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  • L'Etat veut tuer plus de loups : les ONG et les Français ne sont pas tous d'accord

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    Le gouvernement veut augmenter le nombre autorisé d'abattages de loups en France en 2015-2016. Photo DR

    Le gouvernement veut relever son plafond de loups à abattre en 2015-2016, soit 36 individus contre 24 en 2014-2015, alors que les effectifs français sont estimés à 282 par l'Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS). Un geste en faveur des éleveurs, pour leur permettre de défendre leurs troupeaux, mais qui, au final, a peu de chances de les contenter. Ce qu'il y a de sûr, en revanche, c'est qu'il hérisse les associations environnementales et ne plait pas non plus vraiment aux Français, si l'on se fie aux résultats de la consultation publique effectuée sur ce projet par l'Etat, du 29 mai au 21 juin.

    La polémique entre les écologistes, les chasseurs et les éleveurs repart de plus belle

    chasse loup.jpgDans un communiqué, l'association environnementale FERUS voit dans cette décision des ministère de l'Ecologie et de l'Agriculture qui se partagent le "dossier loup", la volonté de "satisfaire les lobbies de l'élevage" tout en "officialisant la chasse au loup". Pour la saison 2015-2016, les chasseurs auront en effet officiellement la possibilité d’effectuer des tirs de prélèvements, toujours sous réserve d’un arrêté préfectoral, "à l’occasion de chasse à l’approche ou à l’affût d’espèces de grand gibier".

    "Contenter le monde de la chasse et les syndicats agricoles"

    "Alors que la population de loups est en baisse dans notre pays, le gouvernement doit tenir compte de la volonté des Français et arrêter de céder à la pression des lobbies agricoles et cynégétiques". CAP Loup

    Le hic, pour l'Etat, c'est que l'augmentation du nombre de loups abattus légalement n'est pas vraiment populaire. Les Français aiment-ils vraiment les loups ? En tout cas, plus de 5.700 personnes ont  répondu à la consultation publique sur le site du ministère de l'Ecologie concernant les deux arrêtés ministériels qui prévoient de porter à 36 ce nombre d'abattages. Une mobilisation qualifiée d'"exceptionnelle" par FERUS, pour une consultation publique, et qui se montre, si l'on en croit les commentaires sur internet, majoritairement opposée au projet. De quoi apporter de l'eau au moulin des associations pro-loup réunies sous l'étiquette CAP Loup. "Si l’État adoptait ces textes, il montrerait que cette consultation est une mascarade, tout comme le "Groupe national loup" auquel les associations de protection de la nature refusent de participer car il ne fait qu’enregistrer des décisions validées en amont pour contenter le monde de la chasse et les syndicats agricoles", poursuivent les défenseur de la faune sauvage.

    Le  difficile retour du loup en France, espèce protégée en Europe

    Espèce strictement protégée en Europe, le loup est classé "vulnérable" sur la Liste rouge des espèces menacées en France (MNHN, UICN). Le loup, comme l'ours, le lynx, l'élan, le tarpan et le bison, l'esturgeon, le phoque ou encore le saumon, fait partie des animaux sauvages qui, après avoir disparu de nos territoires, font aujourd'hui leur retour, plus ou moins timidement. S'il a fallu "importer" des ours de Slovénie dans nos montagnes Pyrénées, le retour du loup en France en 1992 sur notre territoire s'est opéré naturellement. Depuis, le loup, venu d'Italie où on lui adonné une chance de survie, doit faire face dans l'Hexagone, comme nulle part ailleurs, à une levée de boucliers incessante qui se complait à alimenter peurs et fantasmes.

    Changer les mentalités

    retour du sauvage.jpgComme l'explique avec bonheur et intelligence Pierre Athanaze dans son livre "Le retour du sauvage" (Buchet-Chastel, 2014), en France, la difficile cohabitation entre les animaux sauvages - et par voie de conséquence ceux qui les défendent - et les agriculteurs ou les éleveurs, vient de ce que, au pays de Descartes et des jardins "à la française", "le sauvage fait peur". Qu'il s'agisse des plantes ou des animaux. Pour ce forestier de métier, président de l'Association pour la protection des animaux sauvages (ASPAS), cela ne date pas d'hier et c'est culturel. Et changer les mentalités, cela ne se fait pas sur un claquement de doigt, mais cela s'encadre par la loi et cela s'organise par l'éducation.

    Les loups, population en baisse

    loup gers.jpgLe loup est bien un redoutable prédateur. Il s'est répandu dans une trentaine de départements. On en a même repéré un dans le Gers, à Troncens, en 2012 (photo Jean-François Langlois DR). Les passions s'exacerbent entre leveurs et écologistes. Mais, contrairement à l'idée reçue qui voudrait faire croire à une invasion de meutes de loups prêtes à sauter à la gorge de nos enfants, après avoir ravagé nos troupeaux de vaches, moutons, brebis et chèvres, pour la première fois depuis son retour naturel en France, la population de l'espèce est en baisse. Le suivi officiel de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) estime cette année à 282 le nombre de loups sur le territoire, contre 301 en 2014. Rappelons qu'il y a un peu plus de 60 millions de Français... La même étude évalue à 38% la probabilité que l’abattage de 36 loups voulu par l’État en 2015-2016 entraîne une nouvelle baisse de la population.

