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Réchauffement climatique : onze familles portent plainte contre l'Europe pour "l'insuffisance" de sa politique climat

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Maurice Feschet, producteur de lavande du sud de la France, a saisi la justice européenne. Photo AFP /  Gérard Julien  

Sécheresse, fonte de glaciers, inondations... Une dizaine de familles de huit pays se disant déjà victimes déjà des effets du dérèglement climatique, jugent que l'Europe  n'en fait pas assez en la matière et ont déposé plainte contre l'UE pour sa politique climatique "insuffisante", afin d'obtenir que l'UE réduise plus ses émissions de CO2.

L'affaire"People's climate case"

Première du genre au niveau européen, et première également à soulever la responsabilité de l’Union d’agir pour l’ensemble des citoyens du monde, la plainte qui associe une trentaine de personnes de familles de l'UE, d'Afrique et du Pacifique, a été déposée ce mercredi par le Réseau Action Climat (RAC), qui réunit des ONG de toute l'Europe et porte l'affaire"People's climate case", devant la Cour européenne de Justice. 

Le recours adressé à la Cour de Justice de l’Union Européenne par ces citoyens demande à ce que l’objectif climat 2030 de l’Union Européenne - actuellement fixé à -40% d’émissions d’ici 2030 en comparaison avec 1990-  soit considéré comme inadéquat vis-à-vis des besoins réels pour prévenir des risques du changement climatique, et insuffisant pour protéger les droits fondamentaux liés à la vie, la santé, l’activité et la propriété. Les familles soulignent que l’Union Européenne a le devoir légal, interne comme en matière d’obligations internationales, de ne pas causer de préjudice à ses populations et de protéger leurs droits fondamentaux. Elles demandent à l’Union européenne de rehausser ses ambitions, et d’agir concrètement pour atteindre ces objectifs.

Voici quelques unes des histoires des plaignants qui, accompagnées par un grand nombre d’ONG, d’avocats et de scientifiques,  décrivent déjà des impacts dramatiques du réchauffement sur leurs moyens de subsistance, agricoles ou touristiques, et s'inquiètent pour l'avenir de leurs enfants et petits-enfants. Ils vivent en France, au Portugal, en Allemagne, en Italie, en Roumanie, au Kenya, dans à Fidji et en Scandinavie. 

En France : lavande, gel tardif et sécheresse

"Ces 15 dernières années il y a des aléas climatiques qu'on ne voyait jamais", explique  Maurice Feschet, 72 ans, dont le fils Renaud a repris l'exploitation familiale de lavande à Grignan, dans la Drôme provençale, en France.

"Pour donner une idée, de 2009 à 2016, mon fils a perdu quasiment 44% de son revenu par rapport aux aléas climatiques. 44% en 6 ans : cela représente nos pertes réelles de récoltes en Provence à cause des impacts du changement climatique qui nous frappent de plus en plus durement. Sur trois ans, il y a eu une sécheresse, l'année d'après des inondations puis des gels de printemps. Il y a urgence à reconsidérer les principes de la démocratie. L’UE doit maintenant écouter ses citoyens qui sont impactés par le changement climatique et appliquer les mesures nécessaires afin de les protéger", poursuit le paysan retraité qui se bat aussi pour son petit-fils Gabriel, 3 ans. "Mon fils se pose la question de savoir s'il pourra finir sa carrière et le petit-fils, n'en parlons pas...".

Au Portugal : incendies de forêts...

Armando Carvalho a vu ses quelque 12 hectares de forêt dans la région de Santa Comba Dao, dans le centre du Portugal, détruits par le feu l'an dernier.

"Ce qui s'est produit en octobre 2017 est une situation extraordinaire. Or ces situations extraordinaires tendent à devenir normales. Elles montrent clairement les conséquences que peuvent avoir les changements climatiques sur la sécurité des biens et des citoyens dans l'espace européen".

... et abeilles perturbées

"Aujourd'hui, nous n'avons plus quatre saisons. Nous avons juste l'hiver et l'été, ce qui perturbe le travail des abeilles qui ont du mal à s'adapter aux variations climatiques. La baisse de production de miel a entraîné une baisse des revenus de la famille", raconte Ildebrando Conceição, apiculteur près de Tomar, dans le centre du Portugal.

En Scandinavie : nourrir les rennes

"L'hiver, pluie et neige peuvent alterner et former une couche de glace au sol qui empêche les rennes de gratter et d'atteindre le lichen dont ils se nourrissent. Les éleveurs de rennes sont alors obligés de leur donner du fourrage (...). La plupart des éleveurs de rennes connaissent les mêmes problèmes, ils ne peuvent pas se projeter dans l'avenir". Sanna Vannar, présidente de Sáminuorra, association qui représente les jeunes Samis en Suède

Dans le nord de la Scandinavie, le mode de vie traditionnel du peuple autochtone des Samis repose sur l'élevage des rennes, qui mangent lichens et mousse trouvés sous la neige. Mais "les changements de saison ne sont plus aussi marqués", raconte Sanna Vannar.

En Roumanie: élevage de montagne

"Il n'y a plus de printemps ni d'automne, après l'été, on entre directement en hiver. Et puis il n'y a plus d'eau. Avec mon troupeau, je dois monter à une altitude de plus en plus élevée", témoigne Petru Vlad.

Chaque année en mai, sa famille et lui montent leur centaine de moutons et 17 vaches dans la montagne roumaine pour passer tout l'été. "Là, je suis à 700 mètres d'altitude mais s'il ne pleut pas bientôt, je vais devoir monter encore plus haut. La végétation aussi a changé, il n'y a plus que de l'herbe avec des racines dures, qui résistent mieux à la sécheresse. Toute ma vie j'ai été berger, j'ai commencé quand j'étais enfant. Mais avant c'était différent, il pleuvait beaucoup plus", poursuit-t-il.

En Italie : escalade sur glace et agriculture

Dans dans le parc national du Grand Paradis dans Alpes italiennes, la famille Elter gère un petit gîte, attirant les touristes grâce à l'escalade sur glace. Mais l'activité devient dangereuse avec la baisse des températures.

"La fonte des glaciers, réserve d'eau douce et notre seul revenu pendant la saison hivernale, ne touche pas que nous. Avec la hausse des températures, cela cause aussi beaucoup de dommages à l'agriculture en aval", explique la famille Elter sur le site internet du "People's climate case".

Au Kenya : extrême chaleur

"L'eau manque pour l'élevage et pour boire. Mais le plus important, c'est que la santé de mes enfants est en danger. Ils souffrent à cause des vagues de chaleur extrême que nous subissons depuis plusieurs années", raconte Roba Guyo, qui vit avec sa femme et ses cinq enfants dans un village du nord du Kenya.

Cathy Lafon avec l'AFP

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