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Justice - Page 23

  • OGM : l'Europe laisse-t-elle la liberté de choix aux Etats membres, ou leur impose-t-elle un marché de dupes ?

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    Pour José Bové, le règlement européen est en réalité une victoire en trompe l'oeil pour les écologistes. Photo DR 

    Les gouvernements européens ont donné leur accord politique, ce jeudi, à un compromis laissant le choix aux Etats membres d'autoriser ou d'interdire la culture des OGM sur leur territoire. Le texte doit maintenant obtenir le soutien du Parlement européen. Apparemment favorable aux anti-OGM, la subsidiarité pourrait en réalité servir la cause des multinationales qui fabriquent les semences transgéniques. Explications.

    mais transgénique opposants.jpgNeuf pays opposés aux OGM, dont la France, cinq favorables

    Sept OGM sont en attente d'une autorisation de culture dans l'UE, dont le maïs MON810 de Monsanto et le maïs TC1507 du groupe Pioneer. Tous ont obtenu le feu vert de l'Autorité européenne pour la sécurité des aliments (EFSA), mais le président de la Commission européenne José Manuel Barroso a préféré les retenir pour éviter l'affrontement avec les gouvernements qui n'en veulent pas. Aujourd'hui, dans l'Union européenne, le Portugal, l'Espagne, la République Tchèque, la Roumanie et la Slovaquie ont dit oui aux OGM et produisent le maïs MON 810. La France, l'Italie, l'Allemagne, le Luxembourg,  l'Autriche, la Hongrie, la Bulgarie,  la Grèce et la Pologne n'en veulent pas et ont pris des clauses de sauvegarde pour des motifs environnementaux et sanitaires, des procédures juridiques très fragiles. Le compromis approuvé jeudi à Luxembourg par les ministres de l'Environnement de 26 des 28 Etats membres lèverait le blocage actuel et donnerait la possibilité juridique aux différents Etats d'autoriser ou d'interdire la culture sur "tout ou partie de leur territoire".

    ségolène royal.jpgLa liberté de choisir ?

    Pour les uns, c'est un bon texte. Ainsi, Tonio Borg, le commissaire européen à la santé, chargé du dossier, souligne que si le nouveau Parlement l'avalise, "cela fera sauter un verrou qui paralyse le processus d'autorisation des OGM depuis 4 ans". "Le nouveau système garantit aux Etats la possibilité de choix, s'ils souhaitent cultiver ou non", a expliqué la ministre française de l'Environnement Ségolène Royal, qui s'est félicitée avec le ministre de l'agriculture, Stéphane Le Foll, de cette nouvelle réglementation sur les OGM, comme la ministre néerlandaise Wilma Mansveld, qui vante un nouveau système qui  "permet du sur mesure".

    Un marché de dupes ?

    Pour les autres, c'est une très mauvaise nouvelle. Certes, chacun pourrait interdire chez soi la culture des OGM et l'autorisation d'une culture transgénique resterait décidée au niveau européen, comme c'est le cas aujourd'hui. Mais, plutôt que garantir aux Etats membres la possibilité d'interdire sur leur sols les OGM, l'Europe laisse en réalité le champ libre aux producteurs de semences OGM chez ceux qui sont disposés à les cultiver, en proposant une nouvelle législation très attendue par les multinationales américaines. Ce qui met la puce à l'oreille des écologistes et n'augure rien de bon pour la planète.

    bové.jpgJosé Bové vent debout

    Pour l'eurodéputé écologiste français, cet accord qui cherche à lever les blocages sur les OGM au niveau de l'Union européenne, est une vraie fausse bonne solution.  José Bové craint au contraire  "une accélération de l'introduction d'OGM en Europe". D'abord, parce que "le temps d'expertise sera raccourci quand les industriels voudront imposer un OGM en Europe".  Ensuite, parce que, "une fois l'expertise faite et l'OGM accepté, les industriels rencontrent les gouvernements de chaque pays, ce qui n'était jamais arrivé jusqu'à présent (...) Si le gouvernement dit oui, très bien, il y aura des OGM et personne n'en discute au Parlement. S'il dit non, le gouvernement doit ensuite envoyer un courrier à Bruxelles", poursuit-il.  José Bové souligne encore que ce sont les pays qui refusent les OGM qui vont se retrouver confrontés individuellement à des procès devant l'Organisation mondiale du Commerce, et non plus l'Europe  : "donc on ne tiendra plus collectivement contre les OGM".

