Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

cnrs - Page 7

  • Sciences : même interdits, les pesticides ne sont pas tout à fait morts

    pesticides,étude,cnrs,edytem,savoie,vigne,sols,ddt

    De la bouillie bordelaise, du DDT, du glyphosate... Depuis des décennies, la France, aujourdhui le 1er pays consommateur de pesticides en Europe, utilise à forte dose les produits chimiques dans ses champs. La vigne, notamment, représente 3% des terres agricoles nationales mais consomme environ 15% des pesticides commercialisés sur notre territoire. Avec les conséquences pour la santé des consommateurs et des agriculteurs que l'on connaît. Ce que l'on sait moins, c'est que longtemps après leur interdiction, les pesticides restent dans l'environnement et peuvent ressurgir, comme vient de le mettre en évidence une étude conduite par le CNRS en Savoie, sur leurs effets à long terme dans le domaine viticole.

    Enregistrements environnementaux

    pesticides,étude,cnrs,edytem,savoie,vigne,sols,ddtPour les scientifiques, les carottes de sédiments constituent de véritables enregistrements environnementaux précieux pour comprendre l'état des environnements passés. En effet, ces archives sédimentaires renseignent sur les climats ou sur le type de végétation du passé mais aussi, et c’est le cas dans cette étude, sur les épandages de pesticides dans les champs au fil du temps. Grâce à l'analyse de  prélèvements effectués dans les sols d'un lac, en Savoie, une équipe de 12 chercheurs français du CNRS conduite par le laboratoire Environnements, dynamiques et territoires de montagne (EDYTEM), a retrouvé les périodes d'utilisation d'une large variété de pesticides sur des décennies. Publiés le 13 octobre dernier, les résultats comportent une surprise de taille : le DDT, un insecticide banni en1972, a réapparu depuis les années 90...

    La mémoire infaillible du sol

    Pour analyser l'évolution de la présence des pesticides dans les sols et leur effet à long terme dans le domaine viticole, les chercheurs ont effectué des prélèvements en décembre 2011 au fond du lac de Saint-André à 10 km au sud de Chambéry. Trois carottes d'1 m de long ont permis de remonter un siècle en arrière, à une époque où les pesticides n'étaient pas encore utilisés dans les vignes cultivées sur le bassin versant. Cette rétro-analyse inédite a permis de retrouver les preuves de l'utilisation de la bouillie bordelaise pour lutter contre le mildiou dans les échantillons datant de la fin du 19e siècle. Des traces de captane (un fongicide) ont été identifiées à partir des années 60. Quant à l'atrazine, interdit en France depuis 2003 en raison de sa toxicité, il a été identifié dans les sédiments déposés dans les années 60 et 70. Au total, ce sont 12 pesticides (5 fongicides, 4 insecticides et 3 herbicides) qui ont été révélés et leurs périodes d'utilisation datées.

    Les herbicides et le labour intense accroissent l'érosion

    sabatier-pierre-w150xh180 (1).jpgParallèlement, les chercheurs ont aussi observé que les apports en sédiments dans le lac avaient doublé au début des années 70 et au début des années 90, indiquant une érosion plus importante des sols du bassin versant durant ces périodes. Des augmentations majeures concomitantes, selon eux, avec la généralisation de nouvelles pratiques agricoles. En cause, selon les chercheurs, "la mécanisation et l'apparition des premiers herbicides totaux dans les années 70 ou encore l'utilisation d'herbicides totaux à base de glyphosate dans les années 90." "En empêchant la croissance de l'herbe entre les rangées de vigne, les herbicides totaux, laissent le sol nu, exposé à la pluie et donc à l'érosion", explique Pierre Sabatier (photo ci-contre), auteur principal de l'étude et chercheur du CNRS à l'EDYTEM.

    L'érosion des sols "ressuscite" le DDT

    Mais ce qui a surtout surpris les scientifiques, c'est de retrouver à partir des années 90, des traces de DDT, un insecticide interdit en France depuis 1972. "Le DDT est une molécule très persistante dans l'environnement. Stocké dans les sols, nous pensons qu'il a été remobilisé par l'érosion plus importante induite par l’utilisation de ces herbicides totaux", souligne Pierre Sabatier. Une nouvelle preuve, s'il en fallait encore, de l'impact sur le long terme pour la planète de toutes les atteintes portées par les activités humaines à l'environnement.

