Agriculture : oui, le bio peut faire mieux que le phyto !
Epandage de pesticide dans des champs près de Villefranche-de-Lauragais, dans le sud de la France, en mai 2016. Photo archives AFP
Glyphosate, pesticides, insecticides, engrais... A l'heure où la France bataille ferme autour de l'épineuse question de la sortie de l'usage des produits phytosanitaires chimiques, dont on connaît la dangerosité pour la santé et l'environnement, une étude scientifique à laquelle ont contribué des chercheurs de l'Inra (Institut national de recherche agronomique) et de l’Université de Rennes, est venue mettre cet été son (bon) grain de sel dans le débat en apporter de l'eau au moulin des anti-pesticides.
Dans une publication de la revue Nature Sustainability, en plein mois d'août, basée sur les résultats de 177 études internationales qui comparent les performances respectives des systèmes agricoles biologiques et conventionnels, au regard, d’une part, de leur potentiel de régulation naturelle des agresseurs, d’autre part, des niveaux d’infestation constatés, ces scientifiques révèlent que l'agriculture biologique (labellisée AB en France) est aussi efficace que l'agriculture conventionnelle pour lutter contre les maladies des cultures (champignons, bactéries...) et contre les ravageurs (rongeurs, insectes...). Voire même, concernant les bestioles nuisibles, plus efficace. Seule la lutte contre la prolifération des mauvaises herbes est moins efficiente en bio qu'en conventionnel. Mais elles attirent aussi toute une faune de petits animaux, bonne pour l'écosystème des champs, et qui lutte naturellement contre les nuisibles.
L'agriculture bio offre une voie pour réduire les pesticides de synthèse
« L’agriculture biologique offre une voie pour réduire l’utilisation de pesticides de synthèse sans pour autant augmenter les niveaux d’infestation par les ravageurs et les pathogènes ».
Bref, pour l'Inra, le recours aux pesticides de synthèse pourrait être réduit sans dommages pour les cultures... Selon les chercheurs, cette étude montre que « l’agriculture biologique offre une voie pour réduire l’utilisation de pesticides de synthèse sans pour autant augmenter les niveaux d’infestation par les ravageurs et les pathogènes ». Voilà une réponse en bonne et due forme aux questionnements de la France qui assure vouloir diminuer sa consommation de produits phytosanitaires, mais dit devoir attendre, pour ce faire, d'avoir des solutions fiables pour les agriculteurs conventionnels.
Pas de pertes de performances
Sans compter qu'une autre étude de l'Inra et Agrosolutions (Invivo), publiée le 27 février 2017 dans la revue scientifique "Nature plants", avait montré qu'une réduction de l'usage des pesticides par les agriculteurs n'entraînerait pas de perte de performances dans certaines conditions d'exploitation. Selon les chercheurs, elle est donc possible économiquement mais elle demande "un accompagnement des agriculteurs" et "l'organisation des filières". Voilà pour les interrogations complémentaires sur les rendements des cultures.
"Il faut repenser plus globalement les systèmes de culture."
"Il n'y a pas de solution miracle et l'Inra ne travaille pas pour chercher une molécule qui remplacerait une autre molécule, c'est vrai pour le glyphosate comme pour d'autres" produits phytosanitaires, soulignait déjà le 21 novembre 2017 Philippe Mauguin, le président de l'Inra, devant la Mission d'information sur l'utilisation des produits phytopharmaceutiques, présidée par Elisabeth Toutud-Picard (LREM). En revanche, il existe d'autres mesures pour accompagner les agriculteurs dans la réduction de leur dépendance à ces produits: "à court et moyen terme, un premier gain de réduction de produits phytosanitaires est possible en mobilisant les outils d'aide à la décision, et une agriculture de précision pour éviter la perte au moment de l'application si on cible la bonne dose sur la culture".
Mais, "si on veut aller plus loin au-delà de 10, 15 ou 20% de réduction", et atteindre "l'objectif fixé dans le plan "ecophyto" de réduire de 50% les produits phytosanitaires à l'horizon 2030, alors il faut repenser plus globalement les systèmes de culture", assurait-t-il, en expliquant : "La réponse sur laquelle on travaille c'est la combinaison de plusieurs approches : il faut à la fois faire des progrès sur la sélection génétique, en agronomie et sur le biocontrôle."
Pour sortir des phytosanitaires, il semblerait qu'on ait en réalité presque plus de réponses que de questions...
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