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Journée mondiale de l'océan : "Stoppons le torrent de plastique !"

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La Méditerranée deviendra-t-elle un mer de plastique  ? Le WWF lance l'alarme. Photo AFP

Le dernier rapport de WWF France, "Stoppons le torrent de plastique", publié le vendredi 7 juin, à la veille de la Journée mondiale de l'océan, n'y va pas par quatre chemins. Si le plastique est le fléau n°1 des océans et des mers du monde entier, en Méditerranée, c'est l'asphyxie. 34.000 bouteilles en plastique atterrissent chaque minute dans les eaux de la Grande bleue qui doit se coltiner chaque année quelque 600.000 tonnes de déchets en plastique, rejetés par les vingt-deux pays (1) du bassin méditerranéen.

Un véritable problème de santé publique

La mer Méditerranée qui compte plus d'un million de fragments de plastique au km² est en train de devenir un véritable piège de plastiques avec des niveaux records de micro-plastiques qui menacent les espèces marines et notre santé, avec le risque, à terme, de retrouver ces résidus dans notre organisme en mangeant ces poissons.

La mer Méditerranée "est la mer la plus fermée du monde", expliquait Isabelle Autissier, vendredi sur franceinfo. Pour la présidente de WWF France, "une goutte d'eau en Méditerranée quand elle va rentrer, elle va rester au moins un siècle. Donc, le fait qu'il y ait peu d'échanges favorise la concentration". Cette situation "montre, à une échelle réduite, l'effet dévastateur que le plastique peut avoir sur l'océan", estime la responsable de la branche française de l'ONG. "C'est un véritable problème de santé publique."

Parmi les très mauvais élèves, la France, troisième plus gros émetteur de CO2 avec 35,4 millions de tonnes issus de la production, du recyclage et de l'incinération des déchets en plastique en Méditerranée. L'ONG épingle la mauvaise gestion de l'Hexagone, tant en matière de la réduction de leur production que de leur recyclage. "Stoppons le torrent de plastique !", le titre choisi par l'ONG est explicite : au lendemain des élections européennes qui ont montré l'émergence de la préoccupation écologique des électeurs, il est temps que les responsables politiques se saisissent enfin du problème, pour prendre enfin des mesures adaptées à une situation qui prend le chemin d'une catastrophe écologique. 

Les chiffres du scandale

Première économie méditerranéenne, la France est aussi le plus gros producteur de déchets en plastique de la région. En 2016, l'Hexagone a produit 5,7 millions de tonnes de produits en plastique, soit environ 1,4% de la production mondiale. Cette production a généré 4,5 millions de tonnes de déchets, soit 66,6 kilogrammes de déchets en plastique par an et par personne. Plus de la moitié de ces déchets, 2,5 millions de tonnes, provient de l'industrie de l'emballage. Seuls 1,8 millions de tonnes de ces déchets en plastique sont recyclés, soit 22% du volume global. Le reste, récolté et non recyclé, finit incinéré (1,8 millions de tonnes) ou enfoui (1,6 millions de tonnes). Résultat : 380.000 tonnes des déchets plastique français atterrissent dans la nature, dont plus de 11.000 dans la Méditerranée. Près d'un quart de ces ordures reviendra dans l'année sur les côtes (21%) du Sud-Est de la France. On relève jusqu'à 20 grammes de plastique au mètre cube dans les eaux de la Grande bleue, dans les lieux densément peuplés et urbanisés comme la baie de Marseille, dont environ 1.000 kilomètres  carrés de la surface de l'eau sont couverts par les débris à la surface de l'eau, le delta du Rhône et de la ville de Nice... Un cocktail peu ragoûtant. Le long des côtes Corse, ce sont 112 kilomètres carrés de l'eau qui sont couverts par les déchets en plastique.

Mais pourquoi tant de pollution ?  

Les activités côtières pèsent naturellement pour 79% des rejets de plastiques dans la nature. Le WWF attribue la faute notamment à l'impact des activités touristiques et de loisirs et à une mauvaise gestion française des déchets et de leur collecte.

