Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

sécurite - Page 25

  • Nucléaire : le débat. Greenpeace publie sa propre contre-expertise

    sécurité,prévention,catastrophe nucléaire

    Photo aérienne du site de Fukushima (DR)

    A l'approche du premier anniversaire de la catastrophe de Fukushima, le 11 mars prochain, le débat sur le nucléaire continue de faire rage en France. Après l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN),  la Cour des Comptes, pour les coûts de la filière, et la commission "Energie 2050", au tour de Greenpeace de rendre sa propre copie sur la question, dans un rapport rendu public le lundi 20 février.

    On se doute que ce rapport, qui devait être publié initialement à la mi-janvier, ne comporte aucun élément qui puisse apporter le moindre souffle de vent à l'éolienne des pro-nucléaires. Mais Greenpeace n'entend pas se livrer à un nième réquisitoire contre l'atome. L'organisation environnementale veut alimenter le débat français sur la sécurité du nucléaire, en proposant une  "analyse critique des évaluations complémentaires de sûreté menées sur les installations nucléaires françaises après Fukushima".

    L'épais document technique de 178 pages, a été réalisé par deux experts indépendants, spécialistes du nucléaire : Arjun Makhijani, président de l'Institute for Energy and Environnental Resarch (IEER, organisation non gouvernementale américaine), et Yves Marignac, directeur de l'agence française d'information et d'études sur l'énergie Wise-Paris. Comme l'ASN et la Cour des comptes, ils se sont appuyés sur les dossiers remis en septembre 2011 par EDF et par Areva, à la suite des tests de résistance (les fameux "stress-tests") des installations nucléaires, demandés par le gouvernement français et par la Commission de Bruxelles.

    Le rapport passe plus particulièrement au crible les centrales de Gravelines (Nord), Flamanville (Manche) et Civaux (Vienne) – représentatives des différents "paliers" du parc électronucléaire (900, 1 300 et 1 500 mégawatts) –, ainsi que ceux de l'EPR en construction à Flamanville et des usines de retraitement de La Hague (Manche).

    En conclusion, pour Greenpeace, les 58 réacteurs français sont aussi fragiles que ceux de Fukushima.  Sur la méthode d’analyse employée par les exploitants, les experts indépendants sont dubitatifs. Ils reprochent aux évaluations d'être trop théoriques, de ne pas prendre suffisamment en compte le facteur humain ou le vieillissement des installations, et de comporter "trop de limites et de lacunes pour fonder des décisions définitives". Autrement dit, pour Greenpeace, les mesures de renforcement de la sûreté du parc nucléaire préconisées par l'ASN sont mal étayées.  Et elles ne permettent donc pas de parer à tout risque d'accident majeur. Ce qui, différemment exprimé, rejoint finalement la conclusion de l'ASN concernant l'impossibilité d'écarter tout risque d'accident sur les sites nucléaires. Greenpeace note quand même que les évaluations de sûreté menées par EDF et Areva "constituent un bon point de départ". Mais précise qu'elles doivent être prolongées par "des analyses approfondies et pluralistes".

    Cathy Lafon

    EN SAVOIR PLUS

    Lire l'intégralité du rapport de Greenpeace sur la sûreté nucléaire post-Fukushima en France : cliquer ICI

    ► Le rapport de l'ASN : cliquer ICI

    ► Le rapport de la Cour des comptes sur les coûts de la filière : cliquer ICI

    ► Le rapport "Energies 2050" : cliquer ICI

    ► Le site de Wise-Paris : cliquer ICI

    ► Le site de l'Institute for Energy and Environnental Resarch (IEER) : cliquer ICI

    LIRE AUSSI


     


  • Nucléaire : l'urgence du choix d'une nouvelle stratégie énergétique

     

    rapport,cour des comptes

    Centrale de Golfech (Tarn-et-Garonne)

    Le rapport de la Cour des comptes sur les coûts de la filière électronucléaire, publié le 31 janvier (www.ccomptes.fr), fait s'effondrer le mythe du nucléaire pas cher. Si les Sages de la rue Cambon ne relèvent pas de coûts cachés dans le nucléaire français, ils brisent un tabou. Modernisation et entretien des centrales, gestion des déchets radioactifs, futurs démantèlements : certaines estimations sont entâchées d'incertitudes, mais il est sûr que l'atome coûtera de plus en plus cher.

     49,50 € le mégawattheure nucléaire  (MWh) :  l'éolien est compétitif

    Ces derniers jours, tout a été dit ou presque, plutôt intelligemment d'ailleurs, sur les chiffres donnés dans les 400 pages du volumineux rapport présenté par Didier Migaud, premier président de la Cour des Comptes. En bons écologistes, prenons le temps de revenir sur l'essentiel pour essayer d'en tirer des conclusions "durables".

