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Eau - Page 100

  • Polémique sur la démoustication en Gironde (suite). Pour l'INRA : inquiétude légitime mais alarme infondée

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    Un beau spécimen de moustique tigre. Photo DR

    Les moustiques inquiètent les autorités sanitaires car ,au delà des désagréments pour les peaux sensibles, ils peuvent être vecteurs de maladies virales graves, telles que la dengue, le chikungunya, la fièvre jaune... L’arrivée en France et dans nos contrées du moustique tigre (Aedes albopictus), originaire d’Afrique de l’Est, en a rajouté une couche et incite à procéder à des démoustications sanitaires afin d'éradiquer les petites bêtes indésirables. Démoustications qui inquiètent parfois à leur tour les écologistes, pour leurs conséquences possibles sur la biodiversité locale, comme récemment en Gironde.

    La Sepanso,association de protection de l'environnement aquitaine vient ainsi de porter plainte auprès de la Commission européenne pour une démoustication effectuée dans le marais de Montferrand, à la demande de quatre communes de la Presqu’île, Ambès, Ambarès et Lagrave, Saint Louis de Montferrand et Saint Vincent de Paul. Selon l'association, telle qu'elle a été menée, cette opération sanitaire pourrait nuire à la biodiversité locale.

    moustiques,démoustication,prévention,lutte,gironde,montferrand,bactérie,btiLa crainte de la Sepanso : une bactérie exogène, menace pour la biodiversité locale

    Ma Planète a relayé, le samedi 12 avril, les motivations de la plainte des écologistes et leurs explications. Les opérations de démoustication par pulvérisation de BTi (Bacilius Thuringiensis, var. Israelensis) autorisées par le préfet dans le marais de Monferrand, concernent  douze sites Natura 2000 du département de la Gironde. Or, selon la Sepanso, au-delà des moustiques visés, la disparition des insectes et larves dans le marais de Monferrand pourrait perturber l'écosystème local et la la biodiversité d'un site naturel que le classement en zone Natura 2000 a, justement, pour objet de protéger.  Par ailleurs, toujours selon l'association écologiste, le  BTi, agent biologique, serait une bactérie exogène, qui pourrait renforcer le nombre des espaces invasives indésirables et nocives aux écosystèmes locaux. Pour la Sepanso, une démoustication mécanique ciblée aurait suffi.

    moustiques,démoustication,prévention,lutte,gironde,montferrand,virus,maladie,bactérie,btiUn tueur de moustique sélectif et bien de chez nous

    Laurent Lagadic, de l'unité d'Ecotoxicologie aquatique à l'INRA de Rennes (photo ci-contre) réagit aujourd'hui à l'article publié sur le blog Ma Planète et répond à la Sepanso.  Les inquiétudes exprimées par l'association écologique concernant des sites Natura 2000, sont légitimes, reconnaît le chercheur. Mais, selon lui, il convient d'en modérer la vision trop alarmiste. Et ce, principalement pour deux raisons. "Contrairement à tous les autres larvicides, le Bti est un agent biologique hautement sélectif et aussi étonnant que cela puisse paraître, à la dose recommandée pour la démoustication, il ne tue que les larves de moustiques et épargne les larves de chironomes (vers de vase) ", précise le scientifique, qui rectifie aussi : "le Bti ne vient pas de contrées éloignées où les écosystèmes sont différents des nôtres, mais il est bel et bien naturellement présent dans les sols des écosystèmes français". Il ne s'agit donc pas d'une espèce invasive et, à ce titre, il n'y a pas de risque à l'utiliser dans notre région.

    Une pratique sous haute surveillance

    Le chercheur de Rennes souligne aussi que "la démoustication est une pratique sous haute surveillance". Indépendamment des autorisations préfectorales, qui s'appuient sur les recommandations de l'Agence Régionale de Santé (ARS),  "les interventions de démoustication font l'objet d'un suivi des effets non intentionnels sur l'environnement, notamment sur les espèces non cibles d'invertébrés qui participent aux réseaux trophiques". Utilisé partout en France métropolitaine et DOM, dans la mesure où c'est actuellement le seul et unique larvicide autorisé par la réglementation, les résultats des études à long terme menées sur le terrain montrent qu'aux concentrations où il est recommandé pour être efficace contre les larves de moustiques, le Bti (sous la formulation VetoBac WG) n'affecte pas les larves d'autres insectes ou invertébrés, ni en terme d'abondance, ni du point de vue de leur diversité. Des résultats concordant avec ceux obtenus ailleurs en Europe - en Suède, par exemple - ou dans le monde - Etats-Unis, Australie, précise Laurent Lagadic.