    La bonne nouvelle, c'est que les chercheurs ont également pu observer une chute importante des apports en sédiments et des concentrations en pesticides dans le lac au cours des dernières années. Est-ce l'effet des récentes régulations françaises et européennes pour limiter l'utilisation des pesticides ? De nouvelles carottes seront à analyser pour confirmer cette tendance. A suivre...

    Cathy Lafon

    PLUS D'INFO

    • Lire l'étude sur les périodes d'utilisation des pesticides et leur lien avec l'érosion des sols : cliquer ICI
    • Le site du  laboratoire Environnements, dynamiques et territoires de la montagne (EDYTEM) - CNRS / Université de Savoie : cliquer ICI

    LIRE AUSSI

    • Les articles de Ma planète sur les pesticides: cliquer ICI
  • Insolite : la peluche du CNRS qui espionne les manchots sans les stresser

    manchots robots.jpg

    Le rover camouflé par le poussin de manchot empereur approche un adulte avec son poussin, qui tous deux tentent de communiquer par des vocalisations. Photo Frederique Olivier/John Downer Productions

    Un poussin manchot en peluche monté sur quatre roues au milieu d'une colonie de manchots ? Non vous ne rêvez pas et non, ce n'est pas un jouet téléguidé égaré sur la banquise. Il s'agit d'un véritable outil scientifique, appelé aussi rover, mis au point par des chercheurs français du CNRS, pour étudier ces animaux menacés sans les stresser inutilement.

    Comment ça marche ?

    Pour suivre la reproduction et la survie des manchots, les scientifiques doivent les marquer individuellement. L'anatomie de leurs pattes ne permettant pas le baguage, comme c’est le cas pour la plupart des autres oiseaux, la solution utilisée est celle du transpondeur - une « étiquette » électronique de moins d’1 gramme -  introduit avec un pistolet de type vaccination sous la peau. Les manchots étudiés sont donc porteurs d’une étiquette d’identification électronique lisible par un lecteur RFID, qui peut être manuel ou embarqué sur un robot télécommandé. Lorsque les manchots sont approchés par le robot, ils n’ont pas le niveau de stress élevé (caractérisé par une forte augmentation de la fréquence cardiaque et un comportement de fuite) observé en présence d’un humain. Cette méthode permet donc de collecter des données scientifiques de qualité, car non biaisées par la présence humaine comme viennent de le démontrer des chercheurs de l’Institut pluridisciplinaire Hubert Curien - IPHC (CNRS/Université de Strasbourg) et du Centre scientifique de Monaco, dans une étude conduite par le spécialiste des manchots Yvon le Maho, publiée sur le site de Nature Methods, le 2 novembre 2014.

    Pourquoi étudier les manchots ?

    L’un des grands enjeux scientifiques actuels est l’impact du changement climatique sur la biodiversité. Dans un contexte de développement durable, les chercheurs s’interroge notamment sur la façon dont les ressources marines vont être affectées par le réchauffement de manière à éviter également une surexploitation de ces ressources par l’homme. Or les manchots sont de bons indicateurs écologiques de l'état de santé des ressources marines de l'océan Austral : étudier leur reproduction et leur survie permet donc de mieux aux scientifiques connaître l'impact du changement climatique sur la biodiversité. 

    Un poussin robot admis à la crèche des manchots empereurs

    manchot robot crèche.jpgLes investigations ont été menées dans la colonie de manchots empereurs qui se trouve à proximité de la base française Dumont d’Urville, en Terre-Adélie. Des poussins en « tortue » ont même laissé le robot surmonté du faux poussin s’introduire dans leur crèche... (photo ci-contre).  Les rovers pourraient également être utilisés pour l'identification électronique de mammifères marins, comme les éléphants de mer, soulignent les chercheurs.

    A quand un ourson Paddington sur quatre roues pour étudier l'ours des Pyrénées françaises sans le stresser ?

    Cathy Lafon

    PLUS D'INFO

    • Lire la communication du  CNRS sur les robots poussins manchots  : cliquer ICI
    • Lire l'étude  :  "Rovers to minimize human disturbance in research on wild animals", Nature Methods, 2 novembre 2014 : cliquer ICI
    • La reproduction d’une colonie de manchots Adélie anéantie par de mauvaises conditions climatiques, CNRS (octobre 2014) : cliquer ICI
    • Le manchot empereur, une espèce gravement menacée par le changement climatique, CNRS (juillet 2014) : cliquer ICI 