    • 228 milliards d'euros d'investissements et assimilés valeur 2010, c'est le montant de la note rondelette de la filière, si l'on prend en compte tous les coûts liés à l'atome (de la fabrication d'une centrale à son démantèlelement, en passant par le retraitement des déchets).
    • Les écologistes, qui affirmaient que le nucléaire coûtait plus cher que ce qui était affiché, peuvent crier victoire : la Cour leur donne en partie raison. Le coût courant économique du parc nucléaire, qui n'est pas celui retenu pour les tarifs, mais "permet de faire des comparaisons entre modes d'énergie", s'élève en effet à 49,50€ le MWh. Un chiffre plus élevé que ceux qui circulaient jusque là et, surtout, qui écorne sérieusement le mythe de la sacro-sainte compétitivité du nucléaire par rapport aux énergies renouvelables. Pour Michèle Rivasi, eurodéputée écologiste, la preuve est faite : si le prix du MWh est réévalué de 42 € à 50 € pour le parc existant, et qu'il double pour les EPR pour se situer entre 70 et 90 € : l'éolien est compétitif, contrairement aux arguments traditionnels des pro-nucléaires. D'autant qu'avec ce type d'énergie, le problème du stockage des déchets et du démantèlement des installations ne se pose pas, contrairement au nucléaire.

    Le coût réel du nucléaire sera encore plus élevé

    Démantèlement et gestion des déchets, coûts de renforcement de sécurité et de gestion de crise "post-Fukuhsima", facture de maintenance de réacteurs, Didier Migaud l'a souligné à plusieurs reprise en présentant le rapport, les factures vont s'envoler  : "Les devis en la matière ont généralement tendance à augmenter". D'autant que l'évolution des coûts est parfois mal anticipée par EDF, voire très floue. La Cour des comptes a d'ailleurs demandé des audits complémentaires sur l'impact du démantèlement des centrales et la gestion des déchets.

    • Pour la facture de maintenance des réacteurs, l'augmentation est une certitude : la Cour des Comptes estime que la facture annuelle liée à l'entretien des centrales passera de 1,5 milliards d'euros (2010) à 3,7 milliards d'euros en moyenne d'ici treize ans. Avec les travaux de sécurisation des réacteurs imposés par l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) à la suite de la catastrophe de Fukushima, le coût de production de l'électricité augmentera de 10 à 15%, selon Didier Migaud.  On est tenté de dire "au moins", car Michèle Rivasi et l'Institut de radioprotection et de sureté nucléaire (IRSN) pointent l'insuffisance de l'estimation de 10 milliards d'euros faite par EDF pour les installations de sécurisation : elle leur semble sous-évaluée. Le vieillissement du parc électro-nucléaire, si EDF choisit de prolonger leur durée de vie au delà de 40 ans, comme cela semble probable, ne fera qu'alourdir d'avantage la facture.
    • Pour le coût du démantèlement des réacteurs, c'est le grand flou. Pour les 58 réacteurs français, il est estimé par EDF à 18,4 milliards d'euros. Mais la Cour des comptes a refusé de valider ce montant, car elle l'estime peu fiable, faute de retour d'expérience réel en France, et au regard des chantiers de ce type déjà effectué dans le monde. En Grande-Bretagne, le coût du démantèlement des sites nucléaires est ainsi quinze fois plus élevé que l'estimation d'EDF (300 millions d'euros par réacteur)
    • Le stockage des déchets : autre zone d'incertitude. Le coût estimé du projet de centre de stockage en grande profondeur des déchets à vie longue est déjà passé en quelques années de 16 à 36 milliards d'euros...

    En cas d'accident majeur, les centrales ne sont pas bien assurées

    Paradoxalement, on en parle peu, comme si l'enjeu des vies humaines ne comptait pas. Or, c'est peut-être finalement aussi le coeur du problème économique : comment financer les indemnisations en cas d'accident ? On a tendance à l'oublier, mais les centrales nucléaires sont implantées dans des territoires peuplés d'êtres humains... En cas d'accident majeur, des vies humaines seront touchées en grand nombre. Il y aura des victimes à court, moyen et long terme, des activités économiques, agricoles et industrielles seront condamnées, des gens seront déplacés et devront être relogés. C'est ce que le Japon expérimente dans la douleur depuis Fukushima : avec un coût de la catastrophe estimé aujourd'hui à plus de 95 milliards d'euros, sans compter l'indemnisation des victimes, qui fait parler de 600 milliards d'euros. Or EDF avance 80 millions par accident, ce qui est dérisoire et conduirait l'Etat à financer l'essentiel des indemnisations. Corinne Lepage, ancienne ministre de l'Environnement  le constate "Si les centrales étaient correctement assurées, les montants seraient tels qu'on arrêterait immédiatement d'en construire". On a  là une véritable bombe financière à retardement : croisons les doigts pour qu'elle n'explose jamais en France. Mais qui peut en jurer ? Même l'ASN, nous le savons, ne s'y risque pas.

