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A l'échelle planétaire, la forêt disparaît moins vite. Canopée de la forêt amazonienne au lever du jour, au Brésil. Photo Peter van der Sleen, Rainfor
Au chapitre des bonnes nouvelles, l'écologie n'est pas la plus gâtée... A un peu plus de deux mois de la COP21, le sommet international sur le climat, on se réjouit donc d'apprendre que le rythme de la déforestation, enjeu majeur pour le climat, a fortement ralenti au niveau mondial. Et ce, même si la planète a perdu 129 millions d’hectares de forêts en 25 ans, soit l’équivalent de la superficie de l’Afrique du Sud. "Très encourageante" pour l’ONU, cette évolution a été révélée ce lundi par un rapport de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO)qui souligne que la disparition nette des forêts a diminué de 50% entre 1990 et 2015.
Le chef étoilé David Faure (à gauche), du restaurant niçois "Aphrodite", pose avec son assistant Geoffroy Szamburski devant une "inclusion de grillons en bubble au whisky". Photo archives AFP
"Les insectes nourriront-ils la planète ?" Le titre du livre de Jean-Baptiste de Panafieu, publié cette année aux éditons du Rouergue, pose la bonne question économique, sociétale et écologique du moment, celle qui fait le buzz partout dans le monde. Jusqu'en Gironde, oùl'association girondine Terre & Océan organise ce soir une conférence-débat, à l'Aquaforum de Bègles, sur le thème "Insectes comestibles", avec Sylvain Much, un passionné d'environnement, mordu d'insectes, auteur d'un livre éponyme.
La vraie fausse mauvaise réputation
Les insectes, ça pique, ça mord, ça grouille... Dans nos sociétés occidentales, l'idée de les consommer dérange et répugne. Et pourtant, depuis 2008, comme le souligne le petit livre de Jean-Baptiste de Panafieu, la FAO(l'organisation des Nations-Unies pour l'alimentation et l'agriculture), soutient le développement de la consommation des insectes en s'appuyant sur les exemples des nombreux pays où l'entomophagie (consommation d'insectes) est une pratique courante, parfois même très prisée pour ses qualités gustatives et gastronomiques. Sans compter que, si l'idée de manger des insectes nous choque, nous le faisons déjà sans nous en rendre compte : nous ingurgitons à notre insu 500 grammes d'insectes en moyenne par an, présents dans les fruits, les confitures, ou la farine du pain, des tartes et des gâteaux. Et puis les Français avalent bien déjà les cuisses de grenouilles ou les escargots sans tordre le nez...
Très prisés par 2 milliards d'humains
En Afrique, en Asie, en Amérique, en Australie... plus de 2 milliards d'êtres humains mangent près de 2.000 espèces d'insectes au quotidien. Sur les marchés thaïlandais, on trouve ainsi des étals d'insectes frits, comme sur les nôtres des crevettes ou des beignets de calamar. Mieux, les petites bêtes sont la plupart du temps croquées pour le plaisir, comme plat principal ou comme tapas et les consommateurs sont parfois prêts à les payer au prix fort. Ainsi au Mexique, où "des restaurants spécialisés dans la nourriture pré-hispanique propose aujourd'hui à leurs clients des insectes, comme les "escamoles", des "oeufs de fourmis" difficiles à récolter et très coûteux", raconte Jean-Baptiste de Panefieu. Un genre de caviar d'insectes, en somme.
L'insecte est écologiquement vertueux
L'organisation qui lutte contre la faim dans le monde cherche aussi à promouvoir l'utilisation des insectes en Occident, dans les pays industrialisés, car ils sont une source de protéine de qualité et leur production est plus respectueuse de l'environnement que ne l'est celle de la viande d'élevage. L'élevage des insectes est moins polluant que celui des vaches, cochons et autres poulets, car peu émetteur de gaz à effet de serre. Il ne faut que deux kilos d'aliments pour produire un kilo d'insectes, contre huit pour un kilo de boeuf. Enfin, les petites bêtes ont une teneur en protéines et minéraux plus élevée que la viande. Excellents pour la santé, les insectes font aussi de parfaites farines (goûtez la quiche à la farine de vers !), y compris pour l'alimentation animale.
Vous reprendrez bien un peu de grillon ?
L'un des premiers chefs à se lancer dans l'aventure en France est le chef étoilé David Faure dans son restaurant niçois Aphrodite, où il propose depuis le printemps dernier un menu "spécial insectes". Attention, ça réveille les papilles : foie gras poêlé et croustillant de grillon au sarrazin(photo ci-contre)... Cédric Auriol, le fondateur de Micronutris à Saint-Orens-de-Gameville (Haute-Garonne) se sert de la petite bête de la même manière que des amandes effilées, sur de la glace à la vanille, avec un peu de caramel. Première entreprise de production d'insectes à destination alimentaire en Europe, sa start-up veut se développer autant en Europe que sur le sol national, en répondant aux enjeux sociaux et environnementaux de l'alimentation de l'humanité. La ferme d'insectes en intérieur près de Toulouse emploie 6 salariés, produit grillons et vers à farine et envisage de mettre sur le marché, d'ici à la fin de l'année un produit grand public, une barre chocolatée à base de poudres d'insectes. Chocolatier à Mazamet, Guy Roux propose déjà une gamme de chocolats à base de grillons séchés et de vers de farine. Et depuis le 12 octobre, un bar parisien offre à ses clients cinq bouchées de sauterelles, vers et punaises... C'est sûr, les insectes arrivent dans nos assiettes !
