futures, sur "l'exposition aux pesticides chez les salariés viticoles et les riverains vivant au coeur des vignes du Bordelais " a été rendue publique le mardi 19 février 2013.  Une autre étude, du laboratoire bordelais Excell rendue publique le 14 février 2013, et relayée par La Vigne, constatait la présence de résidus de pesticides dans 90% des vins. .

     REPERES

    • La France reste le premier utilisateur de pesticides en Europe avec 62.700 tonnes de substances actives vendues en 2011.  780.000 hectares de vignobles français représentent 3,7 % de la surface agricole utile du pays, mais consomment environ 20 % des pesticides.
  • Pesticides dans les vignes :une salariée obtient la reconnaissance de la "faute inexcusable de son employeur"

    vigne gappe 2.jpg

    C'est une information publiée par "le Monde", le 11 avril dernier. Après sept ans de combat judiciaire, Sylvie S., salariée en Dordogne dans un domaine viticole et intoxiquée par une pulvérisation de pesticides, a obtenu la reconnaissance de la "faute inexcusable de son employeur".

    Une première

    La nouvelle risque de faire grand bruit dans les rangs de vignes du Sud-Ouest, et au-delà. Si les maladies dues à l'exposition aux pesticides sont de plus en plus souvent reconnues comme professionnelles, la reconnaissance de la faute inexcusable par l'employeur constitue en effet une première.

    vigne pesticides traitement.jpgEmpoisonnée par deux pesticides

    Les faits se sont produits en 2007. Employée par le château Monestier La Tour, qui produit des Bergerac rouges et blancs réputés, Sylvie S. travaille le 8 juin sur des vignes traitées la veille avec deux produits phytosanitaires du groupe BASF, le Cabrio Top et le Clameur, reconnus comme "irritants". Sans le savoir et sans même une paire de gants, Sylvie reçoit en plein visage de hautes doses de produits insecticides hautement dangereux. Après avoir été hospitalisée d'urgence à l'hôpital de Sainte-Foy, la salariée continue à souffrir par la suite de violents maux de têtes, de vertiges, de nausées et de grosses fatigues. Elle fait reconnaître qu'elle est victime d'un accident du travail en août 2007. Elle reste en arrêt de travail jusqu'au 25 mai 2010, date à laquelle la Mutuelle sociale agricole (MSA) la déclare "consolidée". Elle souffre cependant toujours de troubles importants et n'a jamais pu reprendre une activité professionnelle depuis 2007.

    Un espoir juridique pour tous les salariés victimes de pesticides

    Le tribunal des affaires sociales de Bordeaux (TASS) rejette une première fois, en février 2012, sa demande de reconnaissance de faute inexcusable de l'employeur, le jugement spécifiant que la cause à l'origine des troubles n'était pas démontrée. En 2013, le 31 octobre, la chambre sociale de la cour d'appel de Bordeaux infirme la décision et reconnait la faute inexcusable, s'appuyant sur le fait que la dangerosité des produits utilisés ne pouvait être ignorée des propriétaires du château, qui, en outre, n'avaient pas fourni de matériel de protection adapté. Ces derniers avaient décidé de se pourvoir en cassation.  Démarche qu'ils ont abandonné le 10 avril dernier : la responsabilité de l'employeur dans l'intoxication de la salariée viticole est donc reconnue et ouvre à Sylvie, dont la rente d'accident de travail s'élève à 107 euros mensuels, la possibilité de bénéficier d'une indemnisation complémentaire.

    En Gironde aussi

    marie lise bibeyran.jpgCette victoire juridique fait avancer la jurisprudence et constitue un encouragement pour tous les autres salariés victimes de pesticides qui ont engagé ou voudraient engager de telles procédures. Comme en Gironde, où Marie-Lys Bibeyran (photo ci-contre) dont le frère, Denis, est décédé  en 2009 d’une forme rare de cancer après avoir, sa vie durant, pulvérisé des produits chimiques dans les vignes, est persuadée du lien de cause à effet. Salariée viticole elle-même, elle a entamé des démarches auprès de la MSA de Gironde pour obtenir la reconnaissance post-mortem du cancer de son frère comme maladie professionnelle due aux phytosanitaires qu'il utilisait en tant qu'ouvrier agricole.

