Fukushima : 8 ans après, au Japon, la catastrophe nucléaire est toujours en cours
Une femme venue se recueillir au cimetière de Namie, dans la préfecture de Fukushima, lundi. Photo AFP
Vendredi 11 mars 2011, 14h46. La terre se met à trembler au Japon. La puissance du séisme, dans l'archipel habitué aux tremblement de terre, est exceptionnelle. Avec une magnitude de 9,1, il est le plus fort jamais enregistré dans le pays. Il provoque un tsunami géant qui ravage la région de Fukushima, sur la côte nord- est. Une vague monstrueuse emporte tout sur son passage. Mais le pire reste à venir.
Les vagues inondent la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi. Le système de refroidissement ne fonctionne plus, les réacteurs entrent en fusion et libèrent d'importants rejets radioactifs. 110.000 personnes sont évacuées dans une zone de 20 kilomètres autour de la centrale.
Le 12 mars 2011, la pire catastrophe nucléaire de l'histoire de l'humanité depuis Tchernobyl, en 1986, vient de commencer.
Hier, comme chaque année depuis huit ans à la date de ce funeste anniversaire, le Japon a organisé une cérémonie d'hommage aux victimes. Le bilan humain du séisme et du tsunami qui ont ravagé le Japon est encore difficile à réaliser. 18.430 personnes ont disparues, et seulement 15.897 corps ont été retrouvés. Selon le gouvernement nippon, la reconstruction progresse, mais pour des dizaines de milliers de personnes, les conditions de vie restent très difficiles.
Les riverains de Fukushima n'osent pas revenir dans les zones officiellement décontaminées
Près d'une décennie après l'accident nucléaire, en moyenne, 15% seulement des habitants sont revenus après la décontamination de leur quartier et l’autorisation des pouvoirs publics. À l’exception de la ville de Tamura qui a vu 80% de retour, d’autres agglomérations comme Kawauchi (28,5%) ou Naraha (31,8%) ont des taux bien plus faibles et dans des villes partiellement évacuées comme Tomokia et Namie, 4% seulement des habitants se sont réinstallés bien que les autorités assurent qu’il n’y a désormais plus de danger pour la santé. Les anciens reviennent, mais pas les jeunes. 52.000 personnes sont toujours privées de foyer, et vivent dans des habitations temporaires. Le gouvernement japonais assure, lui, qu'elles peuvent, sans risque, revenir vivre dans le secteur.
La zone de Fukushima est toujours radioactive
Mais la zone de Fukushima est toujours radioactive, comme le dénoncent les ONG, comme Greenpece et Human Rights, qui évoquent une violation des droits de l’homme. Greenpeace estime que dans certaines zones où l'ordre d'évacuation a été levé, "l'exposition aux radiations tout au long d'une vie peut largement excéder le niveau acceptable du point de vue de la santé publique."
Selon ces organismes, les personnes qui rentrent, tendent d’elles-mêmes à brider leur vie pour minimiser les risques : "Elles peuvent changer leur comportement, par exemple éviter de rester longtemps à l’extérieur", notent-elles dans un rapport. Divers rapporteurs et instances des Nations unies ont à plusieurs reprises critiqué la décision du gouvernement japonais d'élever à 20 millisieverts/an l’exposition acceptable et d’en faire le niveau de référence pour la levée des ordres d’évacuation, alors qu’en temps normal c’est 1 msV qui est retenu.
La situation des enfants est jugée très préoccupante par les ONG et l’ONU.En octobre, dans un communiqué, un expert des droits de l'Homme des Nations unies avait demandé au gouvernement "de cesser de faire revenir les enfants et femmes en âge de procréer dans les zones où les niveaux de radioactivité restent supérieurs à ceux considérés comme sûrs avant le désastre."
Un rapport de l'Institut français de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), publié ce lundi 11 mars, regrette que "la question des conséquences des radiations sur la santé soit rendue taboue parce qu'elle risque de diviser la population".
Bref, le Japon et la planète sont loin d'en avoir fini avec Fukushima.
Cathy Lafon avec l'AFP
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