    corinne lepage.jpgUn "cadeau empoisonné" selon les ONG

    Le compromis auquel sont parvenus les Etats européens, laissant à chaque pays le choix d'autoriser ou pas la culture d'OGM, est "un cadeau empoisonné", a réagi jeudi l'ONG Les Amis de la Terre qui rejoint la position du député écolo. "La nouvelle loi censée en théorie donner aux Etats membres le droit d'interdire les OGM", écrit l'ONG dans un communiqué, est en fait "ouvrira les champs européens aux plantes génétiquement modifiées". L'ancienne député européenne française Corine Lepage a pour sa part dénoncé "un accord au rabais" qui "ne comporte aucune base juridique solide pour réellement interdire les OGM et confère un pouvoir exorbitant aux compagnies dans le processus de décision".

    Les citoyens européens ne sont pas entendus

    "Depuis plus de 15 ans, les citoyens européens refusent les OGM et ont réussi à pousser leurs gouvernements à agir dans ce sens", pointe Christian Berdot, des Amis de la terre France. Mais poursuit-il, avec cette loi, "si un Etat maintient son interdiction malgré le refus d'une entreprise de biotechnologie, sa situation juridique sera très fragile".

    "Le Parlement européen peut encore voter contre le texte", veut croire José Bové, qui rappelle que les députés européens ont rejeté en janvier dernier contre la demande d'autorisation du maïs transgénique Pioneer TC1507. Oui mais ça, c'était avant les élections européennes de mai dernier.

    Cathy Lafon

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  • OGM : 54 faucheurs de vigne relaxés en appel à Colmar

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    Manifestation d'anti-OGM devant le palais de Justice de Colmar le 28 septembre 2011, lors du procès des faucheurs accusés d'avoir détruit une parcelle de vigne transgénique. Photo archives AFP

    C'est une victoire judiciaire pour les militants anti-OGM. La Cour d’appel de Colmar a relaxé, ce mercredi 14 mai,  54 faucheurs d’OGM, jugés pour avoir détruit une parcelle de vigne transgénique expérimentale de l’Institut national de recherche agronomique (Inra) de Colmar en 2010.

    La Cour a estimé que l’arrêté ministériel autorisant ces OGM était « illégal » et qu’il n’y avait donc pas de délit de destruction d’une parcelle de culture d’OGM. Elle a cependant estimé que les prévenus avaient bien commis une « violation de domicile », mais les a dispensés de peine.


    Colmar : les faucheurs d'OGM portent plainte... par France3Alsace

    57.000 euros de dommages à l’INRA

    En première instance, en octobre 2011, la plupart d’entre eux avaient été condamnés par le tribunal correctionnel de Colmar à deux mois de prison avec sursis. Six d’entre eux, considérés comme récidivistes, avaient écopé d’une amende de 1.200 euros. Collectivement, les faucheurs avaient par ailleurs été condamnés à verser quelque 57.000 euros de dommages à l’INRA, somme dont ils se sont acquittés.

    Leur procès en appel devant la cour de Colmar ne portait pas sur ces dédommagements mais uniquement sur le volet pénal de l’affaire.

    Cathy Lafon

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  • Pesticides dans les vignes :une salariée obtient la reconnaissance de la "faute inexcusable de son employeur"

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    C'est une information publiée par "le Monde", le 11 avril dernier. Après sept ans de combat judiciaire, Sylvie S., salariée en Dordogne dans un domaine viticole et intoxiquée par une pulvérisation de pesticides, a obtenu la reconnaissance de la "faute inexcusable de son employeur".