    Ce suivi, réalisé par l'INRA, est en place depuis plusieurs années sur la façade atlantique, rappelle le scientifique de l'INRA.

    Cathy Lafon

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    CONTACTS

    • Sepanso : fédération régionale des associations de protection de la nature de la région Aquitaine, affiliée à France Nature Environnement (FNE). Sepanso gironde : 1 Rue de Tauzia, 33800 Bordeaux. Tel : 05 56 91 33 65. Courriel : sepanso22sepanso.org. Site internet : http://www.sepanso.org/gironde

    • Laurent Lagadic. UMR INRA - Agrocampus ESE (Ecologie et Santé des Ecosystèmes). Equipe Ecotoxicologie et Qualité des Milieux aquatiques, 65 Rue de Saint Brieuc, CS 84215,35042 Rennes Cedex. Courriel : Laurent.Lagadic@rennes.inra.fr

  • Réchauffement climatique: le Giec presse les gouvernements d'agir

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    Réchauffement climatique : le Giec met les Etats au pied du mur Photo archives Sud Ouest

    La planète se réchauffe à un rythme inédit et dangereux. Réduire les émissions de gaz à effet de serre est devenue une urgence absolue. Au-delà de ce double message, les experts du Giec ont exposé ce dimanche les scénarios pour y parvenir. S'il n'est pas encore trop tard pour contenir la hausse de la température en dessous de 2°C, la balle est plus que jamais dans le camp des Etats, qui ont désormais le dos au mur.

    "Un résumé pour décideurs"

    Réunis en conclave depuis le 7 avril dernier à Berlin, les scientifiques et délégations des 195 pays membres du Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (Giec) de l’ONU ont planché pour adopter un "résumé pour décideurs", qu'ils ont publié ce dimanche 13 avril. Une synthèse plus que précieuse, à l’heure où la communauté internationale s’apprête à entrer dans une période d’intenses négociations pour parvenir, à Paris fin 2015, à sceller un accord global et contraignant sur les réductions d’émissions de gaz à effet de serre (GES). Cette troisième publication du nouveau rapport du Giec s’attèle à l’atténuation, de l'impact des activités humaines sur le climat. Soit concrètement, comment faire pour  limiter les émissions de gaz à effet de serre.

    le treut.jpgObjectif : +2°C et pas plus

    La précédente évaluation du Giec remonte à 2007. Depuis l'ère pré-industrielle, la Terre s'est déjà réchauffée à une vitesse inédite (+0,8°C), en raison des activités humaines. Pour garder un confort de vie raisonnable sur la planète bleue et éviter des impacts catastrophiques dans de nombreuses régions du globe, l’objectif de la communauté internationale est de limiter le réchauffement à +2°C, par rapport à la période pré-industrielle, quand la trajectoire actuelle est de + 4°C vers 2100, rappelle le Giec.  "Pour ne pas dépasser les 2°C, il faut baisser très rapidement les émissions de GES : il faudrait en fait les diviser environ par 3 d’ici à 2050", explique le climatologue français Hervé Le Treut, contributeur au Giec (photo ci-dessus).

    ges  infographie.pngL'augmentation exponentielle des émissions de gaz à effet de serre

    En 2010,  les émissions de GES ont été dues à 35% à la production d’énergie, 24% à l’agriculture et la forêt, 21% à l’industrie, 14% aux transports et 6% au bâtiment. Et elles ne cessent de croître dans un monde qui consomme toujours plus de charbon et de pétrole. Le CO2 est de loin (76%) le principal gaz à effet de serre. Alors qu'on sait qu'il faut les réduire afin de préserver le climat et de lutter contre la pollution atmosphérique, entre 2000 et 2010, elles ont augmenté de 2,2%, soit plus vite qu’entre 1970 et 2000 (+1,3%). La Chine et les Etats-Unis sont les plus gros émetteurs. La tendance actuelle doit donc être absolument inversée et le temps presse pour agir. "Sans réduction des émissions avant 2030, il sera plus difficile de ne pas dépasser les 2°C et les options seront moindres", alertent les scientifiques.

    eoliennes offshore france.jpgComment réduire les émissions de gaz à effet de serre ?