En marge de la loi en Europe
Cette nouvelle filière d'alimentation humaine et animale à base d'insectes s'installe en profitant du flou de la réglementation européenne en la matière. En France, si la commercialisation d'insectes n'est pas clairement autorisée, elle n'est en tout cas pas interdite et reste tolérée. Aux pionniers de l'alimentation à base d'insectes de mettre les bouchées doubles pour développer cette nouvelle pratique culinaire avant que l'Europe ne mette son nez dans les élevages de criquets, punaises d'eau, sauterelles, vers et autres grillons, ou que les éleveurs bretons ne partent en croisade contre la concurrence potentielle de ce mini-bétail qui s'élève plus sainement que les cochons nourris en batteries, dont les fumiers engendrent la pollution par les nitrates, responsable des algues vertes.
Nourrir la planète
Revenons à nos moutons. Pardon, à nos insectes. "Mangez des pommes !", le slogan de campagne satirique imaginé en 1995 par les Guignols de l'info pour la marionnette de Jacques Chirac, alors candidat à l'élection présidentielle, pourrait bien devenir, en 2022, "Mangez des insectes !". En effet, s'il ne s'agit pas de remplacer totalement la viande par les insectes, il est intéressant de faire entrer ces animaux dans notre alimentation, pour l'avenir de la sécurité alimentaire de l'humanité. La planète compte déjà plus de 7 milliards d'être humains et 842 millions de personnes souffrent de la faim dans le monde. La Terre devrait abriter 10 à 11 milliards d'habitants d'ici à la fin du XXIe siècle. Comment parvenir à nourrir tout ce monde-là correctement, en procurant aux consommateurs les protéines animales dont ils sont de plus en plus friands ? Des chercheurs travaillent aujourd'hui à créer de la viande de synthèse (photo ci-dessus), à grands frais, avec des incertitudes sur les répercussions sur l'environnement et la santé humaine. Développer l'élevage d'insectes pour les consommer est une autre solution, a priori beaucoup plus écologique et économique.
Et en plus, ça peut être délicieux, comme Sylvain Much se propose de nous le faire découvrir ce soir. Car à Bègles, après les débats, des dégustations insolites sont prévues...
Conférence "Insectes comestibles", jeudi 24 octobre 2013 à 18 h 30, à l'Aquaforum. En bordure de Garonne, Centre commercial Rives d'Arcins à Bègles. En bus, ligne 11,34,36. En voiture, Rocade Sortie 20.
"Insectes comestibles", Sylvain Much, publié aux éditions Poil de Carotte, 2012.
"Les insectes nourriront-ils la planète ?", Jean-Baptiste de Panafieu, Editions du Rouergue, 2013. 15 €. L'auteur : professeur agrégé de sciences naturelles et Docteur en océanologie biologique, vulgarisateur scientifique hors pair, Jean-Baptiste réalise des films documentaires et a publié de nombreux ouvrages dont "Curiosités animales" et l'Essence du goût", aux Editions du Rouergue.
Mais non, Ma Planète n'avait pas oublié que nous étions aujourd'hui le 5 juin, Journée internationale de l'environnement, dont le thème cette année est l'économie verte ! D'autant moins que le Sommet de Rio doit s'ouvrir dans tout juste 15 jours...
Serres agricoles (Eysines, Communauté urbaine de Bordeaux, Gironde) DR CUB
Agriculteur au travail en périphérie de Ouagadougou (Burkina Faso) DR
"L'agriculture urbaine et périurbaine fournit déjà de la nourriture à environ 700 millions de citadins, soit le quart de la population urbaine mondiale. D'ici à 2030, la quasi totalité de la croissance de la population sera concentrée dans les zones urbaines des pays en développement. D'ici là, près de 60 % des habitants des pays en développement vivront dans les villes", indique un communiqué de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture publié aujourd'hui à Rome... "L'agriculture urbaine et périurbaine peut contribuer à améliorer la sécurité alimentaire de plusieurs façons. En cultivant des produits alimentaires à la maison ou à travers des coopératives, les ménages pauvres peuvent réduire la charge du coût d'achat de la nourriture, disposer d'une plus grande quantité d'aliments et réduire les intervalles saisonniers dans la production de primeurs".
Il y a fort à parier que l'organisation des villes et collectivités locales du monde (Cités et Gouvernements Locaux Unis (CGLU)), présente à Rio pour le prochain Sommet mondial de l'environnement Rio+20 (du 20 au 22 juin), soutiendra avec conviction ce point de vue par la voix de Ronan Dantec, sénateur de Loire-Atlantique et porte-parole mondial de CGLU pour les négociations sur le climat. Et ce, même si CGLU n'est pas encore reconnu comme une véritable organisation internationale.