    Une première

    La nouvelle risque de faire grand bruit dans les rangs de vignes du Sud-Ouest, et au-delà. Si les maladies dues à l'exposition aux pesticides sont de plus en plus souvent reconnues comme professionnelles, la reconnaissance de la faute inexcusable par l'employeur constitue en effet une première.

    vigne pesticides traitement.jpgEmpoisonnée par deux pesticides

    Les faits se sont produits en 2007. Employée par le château Monestier La Tour, qui produit des Bergerac rouges et blancs réputés, Sylvie S. travaille le 8 juin sur des vignes traitées la veille avec deux produits phytosanitaires du groupe BASF, le Cabrio Top et le Clameur, reconnus comme "irritants". Sans le savoir et sans même une paire de gants, Sylvie reçoit en plein visage de hautes doses de produits insecticides hautement dangereux. Après avoir été hospitalisée d'urgence à l'hôpital de Sainte-Foy, la salariée continue à souffrir par la suite de violents maux de têtes, de vertiges, de nausées et de grosses fatigues. Elle fait reconnaître qu'elle est victime d'un accident du travail en août 2007. Elle reste en arrêt de travail jusqu'au 25 mai 2010, date à laquelle la Mutuelle sociale agricole (MSA) la déclare "consolidée". Elle souffre cependant toujours de troubles importants et n'a jamais pu reprendre une activité professionnelle depuis 2007.

    Un espoir juridique pour tous les salariés victimes de pesticides

    Le tribunal des affaires sociales de Bordeaux (TASS) rejette une première fois, en février 2012, sa demande de reconnaissance de faute inexcusable de l'employeur, le jugement spécifiant que la cause à l'origine des troubles n'était pas démontrée. En 2013, le 31 octobre, la chambre sociale de la cour d'appel de Bordeaux infirme la décision et reconnait la faute inexcusable, s'appuyant sur le fait que la dangerosité des produits utilisés ne pouvait être ignorée des propriétaires du château, qui, en outre, n'avaient pas fourni de matériel de protection adapté. Ces derniers avaient décidé de se pourvoir en cassation.  Démarche qu'ils ont abandonné le 10 avril dernier : la responsabilité de l'employeur dans l'intoxication de la salariée viticole est donc reconnue et ouvre à Sylvie, dont la rente d'accident de travail s'élève à 107 euros mensuels, la possibilité de bénéficier d'une indemnisation complémentaire.

    En Gironde aussi

    marie lise bibeyran.jpgCette victoire juridique fait avancer la jurisprudence et constitue un encouragement pour tous les autres salariés victimes de pesticides qui ont engagé ou voudraient engager de telles procédures. Comme en Gironde, où Marie-Lys Bibeyran (photo ci-contre) dont le frère, Denis, est décédé  en 2009 d’une forme rare de cancer après avoir, sa vie durant, pulvérisé des produits chimiques dans les vignes, est persuadée du lien de cause à effet. Salariée viticole elle-même, elle a entamé des démarches auprès de la MSA de Gironde pour obtenir la reconnaissance post-mortem du cancer de son frère comme maladie professionnelle due aux phytosanitaires qu'il utilisait en tant qu'ouvrier agricole.

    Cathy Lafon

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    REPERES

    •  La France reste le premier utilisateur de pesticides en Europe avec 62.700 tonnes de substances actives vendues en 2011. Malgré le lancement du plan Ecophyto en 2008, et l’objectif affiché de réduction de 50% des pesticides en 10 ans ainsi que l’exclusion des substances les plus dangereuses, la consommation de pesticides a augmenté entre la période de 2009-2010 et la période 2010-2011 de 2,7%.
    •  780.000 hectares de vignobles français représentent 3,7 % de la surface agricole utile du pays, mais consomment environ 20 % des pesticides.
    • La Mutuelle Sociale Agricole estime pour sa part que seuls 5 % des cancers seraient liés aux pesticides