Au niveau national, le taux de recyclage de déchets en plastique tricolore est inférieur à celui de l'Espagne, de la Slovénie, de l'Italie ou encore d'Israël. Tous les départements français de la côte méditerranéenne présentent en outre des taux de collecte de déchets ménagers inférieurs à la moyenne nationale (36,5% en 2013). La Corse du Sud (15%) et le Var (22%) présentent notamment des taux de collecte particulièrement faibles. Le taux de mise en décharge, non recyclé, est notablement élevé dans certaines zones, comme à Marseille (40%) et en Corse (75%) et de nombreuses décharges à ciel ouvert sont présentes sur ces territoires, du fait de la saturation des décharges existantes.

73 millions d'euros par an

Et ça nous coûte cher ! L'ONG évalue à 73 millions d'euros par an le coût de l'impact de la pollution plastique, qui encrasse les moteurs des bateaux et les filets de pêche, endommage les installations portuaires quand elle n'obstrue pas les voies navigables. Elle entraîne aussi des coûts d'entretien et de nettoyage supplémentaires et une perte de gain pour la pêche. Et l'addition est lourde. L'impact des déchets en plastique sur les secteurs du tourisme, du commerce maritime et de la pêche est respectivement estimé à 40 millions d'euros, 21 millions d'euros et 12 millions d'euros. Au total, le coût est évalué à 73 millions d'euros par an pour la France, selon le rapport. Là non plus, le principe du pollueur-payeur ne s'applique pas. Le rapport du WWF souligne que, globalement, l'impact et les coûts de la pollution plastique marine ne sont pas supportés par les pollueurs mais par les communautés côtières, les municipalités locales et les industries directement touchées. Bref, par les impôts des citoyens.

Planète plastique

Pour l'ONG, qui émet des recommandations pour renforcer la lutte contre cette pollution plastique, il faut aller plus loin dans la responsabilité de l'industrie, améliorer significativement les taux de recyclage et réduire notre consommation d'objets en plastique. L'association No Plastic in my Sea qui vient d'organiser le #noplasticchallenge du 22 mai au 5 juin, enfonce le clou, en rappelant que la production de plastique ne cesse d’augmenter et que les prévisions sont particulièrement alarmantes. Le plastique est en effet toujours massivement utilisé dans l’emballage (dont les boissons en bouteille) : 40% de la production mondiale et 45% en France. Mais également dans le textile (71% du textile mondial est synthétique), l’automobile, le bâtiment, l’électronique et même l’agriculture. Et tous les ans la production de plastique mondiale augmente de près de 4%. Le World Economic Forum prévoit un triplement de la production dans les 30 ans à venir, si nous restons sur le même modèle, avec 1,124 milliard de tonnes de plastique produites par an en 2050, contre 350 millions aujourd'hui. 

Réduire à la source 

Si des améliorations sont attendues pour le recyclage du plastique, un effort majeur est nécessaire afin d’atteindre les objectifs de l’Union Européenne (50% de recyclage en 2025). Surtout si le volume de déchets continue d’augmenter. Le plastique ne se recyclant qu’un nombre limité de fois et tous les plastiques ne se recyclant pas, la solution passe aussi par l'interdiction du plastique à usage unique et la réduction de la pollution plastique à la source.  Autrement dit, produire moins de plastique et encourager les alternatives au tout-plastique est plus que jamais indispensable.

Cathy Lafon

(1) Dans l'étude du WWF,  la région méditerranéenne comprend les 22 pays suivants : Albanie, Algérie, Bosnie-Herzégovine, Chypre, Croatie, Egypte, Espagne, France, Gibraltar, Grèce, Israël, Italie, Liban, Libye, Malte, Maroc, Monaco, Monténégro, Slovénie, Syrie, Tunisie, Turquie.

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  • Les articles de Ma Planète sur la pollution des océans : cliquer ICI
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