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Consultation citoyenne sur les pesticides : quelle distance minimale entre les habitations et les zones d'épandage ?

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Le gouvernement ouvre une consultation publique sur les distances à respecter pour les épandages de phytosanitaires. Archives AFP

Pour mieux protéger la population des risques pour la santé liés aux pesticides, le gouvernement planche sur un projet de décret afin d'instaurer un espace entre les zones d'épandage et les habitations. Pour finaliser le texte, trois ministères, les ministères de la Santé, de la Transition écologique et de l'Agriculture ont ouvert ce lundi 9 septembre, une consultation publique citoyenne sur les distances minimales à respecter.

C'est bien ou pas ? Oui et non. Tout citoyen, syndicat agricole ou association de défense de l'environnement pourra donc s'exprimer sur une des questions les plus polémiques reliées à l'usage des pesticides chimiques, et donner son avis sur un projet de santé publique qui peut donc être amené à évoluer en fonction des résultats de la consultation. Une première en France et une rareté dans le monde. Sauf que les distances proposées par le gouvernement et la possibilité pour les départements de déroger au décret localement font dores et déjà polémique...  Cinq questions pour faire le point sur un débat qui fait rage entre les écologistes et les agriculteurs.

1. Quels sont les chiffres de la distance minimale soumis au débat ? 

Le gouvernement a proposé samedi dernier de fixer dans un décret la distance minimale entre les habitations et les zones d'épandage à 5 m pour les cultures dites basses (céréales) et à 10 m pour les cultures dites hautes, telles que les vignes ou l'arboriculture. Une première en France et en Europe. Le projet de décret prévoit toutefois également la "possibilité d'adapter ces distances minimales dans le cadre de chartes validées au niveau départemental", indique le ministère de l'Agriculture. Autrement dit, si une charte institue une zone de non traitement à 8 m ou au contraire à 50 m d'un bâtiment, c'est elle qui prévaudra sur le cadre national. Un peu comme pour la limitation à 80 km/h...   A ce jour, huit chartes ont été signées. 

2. Qu'en pensent les écolos ? 

"C'est la première fois qu'on va mettre en place des distances minimales et on est un des seuls pays à le faire", se félicite Elisabeth Borne, la ministre de la Transition écologique.C'est vrai : ce décret sera une première, en France et une rareté dans le monde. Certains, comme David Cormand, secrétaire national d'Europe Ecologie-Les Verts, reconnaissent qu'il s'agit d'une décision au "caractère historique", puisque "c'est la première fois que l'Etat admet qu'il y a un danger grave pour les gens" après l'épandage. 

"Anecdotique"

Mais les écolos sont loin d'être convaincus de l'efficacité de la mesure proposée... Les associations de défense de l'environnement et plusieurs responsables politiques se sont étonnés de la distance retenue par le gouvernement, qui paraît "anecdotique", comme l'a déclaré David Cormand pour EELV, sur BFMTV : "Le problème, c'est le côté anecdotique de la décision."  "Cinq ou dix mètres de distance ne représentent absolument pas une distance susceptible de réduire de manière significative l'exposition des riverains aux pesticides", estime ainsi François Veillerette, directeur de l'ONG Générations Futures.

"Je n'y crois pas, je pense que c'est un poisson d'avril. C'est insultant pour les gens qui se battent depuis si longtemps contre les pesticides", a réagi sur BFMTV le photographe Yann Arthus-Bertrand, fondateur et président de la fondation Good Planet. 

"Cinq à dix mètres comme ça, d'une manière un peu rigide, ça ne me semble pas forcément adapté aux réalités du terrain. (...) Ça paraît dérisoire 5 à 10 m", a également estimé sur franceinfo l'ancien ministre de la Transition écologique Nicolas Hulot. "On espère que c'est une blague ! Ou une erreur de frappe", a également réagi sur Twitter l'ancienne ministre Ségolène Royal.

3. Que répond le gouvernement ? 

Selon le gouvernement, les distances prévues dans le projet de décret suivent les préconisations scientifiques de l'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses). "Ces distances ne sortent pas d'un chapeau, elles ont été rendues publiques en juin par un comité d'experts scientifiques, répond Elisabeth Borne. "C'est un enjeu de santé publique, un enjeu trop important pour qu'on soit dans les polémiques et les caricatures. Or Générations Futures dénonce aujourd’hui les carences de cette évaluation. "Ce n’est pas l’Agence qui est en cause mais la méthodologie à la fois obsolète et limitée imposée par le document guide de l’EFSA de 2014 pour l’évaluation des pesticides suivie par l’Agence", explique l'ONG. C'est "sur des données vieilles de plus de 30 ans que l’évaluation de l’exposition a été faite et avec uniquement des distances testées de 2-3,5 et 10 mètres, très limitées". 

4. Qui est pour, alors ? 

Comme on peut s'y attendre, le gouvernement peut compter sur l'appui de la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA). Le principal syndicat de la profession agricole, a indiqué ce week-end qu'il privilégiait ces solutions locales pour encadrer les épandages de pesticides."Les écologistes et des politiques n'ont pas arrêté tout le week-end d'insulter et de mépriser les agriculteurs. Ce n'est du tout une mesurette, ceux qui parlent n'ont jamais vu un pulvérisateur pour certains d'entre eux. (...) Que ces gens-là arrêtent de délirer", estime Christiane Lambert, la présidente du syndicat agricole, sur franceinfo. "Les scientifiques n'ont jamais parlé de 150 m. 150 mètres, c'est retirer 15 à 20% de la surface agricole française. Qui peut penser que c'est possible ? Sauf ceux qui veulent une France sans pesticides." Là, elle n'a pas tout-à-fait tort... 

5. Quand le décret sera-t-il publié ? 

Les résultats de la consultation devraient être centralisés et dépouillés au ministère de la Transition écologique et solidaire. Ce dernier fera la synthèse en vue d'"un arbitrage définitif fin novembre", avant la publication du décret prévu pour le 1er janvier 2020, qui concerne aussi, au premier chef, la santé des agriculteurs. Pollinis en profite pour demander un retrait immédiat des pesticides SDHI, alors que la pétition de l'ONG, toujours en cours, vient de dépasser les 285.000 signatures uniques. C'est vrai ça, et les abeilles, victimes d'une hécatombe, qu'en pensent-elles ?  

Cathy Lafon

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