    Les comptes du nucléaire ne sont pas bons

    Faisons nos comptes. Nous avons donc une énergie nucléaire pas si bon marché que cela, pas beaucoup plus compétitive finalement qu'une énergie renouvelable comme l'éolien. A la différence de celle-ci, elle est potentiellement dangereuse pour la santé humaine et l'environnement, on ne la stoppe pas du jour au lendemain, elle produit des déchets également dangeureux qu'il faut savoir stocker et traiter : elle a et aura des coûts de plus en plus importants. Si l'on reste dans le modèle énergétique français actuel, à production et consommation électrique constante, "Il faudrait construire onze EPR d'ici la fin 2022", souligne Didier Migaud. Soit d'ici dix ans. On connaît les déboires du seul EPR en cours de construction en France  (Flamanville), dont le chantier s'enlise. Un tel effort est jugé "très peu probable voire impossible, notamment pour des considérations industrielles" par le premier président de la Cour des comptes.  Rajoutons aussi considératons financières. Et géographiques. Le territoire est déjà truffé de centrales nucléaires : où loger onze futurs EPR ?

    Faire durer les centrales au-delà de quarante ans, et après ?

    "Cela signifie qu'il est fait l'hypothèse soit d'une durée au-delà de quarante ans (...) soit d'une évolution de mix énergétique vers d'autres sources d'énergie, sans que ces orientations stratégiques aient fait l'objet d'une décision explicite", précise le rapport. "Compte tenu des délais en matière de politique énergétique", conclut-il "ne pas prendre de décision revient à faire le choix de faire durer le parc au-delà de quarante ans".  Car investir dans les énergies vertes et les économies d'énergie prend  aussi du temps. Sophia Majnoni de Greenpeace le regrette aussi : "Par leur inaction, les gouvernements successifs rendent quasi irréversible la prolongation de la durée de vie de nos centrales au-delà de quarante ans".

    Le choix de la raison : décider ensemble d'une nouvelle stratégie énergétique "durable" pour sortir de l'impasse

    Comment ne pas convenir que sortir de l'inaction en la matière est l'urgence absolue d'aujourd'hui pour préparer demain ? Dans cinquante ans, que se passera-t-il, si l'évolution vers d'autres sources d'énergie n'a pas été décidée et préparée aujourd'hui ?  Si nous ne changeons pas nos modes de vie et nos process industriels pour économiser l'énergie ? Pourquoi le modèle allemand, si séduisant pour nos représentants politiques dans tous les domaines économiques et financiers, devient-il farfelu quand il s'agit d'une sortie plannifiée du nucléaire ? Le Japon, lui, est entré dans l'ère post-nucléaire à marche forcée: depuis Fukushima, en moins d'un an, les Japonais ont réduit leur consommation d'électricité de 20 % et arrêtent peu à peu leurs réacteurs nucléaires. Une telle contrainte, c'est quand même pas terrible...

    "Durable". Le mot n'aura jamais autant de sens qu'appliqué à la stratégie énergétique sur laquelle  notre société doit débattre et s'entendre aujourd'hui, pour que nous ayons un avenir demain.

    Cathy Lafon

    EN SAVOIR PLUS

    Consulter le rapport de la Cour des comptes : Cliquer ICI

    "Des centrales appelées à vivre vieilles", Sud Ouest 1er février : Cliquer ICI

  • News fil vert

    sécuritéNucléaire : le Japon souhaite la présence permanente de l'AIEA à Fukushima

    Une équipe d'experts de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) a entrepris lundi 23 janvier de passer en revue les tests de résistance des réacteurs nucléaires japonais menés par le gouvernement, à la suite de la catastrophe de Fukushima.


    Une opinion japonaise désormais opposée à l'énergie nucléaire

    Dans le cadre de cette visite, le Japon a indiqué à l'AFP avoir demandé à l'Agence internationale de l'Energie atomique (AIEA) d'installer un bureau permanent dans la préfecture de Fukushima, pour procéder au suivi de l'accident atomique provoqué par le séisme et le tsunami du 11 mars. Tokyo relaie ainsi la demande pressante de la préfecture de Fukushima. L'opposition du public japonais à l'exploitation des sites nucléaires et à l'usage de ce type d'énérgie, s'est intensifiée après la catastrophe de Fukushima (11 mars 2011) qui a contaminé l'environnement d'une vaste région agricole, et forcé des dizaines de milliers d'habitants des environs à évacuer leur maison.

    Cinq réacteurs aujourd'hui en activité. Combien fin mai ?

    Sur les 54 réacteurs nucléaires que compte le Japon, seulement cinq sont encore en activité. Ils seront également stoppés pour entretien régulier d'ici au mois de mai. Ainsi, le vendredi 27 janvier, le réacteur Shimane 2 de la compagnie d'électricité Chugoku Electric Power, sera arrêté pour sa 17e session d'entretien régulier. Du fait de cet arrêt, Chugoku Electric sera la 3e compagnie régionale privée de centrale nucléaire après Shikoku Electric Power et Kyushu Electric Power. Nul ne sait quand les tranches déjà arrêtées pourront être remises en service, l'approbation des autorités locales (et non seulement nationales) étant requise. Or, elles sont aujourd'hui opposées à la reprise d'activité des réacteurs arrêtés.

    Quant aux dix experts de l'AIEA qui passent les résultats des tests de résistance des sites nucléaires japonais en revue, ils  présenteront leur évaluation le 31 janvier. Le jour où la Cour des comptes doit publier en France son rapport sur le coût de la filière nucléaire. Au Japon, la population japonaise semble avoir jugé que le coût du nucléaire était définitivement trop élevé.

    Cathy Lafon