Le brouillard de la pollution à Paris, le 14 mars 2014. Photo archives AFP
L'année 2015 démarre mal pour l'environnement, au niveau européen. La Commission européenne, présidée par Jean-Claude Juncker, a déclaré vouloir concentrer son action sur les propositions de loi relançant l'emploi, la croissance et l'investissement, au détriment des actions en faveur de l'environnement. Qui pourtant, sont elles-même créatrices d'emplois et génératrices de croissance... Aussi, 83 projets de règlements et de directives hérités de la Commission Barroso, dont deux textes clés sur la qualité de l'air et l'économie circulaire, ont été retirés de l'ordre du jour européen cette année. Pendant que l'Europe prépare l'ouverture de ses champs aux OGM, pour 2016. Le point.
L'économie circulaire : réduire les déchets
Le projet législatif sur l'économie circulaire avait pour objectif de rendre le recyclage plus systématique et de renforcer les règles sur l'incinération et les décharges, afin d'atteindre d'ici à 2030, une réduction des déchets de 30%.
La qualité de l'air : éviter 58.000 décès prématurés
Présenté en décembre 2013, le texte sur la qualité de l'air concernait la révision de la directive de 1999 qui fixe les plafonds nationaux d'émissions pour les principales sources de pollution générées par l'industrie, les transports, l'énergie et l'agriculture. Il prévoyait des seuils d'émission plus stricts et étendait la liste des polluants concernés, notamment aux particules fines PM 2,5 (diamètre inférieur à 2,5 microns) particulièrement dangereuses pour la santé. L'objectif étant d'éviter des morts prématurées : selon les travaux de la Commission elle-même, 490.000 européens meurent prématurément de la pollution atmosphérique, et selon l'OMS, les PM 2,5 seraient responsables de 3,2 millions de décès prématurés dans le monde.
OGM : le cheval de Troie
L’accord de principe trouvé par l'Europe fin décembre sur l'introduction de culture d'organismes génétiquement modifiés (OGM), pourrait être soumis au vote du Parlement européen lors de la session plénière du 28 janvier 2015. La décision est attendue avec impatience par les grands groupes du secteur : quatre maïs OGM, dont les emblématiques MON810 de Monsanto et TC1507 du groupe Pioneer, ont reçu un avis favorable de l’EFSA, l’autorité pour la sécurité alimentaire, et attendent la publication de l’autorisation de culture. Quatre autres sont en attente. Les États auront alors un mois pour valider l'accord formellement. Trop tard pour semer en 2015, mais pile poil pour les semailles de 2016. La Commission européenne fait valoir que les États pourront interdire les semences sur tout ou partie de leur territoire et les premières cultures ne devraient concerner qu'un petit nombre de pays. Un arbre qui cache la forêt et José Bové n'est pas dupe: « Cette évolution sur le court terme permettra à des multinationales comme Monsanto d’utiliser les faiblesses juridiques et d’attaquer les interdictions nationales devant l’OMC, voire devant des tribunaux arbitraux si les accords bilatéraux de libre-échange comme le TTIP étaient finalisés », s'inquiète l'eurodéputé vert français . L'Europe ouvre bel et bien la porte aux OGM.
Incohérent
L'Europe ne relègue pas l'environnement aux oubliettes, mais les préoccupations écologistes passent clairement au second plan pour la nouvelle Commission qui, sortie des urnes en juin 2014, semble sensible à l'intense lobbying du patronat. Au grand dam des ONG, ministres de l'environnement et eurodéputés qui ont bataillé pour préserver les deux paquets législatifs qui correspondent aux attentes et aux besoins économiques des Européens : 79% des Européens souhaitent que l'Union agissent sur l'air, de 40 à 140 milliards d'euros de gains étaient attendus de la nouvelle directive air et 180.000 emplois pourraient être générés par l'économie circulaire.
OGM, qualité de l'air, recyclage et déchets... Après avoir été leader en 2014 dans la lutte contre le réchauffement climatique et le développement des énergies renouvelables, il serait dommage que l'Europe fasse machine arrière sur l'écologie en 2015, année cruciale pour l'avenir du climat et de la planète, avec le Sommet international qui doit avoir lieu à Paris en décembre. Et inquiétant pour l'avenir, car les avancées environnementales des Etats ne sont, la plupart du temps, que les transpositions nationales de directives européennes en la matière.
Cathy Lafon
►EN CHIFFRES
- Entre 59 à 189 milliards d'euros : c'est le coût sanitaire et environnemental de la pollution atmosphérique et des émissions de gaz à effet de serre générées par les 14.000 principaux sites industriels européens, selon un rapport pour l'Agence européenne pour l'environnement publié le 25 novembre 2014.
- Le MON810, seul OGM actuellement autorisé dans l’UE, n'est cultivé que dans trois États: 110.000 hectares en Espagne, 9.000 au Portugal et 3.000 en République tchèque. Dix-neuf pays européens se sont par ailleurs opposés à la demande de culture du TC1507.
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