    LIRE AUSSI

    • Les articles de Ma planète sur le réchauffement climatique : cliquer ICI
    • Les articles de Ma planète sur la biodiversité : cliquer ICI
    • Les articles de Ma planète sur les recherches et les découvertes du CNRS : cliquer ICI
  • Climat : la mousson asiatique dépend du niveau de CO2 dans l'atmosphère

    mousson.jpg

    Plus de 300 personnes sont mortes lors des pluies torrentielles de la mousson au Pakistan et en Inde, le dimanche 7 septembre 2014. Les habitants ont été piégés par la montée soudaine des eaux. Photo AFP

    Grâce à l’étude de fossiles birmans et de sédiments chinois, alliée à des modélisations paléoclimatiques, une équipe internationale composée principalement de chercheurs du CNRS, a découvert que le régime de mousson asiatique était déjà en place il y a 40 millions d’années, alors que les massifs tibétain et himalayen étaient bien moins élevés.

    La mousson et le CO2

    Ces travaux,  publiés dans la revue "Nature", le dimanche 14 septembre 2014, révèlent que la mousson asiatique a démarré bien plus tôt qu’on ne pensait, et surtout qu’elle est sensible au moins autant à la concentration atmosphérique globale de CO2 qu’au relief himalayen. Un résultat d'une importance capitale, compte tenu du niveau élevé des émissions de gaz à effet de serre produit par les activités humaines qui contribuent au réchauffement climatique de la planète.  

    Coquilles de gastéropode et dents de mammifères fossiles

    Jusqu’ici, l’origine de la mousson asiatique était attribuée à l’élévation du Tibet et de l’Himalaya, datée de 25 millions d’années. Ce phénomène climatique caractérisé par l'inversion saisonnière des vents et par d'importantes précipitations estivales est en effet amplifié par la chaîne himalayenne et le plateau tibétain. Mais trois faisceaux d’indices viennent bousculer ce consensus. Au pied des contreforts himalayens, en Birmanie, l’analyse de l’oxygène de coquilles de gastéropodes et de dents de mammifères fossiles, âgées de 41 à 34 millions d’années, a révélé que la mousson d’été était déjà très intense à cette époque. A 1.800 km au nord, de l’autre côté de la chaîne himalayenne, en Chine, la morphologie et la distribution de sédiments vieux de 40 millions d’années indiquent que soufflaient déjà des tempêtes de poussières caractéristiques de la mousson d’hiver. Enfin, des modélisations paléoclimatiques montrent que le fort taux de CO2 atmosphérique qui était alors d'origine naturelle (deux à quatre fois le taux actuel) a été la clé de la forte intensité des moussons d'alors, compensant la faible élévation des massifs.

    Selon les scientifiques, ces nouvelles données géologiques suggèrent, en accord avec les prédictions issues des derniers rapports du GIEC, que l'augmentation actuelle du CO2 dans l’atmosphère va probablement intensifier la mousson de manière significative. Pour les populations du continent indien soumises à ce régime climatique, ce n'est pas une bonne nouvelle. D'autant que le phénomène d'intensification a, peut-être, déjà commencé.

    Cathy Lafon

    LIRE AUSSI

    • Les articles de Ma planète sur le réchauffement climatique : cliquer ICI

    PLUS D'INFO

    • Pour lire l'étude : "Asian monsoons in a late Eocene greenhouse world", Nature, 14 septembre 2014  :  Cliquer ICI
    • Ces travaux ont été produits par des chercheurs de six laboratoires rattachés au CNRS, en collaboration avec les Pays-Bas, des Etats-Unis, du Royaume-Uni, de Belgique, de Chine et de Birmanie. Les six laboratoires français sont : l’Institut de paléoprimatologie, paléontologie humaine : évolution et paléoenvironnements (IPHEP, CNRS/Université de Poitiers), pour l’étude de terrain en Birmanie ; le Centre de recherches pétrographiques et géochimiques (CRPG, CNRS/Université de Lorraine) et le Laboratoire de géologie de Lyon : Terre, planètes et environnement (LGL-TPE, CNRS/Université Claude Bernard Lyon 1/ENS de Lyon) pour les analyses des échantillons ramenés de Birmanie ;  le Laboratoire des sciences du climat et de l'environnement (LSCE) pour la partie modélisation ; le Centre de recherche sur la paléobiodiversité et les paléoenvironnements (CR2P, CNRS/MNHN/UPMC) pour la reconstitution des paléoenvironnements en Birmanie ;  Géosciences Rennes (CNRS/Université Rennes 1) pour l’étude de terrain en Chine.