    Mieux aider les éleveurs à protéger les troupeaux

    loup.jpg"L’État français prend le risque de mettre en péril une espèce strictement protégée en Europe", déplore FERUS qui ne fait pas que critiquer, mais qui apporte des solutions. L'association qui ne nie pas la réalité des attaques du prédateur, réclame que l'on améliore la protection des troupeaux, comme cela se pratique dans d'autres pays européens, en aidant mieux techniquement les éleveurs à évoluer vers des pratiques adaptées, et en les incitant à le faire, en contrepartie des subventions qu’ils perçoivent. "Abattre les loups, légalement ou en braconnage, ne contribue pas à régler le problème des prédations. En revanche, cela affaiblit l'espèce", souligne l'association. Et sur ce point, nul ne pourra lui donner tort.

    Le retour du loup, "une chance pour les générations futures"

    Le paradoxe, c'est que le retour du sauvage, de la faune aux espaces naturels, est pourtant nécessaire pour résoudre bien des problèmes écologique actuels : érosion de la biodiversité, dérèglement climatique... Car dans la belle histoire de la vie sur la planète, tout est lié. Le retour du loup, qui, comme l'ours, joue son rôle dans la grande chaîne alimentaire, constitue, avec la restaurations d'espaces de biodiversité sauvages, "une chance et une nécessité pour l'équilibre de la planète et les générations futures", souligne Pierre Athanaze.

    "C'est une décision grotesque. Le loup est une espèce protégé." Madline Reynaud, ASPAS

    Les Français, majoritairement opposés à la destruction des loups, selon le sondage IFOP réalisé en 2013, ont-ils l'intuition de cette nécessité "naturelle" ? Pour leur part, fortes du soutien de l'opinion publique, les associations de CAP Loup demandent à l’État de "revoir sa copie et ne pas adopter un projet qui confirmerait de façon éclatante sa soumission aux lobbies, son mépris de la biodiversité et de la volonté des citoyens".

    Une chose est sûre : il nous faut apprendre de toute urgence à aimer la nature, à la protéger et à cohabiter avec elle, car nous ne sommes pas en guerre contre elle, mais nous ne vivons que grâce à elle... 

    Cathy Lafon

    PLUS D'INFO
    • Les associations du collectif CAP Loup sont Ferus, ASPAS, SFEPM.  Pour accéder au site de CAP Loup : cliquer ICI 

    LIRE AUSSI

    • "Le retour du sauvage", Pierre Athanaze, Buchet  Chastel, 2014, 12 €.
    • Les articles de Ma Planète sur les loups : cliquer ICI
    • Les articles de Ma Planète sur la biodiversité : cliquer ICI
  • L'Afrique du Sud a les abeilles : nouvel épisode dans la disparition planétaire des butineuses

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    Un apiculteur inspecte un nid d'abeilles suspecté d'être atteint par le germe de la loque américaine, le 18 mai 2015, près de Durban (Afrique du Sud). Photo AFP

    L'effondrement des abeilles gagne du terrain sur la planète. Après l’Europe et les Etats-Unis, l’Afrique du Sud est à son tour touchée par la disparition de ces insectes, indispensables pollinisateurs d’un grand nombre d’espèces végétales nécessaires à l’alimentation humaine.

    Le stress de l'homme, de l'apiculture intensive, des pesticides et de la pollution

    En Afrique du Sud, c'est la loque américaine, une bactérie ravageuse, qui est à l'origine d'une épidémie mortelle pour les ruches : une première dans l’histoire du pays. En l'occurrence, foin de "mystère" : pour les abeilles comme pour la majeure partie des hécatombes de cétacés, ce sont les activités humaines qui sont bel et bien à l'origine du malheur de la biodiversité animale. "C’est exactement la même chose qui se passe partout dans le monde", expliquait à l'AFP, le 5 juin dernier, Mike Allsopp, agronome spécialiste des abeilles à Stellenbosch, dans l’arrière-pays du Cap. Les abeilles attrapent des maladies parce qu’elles sont "stressées par les méthodes d’apiculture intensive, les pesticides et la pollution ", alors qu' "autrefois, elles étaient moins vulnérables", dit-il.  Elles souffrent " de l’homme, des pressions et du stress que les humains leur imposent ".