    Les amateurs de scoops et de potions magiques seront déçus. Les voies explorées par les experts du climat sont archi-connues des observateurs de l'écosystème Terre et, plus largement, des habitants de la planète et de leurs gestionnaires. Le Giec, qui ne mène pas d'études, recense et évalue les recherches existantes. Outre un tournant vers une production d'énergie émettant moins de CO2, une meilleure efficacité énergétique des bâtiments, des processus industriels et des modes de transport est incontournable, comme la taxation du carbone, la gestion des terres agricoles et  le soutien aux énergies non fossiles… Le développement des méthodes de capture et de stockage du CO2, le plus important gaz à effet de serre, est aussi cité. Les investissements dans les énergies "bas carbone" vont devoir tripler, voire quadrupler entre 2010 et 2050. Dans les énergies "bas carbone", le Giec classe les renouvelables, le nucléaire et les énergies fossiles associées à une capture et un stockage du carbone, qui sont aujourd'hui à un stade expérimental. La réduction des subventions aux énergies fossiles est un autre levier possible, tout comme les actions de reforestation qui seront un facteur important pour absorber du CO2 présent dans l'atmosphère.

    rechauffement climatique secheresse.jpgPlus on attend pour agir, plus ce sera coûteux

    Il y a deux semaines, le Giec mettait en avant des risques de conflits dus à une compétition accrue pour les ressources et la vulnérabilité plus élevée des populations pauvres des pays en voie de développement. Au-delà de +2°C, les scientifiques estiment que l’adaptation sera beaucoup plus difficile et coûteuse et que des conséquences dramatiques ne pourront être évitées. A titre d’exemple, avec une hausse de 4 degrés, le niveau moyen des mers gagnerait près d’un mètre, ce qui submergerait de nombreuses îles et deltas et mettrait en danger les zones côtières de nombreux pays. Réduire les émissions de GES, permettra de limiter les impacts du réchauffement déjà en cours : baisse globale des rendements agricoles, mise en danger de certaines espèces, diminution de la ressource en eau,  hausse des dommages et des coûts sanitaires liés aux évènements extrêmes, migrations, etc.

    giec,rapport,réduction ges,co2,émissions,réchauffement climatique,prévention,réductionAppel à la mobilisation et à la solidarité internationale

    "Ce rapport est très clair sur le fait que nous sommes face à une question de volonté mondiale et non de capacité" à agir pour ne pas dépasser les 2°C, a réagi John Kerry, secrétaire d'Etat américain. Christina Figueres, responsable climat à l'ONU, a affirmé : "le monde peut encore lutter contre le changement climatique mais à la condition que les nations soient collectivement plus ambitieuses".

    "On ne négocie pas avec la nature"

    Le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon (photo ci-dessus), qui va organiser en septembre à New York un sommet des chefs d’Etat sur le climat, exhorte tous les pays à agir rapidement et vigoureusement" après la publication de ce rapport et "à faire tous les efforts nécessaires pour parvenir à un accord (...) ambitieux" en 2015. "On ne négocie pas avec la nature", conclut-il.

    Cathy Lafon

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  • En Antarctique, le mercure fait mourir les oiseaux

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    Un couple de skuas surveillant de près un pingouin pour lui voler ses oeufs. Photo Ice Stories

    La contamination au mercure des terres australes a des effets néfaste sur les populations d'oiseaux. C'est ce que révèlent pour la première fois les travaux de chercheurs du Centre d'études biologiques de Chizé et du laboratoire « Littoral, environnement et sociétés »  du CNRS, à l'Université de La Rochelle.

    cnrs,oiseau,pollution,mercure,pesticides,pcb,étude,pôle,antarctiqueLa pollution anthropique peut conduire au déclin des oiseaux

    En suivant des skuas en Terre Adélie et aux îles Kerguelen pendant 10 ans, les chercheurs ont montré que, lorsque ces oiseaux marins présentent des taux de mercure élevés dans leur sang, leur succès reproducteur diminue. C'est la première fois que des mesures toxicologiques sont couplées à une enquête démographique menée sur une période aussi longue dans les terres australes. Selon ces résultats, publiés dans la revue "Ecology" du mois d'avril 2014, les polluants produits par l'homme, qui s'accumulent au niveau des pôles, peuvent bel et bien mener à un déclin des populations d'oiseaux.

    cnrs,oiseau,pollution,mercure,pesticides,pcb,étude,pôle,antarctiqueComment s'exerce la pollution par le mercure ?