    Cathy Lafon

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    REPERES

    •  La France reste le premier utilisateur de pesticides en Europe avec 62.700 tonnes de substances actives vendues en 2011. Malgré le lancement du plan Ecophyto en 2008, et l’objectif affiché de réduction de 50% des pesticides en 10 ans ainsi que l’exclusion des substances les plus dangereuses, la consommation de pesticides a augmenté entre la période de 2009-2010 et la période 2010-2011 de 2,7%.
    •  780.000 hectares de vignobles français représentent 3,7 % de la surface agricole utile du pays, mais consomment environ 20 % des pesticides.
    • La Mutuelle Sociale Agricole estime pour sa part que seuls 5 % des cancers seraient liés aux pesticides
  • Pesticides. Professionnalisation de l’application des produits phytosanitaires : le Sénat fait marche arrière

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    Traitement de pommiers en fleurs. Photo Archives AFP

    Lors de l’adoption du projet de loi d’avenir pour l’agriculture, le 17 avril, le Sénat a voté un amendement qui met en péril la professionnalisation de l’application des produits phytosanitaires et par la même occasion, la santé de leurs  utilisateurs, et la protection de l'environnement.

    Le vin, patrimoine protégé de la France

    Après les députés en janvier, les sénateurs viennent d'examiner 841 amendements en plus de 41 heures de débat. Deux d'entre eux, qui visaient à reconnaître que "le vin, produit de la vigne, et les terroirs viticoles font partie du patrimoine culturel, gastronomique et paysager protégé de la France", ont été adopté. Sympathique décision, qui a aussitôt fait le buzz et en a éclipsé une autre, moins réjouissante.

    phytosanitaires,pesticides,loi,sécurité,application,entreprises,fnet,amendement,avenir agricultureCréation d'une dérogation à l'obligation d'agrément pour appliquer les pesticides

    Un autre amendement à la loi pour l'avenir de l'agriculture, destinée à faire prendre à la France le virage de l'agroécologie, concerne les pesticides, est en effet passé inaperçu, sauf aux yeux des professionnels du secteur. Voté pour créer une dérogation à l'obligation d'agrément, il avait l'avis favorable du gouvernement. Résultat: l’application de produits phytosanitaires, malgré le danger potentiel qu'ils représentent pour la santé de ceux qui les manipulent, pourrait se faire sans agrément, en dessous d’une certaine limite de surface et de chiffre d’affaires.

    napias.jpg"Un revirement stupéfiant"

    Dans un communiqué de presse, la Fédération Nationale Entrepreneurs des Territoires (FNET), qui regroupe les entrepreneurs de travaux agricoles, de travaux forestiers et de travaux ruraux, déplore  ce vote du Sénat, qui est, selon son Gérard Napias, son président (photo ci-contre), "un revirement stupéfiant allant à l’encontre de la professionnalisation de l’application des produits phytosanitaires". 

    La sécurité de l'applicateur en question

    "Nos entreprises de travaux se sont mobilisées pour obtenir leur agrément. Par obligation certes, mais également pour afficher un professionnalisme vis-à-vis de la société", explique Gérard Napias. Cette décision du Sénat anéantit les efforts réalisés par les 10.000 entreprises agréés pour garantir la sécurité de l’applicateur, le respect de l’environnement et la traçabilité des interventions.

    phytosanitaires,pesticides,loi,sécurité,application,entreprises,fnet,amendement,avenir agricultureIncompréhension

    Un vote incompréhensible et paradoxal, souligne la FNET qui rappelle que "ces mêmes sénateurs ont voté il y deux mois la loi Labbé interdisant l’utilisation des pesticides en zone non agricole d’ici 2025". Le fossé entre les zones agricoles et les zones non-agricoles se creuse, avec, paradoxalement, moins de protection pour les professionnels de l'agriculture, alors qu'ils utilisent en bien plus grande quantité les phytosanitaires. De là à penser que la loi Labbé ne serait là que pour amuser la galerie, il n'y a qu'un pas. 

    Pesticides : on recule au lieu d'avancer

    "Avec cet amendement à la loi d’avenir, nous reculons alors que ce n’est pas le moment de baisser la garde sur la question de l’usage des produits phytosanitaires" conclut Yolaine Villain, Présidente de la commission environnement à la FNET. En effet, sur le terrain, la FNET constate que des mises en cause pénales de chefs d’entreprises liées aux phytosanitaires surgissent. Et que leurs conséquences sont sans commune mesure avec de simples questions de commodité et de voisinage.

    phytosanitaires,pesticides,loi,sécurité,application,entreprises,fnet,amendement,avenir agricultureQue fait le ministre ?

    Mais que fait le ministre, s'interroge la FNET ? Alors que Stéphane Le Foll refusait la dérogation sur le sujet depuis des mois, il vient en effet de laisser passer un amendement qui enterre une partie des objectifs du plan Ecophyto 2014, projet d’envergure de réduction des phytosanitaires, porté depuis le Grennelle de l'environnement de 2008.

    Cathy Lafon