    La loque américaine, quésaco ?

    abeille,pollinisation,culture,pollen,disparition,afrique du sudLa loque américaine s’attaque au couvain (l’ensemble des larves), empêchant la reproduction des ouvrières. Lorsqu’une ruche est morte, des abeilles d’autres ruches s’y précipitent souvent pour en récolter le miel. C’est ce miel contaminé qu’elles rapportent dans leur propre ruche, propageant la maladie. L’Amérique du Nord et l’Europe sont confrontées à cette maladie depuis des siècles, mais les abeilles sud-africaines y avaient jusqu’ici résisté notamment grâce à la grande diversité des espèces d’abeilles locales, estiment les scientifiques. Un règlement imposant que tous les produits de la ruche importés en Afrique du Sud soient irradiés a également permis d’éviter la contamination pendant très longtemps.

    "Une bombe à retardement"

    abeilles durban apiculteur.jpgAu pays de Mandela, la maladie a frappé pour la première fois en 2009, laissant craindre une épidémie massive. Six ans plus tard, le cauchemar est devenu réalité. Les ruches s’éteignent l’une après l’autre. En 2015, la loque qui s’est répandue massivement ces cinq derniers mois (pendant l’été austral), a gagné dans l’ouest du pays un territoire de 200.000 km2 où quasiment tous les ruchers sont infectés. Les experts redoutent désormais que la maladie  ne se propage vers le nord, pour s’étendre au reste du continent africain, où l’apiculture artisanale fait vivre des centaines de milliers de personnes. "C’est une bombe à retardement. Toutes les ruches que j’ai examinées avec un cas de loque américaine sont mortes " indique encore Mike Allsopp, qui avoue ne pas voir "pourquoi elle s’arrêterait, à moins qu’une intervention humaine ne parvienne à la contrôler".

    70% des récoltes mondiales sont pollinisées par les abeilles

    Comme partout, les abeilles sud-africaines ne sont pas seulement des fournisseuses de miel. Elles sont surtout indispensables à la pollinisation de centaines d’espèces végétales. Selon l’organisation Greenpeace, qui a lancé une campagne pour sauver les insectes, quelque 70% des récoltes dans le monde, qui fournissent 90% de la nourriture consommée sur terre, sont pollinisées par les abeilles. L'apport des abeilles sauvages dans la pollinisation des cultures est évaluée à plus de 3.250 dollars (2.800 euros) par hectare et par an, selon une étude publiée le 17 juin dernier par la revue Nature Communications. Si cette étude montre aussi que seules 2% des espèces sauvages pollinisent 80% des cultures pollinisées par les abeilles dans le monde, leurs cousines jouent un rôle primordial pour l'écosystème et l'équilibre de la biodiversité. La contribution des ouvrières pollinisatrices au système alimentaire mondial s'évalue en milliards de dollars, soulignent les auteurs de l'étude, qui ont suivi près de 74.000 abeilles de près de 785 espèces, à travers le monde.


    Robobees : la nouvelle campagne de Greenpeace

    153 milliards d'euros

    Comme tous les insectes et les animaux acteurs de la biodiversité, les abeilles bossent dur, et à l'oeil. Or, nous avons trop souvent tendance à ne reconnaitre la valeur des choses, qu'à l'aune de ce qu'elles coûtent ou de ce qu'elles rapportent...  Pour montrer l'importance de la défense les abeilles, ce qui devrait pourtant aller de soi, les études se succèdent, afin de donner une valeur "monétaire" aux "service" rendus par nos petites ouvrières. L'apport financier de leur boulot à l'économie mondiale été estimé, en 2005, à 153 milliards d'euros. En Afrique du sud, la valeur du secteur agricole qui dépend de la pollinisation par les butineuses est estimée à 20 milliards de rands (1,5 milliard d’euros).

    Un plan de sauvetage gouvernemental

    Autant dire qu'il n'est pas question pour le pays de perdre ses abeilles. Le gouvernement fait savoir qu'il agit. "Nous avons une équipe qui travaille actuellement à un programme d’actions qui sera annoncé dans les prochaines semaines", assure Mooketsa Ramasodi, directeur au ministère de l’Agriculture. Le plan du gouvernement prévoit de limiter les autorisations d’ouvrir des ruches, d’informer largement sur la maladie et de créer des règles plus strictes de gestion des colonies, comme l’analyse régulière des larves pour identifier les malades avant qu’elles ne contaminent toute la ruche. L’usage d’antibiotiques pour protéger les ruches, qui pourrait faire plus de mal que de bien, ne sera retenu qu’en "tout dernier ressort", selon les autorités.

    Aujourd'hui, l'inquiétude des apiculteurs sud-africains est vive: ils craignent que ces mesures ne soient insuffisantes et, surtout, n'arrivent trop tard.

    Cathy Lafon avec l'AFP

    PLUS D'INFO

    • Pour lire l'étude "Ecology: Common wild bees provide the best economic returns", publiée dans Nature Communications le 17 juin 2015 :  cliquer ICI

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    • Les articles de Ma Planète sur les abeilles : cliquer ICI
    • Les articles de Ma Planète sur la biodiversité : cliquer ICI