Le chargement du container de MOX, mercredi 15 avril, à Cherbourg. Photo AFP
L'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a présenté le 16 avril son rapport sur «L'état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection en France en 2012 ».
Avec un bilan plutôt mitigé pour Areva, le transport des matières radioactives et la sûreté des réacteurs d'EDF. Et, plus original, une invitation très claire de la part de son président, Pierre-Franck Chevet, à entrer dans la transition énergétique, pour anticiper l'arrêt des centrales vieillissantes...
Présentation du Rapport 2012 de l'ASN
"Des déchets anciens stockés en vrac"
Hasard du calendrier, c'est le 16 avril, le jour où la France convoyait sous haute surveillance dix tonnes de Mox, un combustible nucléaire hautement radioactif, entre l'usine Areva de Beaumont-Hague et le port de Cherbourg, que l'ASN présentait son rapport. Selon l'Autorité, le nombre d'incidents liés au transport de matières radioactives a doublé en 2012. Quant à la gestion par Areva, sur son site de retraitement de La Hague, du planning de reprise des déchets anciens, l'ASN note qu'ils sont «stockés en vrac, sans conditionnement définitif». La gestion d'Areva, elle, a « dérivé ».
Le Mox d'Areva repart vers le Japon
Composé de plutonium et d'uranium, le Mox est issu du retraitement de déchets nucléaires opéré dans l'usine de la Hague (Manche). En dépit des manifestations des opposants écolo, Areva va recommencer à expédier par la mer cette cargaison à très haut risque vers le Japon, alors que seules deux centrales nucléaires ont redémarré depuis la catastrophe de Fukushima, en mars 2011.
"A la demande de la France"
Du Mox, donc. Un cadeau pour le moins embarrassant pour l'Empire du soleil levant. Mais comme n'importe quel quidam dont les poubelles ne seraient plus vidées par le service de collecte de sa commune depuis plusieurs mois, Areva est débordée par ses déchets "encombrants". Sauf que, en l'occurrence, les déchets de l'industrie nucléaire retraités et stockés à La Hague et qui n'ont pas pu être envoyés au Japon depuis deux ans, sont un zeste plus dangereux que ceux d'un Français moyen. Pas vraiment enthousiaste, le client d'Areva, la compagnie japonaise Kansai Electric Power, a précisé dans un communiqué que « l'envoi de combustible se faisait à la demande de la France, qui cherche à mettre fin à son stockage prolongé », mais que son « utilisation restait encore incertaine ». Prévu initialement en 2011, ce type de transport que contrôle l'ASN (photo ci-dessus) avait été retardé après la catastrophe de Fukushima.
Contrôle n°193 : le transport des substances... par ASN_Publications
"Une ingérence de la France inacceptable"
Ce qui fait dire à Sébastien Blavier, chargé de campagne énergie pour Greenpeace France que «l'ingérence de la France est inacceptable : elle livre au Japon du Mox pour le forcer à redémarrer ses réacteurs ». Par ailleurs, ce combustible dangereux devra être stocké pour un temps indéfini sur le site de la centrale. Alors, on peut se poser la question : est-ce bien raisonnable ?
"Un nombre trop important d'anomalies" dans les 58 réacteurs d''EDF
Pour revenir à nos moutons nucléaires français, le bilan de l'autorité de contrôle est « globalement assez satisfaisant ». Pas terrible pour un secteur comme celui de l'atome, qui doit se réclamer de l'excellence. Le satisfecit des sages est pour le moins mitigé, car l'ASN pointe, notamment, « un nombre trop important d'anomalies » dans les 58 réacteurs exploités par EDF. L'an passé, toutes activités nucléaires confondues, 1.822 « événements significatifs » ont été déclarés. Les chiffres sont en augmentation par rapport à 2011, pour les installations nucléaires de base (+ 7 %) comme pour les sources médicales et industrielles (+ 11 %).
"Anticiper la transition vers de nouveaux moyens de production d'électricité"
Évoquant le débat en cours sur la transition énergétique, le président de l’ASN, Pierre-Franck Chevet, a rappelé qu’une anomalie générique pourrait conduire l’ASN à exiger l’arrêt simultané de plusieurs réacteurs. « Il faut que le système électrique français dispose de marges pour faire face à cette situation plausible ». « Il faut aussi prendre en compte le fait que les centrales nucléaires ont une durée de vie limitée, dont la prévision est difficile et qui ne sera pas nécessairement la même pour tous les réacteurs. Il est donc important d’anticiper la transition vers de nouveaux moyens de production permettant de couvrir la demande d’électricité future » a ajouté le sage des sages du nucléaire.
"Impliquer les parties prenantes dans l'élaboration des décisions"
« La transparence est une obligation fondamentale d’une Autorité de sûreté. Cela ne suffit pas : il faut susciter les débats avec l’ensemble des parties prenantes et promouvoir leur implication dans l’élaboration des décisions » a-t-il conclu.
Cathy Lafon
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