    Une partie du mercure issu des activités industrielles et domestiques (combustion d'hydrocarbures et de charbon), est balayée par les vents vers l'Arctique et l'Antarctique. Ce mercure produit par les activés humaines, s'ajoute à celui d'origine naturelle et rentre dans la chaîne alimentaire. Or ce métal lourd est un puissant perturbateur endocrinien, capable d'inhiber la production d'hormones nécessaires à la reproduction. En zone polaire, on savait que de nombreux oiseaux marins tels que les skuas accumulent cet élément toxique à des concentrations élevées dans leurs tissus. Cependant, les effets à long terme sur leurs effectifs n'étaient pas connus.

    cnrs,oiseau,pollution,mercure,pesticides,pcb,étude,pôle,antarctiqueUn suivi démographique sur dix ans

    Pour la première fois, les chercheurs ont réalisé un suivi démographique sur une période de dix ans sur deux espèces d'oiseaux marins : les skuas vivant sur les îles Kerguelen (zone subantarctique) et ceux peuplant la Terre Adélie (en Antarctique). Les skuas sont des oiseaux migrateurs qui se nourrissent essentiellement d'œufs et de poussins de manchots, ainsi que de poissons. Prédateurs redoutables qui vivent 25 ou 30 ans, ils accumulent du mercure dans leurs tissus.  Les chercheurs ont tout d'abord capturé une centaine de skuas antarctiques et subantarctiques. Après une prise de sang pour mesurer leur taux de mercure, ils les ont bagués et relâchés. Pendant dix ans, les chercheurs sont revenus sur leur site de ponte pour observer leur descendance, les skuas pouvant élever un ou deux poussins par an.

    Plus le taux de mercure est élevé, moins la reproduction est assurée

    Première constatation, les skuas subantarctiques présentent des concentrations de mercure trois fois plus élevées que celles de l'espèce antarctique. Les chercheurs ont montré chez les deux espèces que, plus le taux de mercure est élevé, moins les oiseaux ont des chances de se reproduire avec succès et en particulier d'élever leurs poussins. De façon inattendue, c'est chez l'espèce la moins contaminée, le skua antarctique, que les effets de ce métal lourd sont les plus prononcés. Il est possible qu'en Terre Adélie, les conditions environnementales plus sévères, couplées à la présence croissantes d'autres polluants (pesticides, PCB), amplifient l'impact de la contamination par le mercure.

    cnrs,oiseau,pollution,mercure,pesticides,pcb,étude,pôle,antarctiqueUne vraie menace pour la biodiversité

    L'Antarctique est l'une des parties du globe où la concentration de la pollution au mercure, due à l'activité humaine, est la plus importante. On se doutait que cela ne faisait pas du bien à la biodiversité. Maintenant, on en a la certitude : les résultats des chercheurs prouvent que les polluants qui s'accumulent dans les zones polaires constituent une véritable menace pour la biodiversité. Si la contamination au mercure continue d'augmenter, les populations de skuas pourraient à long terme décliner. Les chercheurs  ne s'intéressent pas qu'au mercure. Ils conduisent des études similaires pour mesurer les effets sur les populations d'oiseaux de polluants « classiques», tels que les pesticides et d'autres métaux lourds, ainsi que de molécules nouvelles comme les composés perfluorés qui s'accumulent également en Antarctique.

    Cathy Lafon

    PLUS D'INFO

    • Pour consulter l'étude : Demographic responses to mercury exposure in two closely-related Antarctic top predators. Goutte A., Bustamante P., Barbraud C., Delord K., Weimerskirch H., Chastel O. Ecology, avril 2014 : cliquer ICI

    Cette étude du CNRS a reçu le soutien logistique et financier de l'Institut polaire français Paul-Emile Victor (IPEV) et de l'Agence nationale de la recherche (ANR programme PolarTop).