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Notre-Dame-des-Landes : vers une solution adaptée aux enjeux climatiques et aux besoins du trafic aérien ?

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Notre-Dame-des-Landes : le rapport des médiateurs fait la part belle à la solution alternative de la modernisation de l'aéroport existant de Nantes-Atlantique. Photo AFP

Le feuilleton du dossier d'un futur aéroport à Notre-Dame-des-Landes qui dure depuis 50 ans va enfin trouver son épilogue, en janvier 2018. Comme prévu, le rapport rendu ce mercredi à Matignon par les médiateurs analyse en profondeur les avantages et les inconvénients de deux options : la construction d'une nouvelle infrastructure ou le réaménagement des infrastructures actuelles de Nantes Atlantique, situé à 10 km de la ville de Nantes. Et non plus d'une seule : Notre-Dame-des-Landes, dans la dimension du projet de transfert initial, ou bien réduit, comme en avait semé l'idée Ségolène Royal, l'ancienne ministre de l'Ecologie.

Un éclairage «impartial et neutre»

Certes, le rapport ne tranche rien. Mais telle n'a jamais été la mission des trois experts indépendants nommés par Edouard Philippe en juin dernier. L'exécutif attendait des médiateurs un éclairage «impartial et neutre», avant de prendre une décision qui ne pourra pas plaire à tous, sur un sujet qui déchaîne les passions au carrefour de l'aménagement du territoire, du transport et de l'environnement. C'est chose faite. Il revient désormais au gouvernement, sous l'égide du chef de l'Etat, de prendre désormais sa décision politique. Comme il se doit, a-t-on envie de dire...

Une décision politique définitive en janvier

aéroport notre-dame-des-landes,nantes,nddl,rapport,médiateurs,expertsPour connaître l'ultime dénouement du  « drame » de Notre-Dame-des-Landes, il n'y a donc plus que quelques semaines à attendre. Edouard Philippe, accompagné du ministre de la Transition écologique et solidaire Nicolas Hulot et de la ministre des Transports Elisabeth Borne l'a rappelé ce mercredi (photo AFP) : la décision, ferme et définitive, sera prise «d'ici à la fin du mois de janvier».  Elle sera «claire et assumée», et devra aussi permettre «de garantir le retour à la normale, notamment s'agissant des questions relatives à l'ordre public». Comprenez la question de l'occupation de la zone de Notre-Dame-des-Landes par les opposants au projet, les zadistes et les exploitants agricoles qui ont refusé jusqu'à présent de partir.

«Nouvelles expertises» et nouveaux éléments

Après un peu plus de six mois de mission et 200 auditions, Gérard Feldzer, ancien pilote de ligne et proche du ministre de la Transition écologique Nicolas Hulot, Michel Badré, ingénieur membre du Conseil économique, social et environnemental (CESE), et la préfète Anne Boquet, ont livré à Matignon un rapport d'une soixantaine de pages qui évoque de «nouvelles expertises», apportant de nouveaux éléments. Un travail indépendant qui aurait dû être mené depuis longtemps, dont la qualité a été saluée par le premier ministre.  «Là où jusqu'à présent le raisonnement qui était privilégié consistait à se poser la question s'il fallait faire Notre-Dame-des-Landes ou rien, le rapport nous invite à réfléchir sur un choix qui se formaliserait plutôt de la façon suivante: Notre-Dame-des-Landes ou un réaménagement de l'aéroport de Nantes-Atlantique», a-t-il souligné. 

«La cohérence avec tous nos choix environnementaux au niveau national, européen et mondial, sera un des éléments de notre choix». Emmanuel Macron

Quelle que soit la décision finale, a assuré de son côté le président de la République au quotidien "Le Monde" dans une interview publiée le 12 décembre 2017, "la cohérence avec tous nos choix environnementaux au niveau national, européen et mondial, sera un des éléments de notre choix".  Cet indicateur ajouté à certains éléments de la teneur du rapport semble indiquer que le vent pourrait bien être en train de tourner en faveur des opposants au  déménagement. Comment le chef de l'Etat qui se positionne en leader vert mondial pro-climat pourrait-il décider de bétonner le bocage nantais, une zone naturelle humide à préserver et un territoire agricole à revitaliser, pour favoriser un mode de déplacement considéré comme le plus polluant et le plus émetteur en gaz à effet de serre, alors qu'il existe une alternative dimensionnée pour permettre à l'activité de l'aéroport existant de se développer ? D'autant que le travail rendu par les experts met sérieusement du plomb dans l'aile à l'option du déménagement sur trois  questions majeures qui font polémique entre pro et anti-NDDL.

1. Le coût : il est beaucoup moins cher de moderniser l'existant

Etudiant en profondeur cette fois-ci les coûts des deux options, pour l'Etat et les collectivités, la comparaison faite dans le rapport penche en faveur de l'option de réaménagement de Nantes-Atlantique. Selon les données fournies par les médiateurs, le réaménagement coûterait 330 million d'euros de moins que la construction d'un nouvel équipement. Certes, reconnaissent-ils, sans avoir le détail du dédommagement que l'Etat devra accorder à Vinci. Jamais chiffrée par l'Etat et le concessionnaire il est évaluée à une somme comprise entre 150 et 200 millions d'euros par les opposants. Mais Vinci étant déjà gestionnaire de l'aéroport actuel, très rentable, l'indemnisation peut vraisemblablement se négocier et ne suffit de toute façon pas à faire pencher la balance de l'autre côté.

Le transfert à Notre-Dame-des-Landes est évalué à 730 millions d'euros. Dont 160 pour la desserte en tram-train. La rénovation de l'aéroport actuel qui nécessiterait une fermeture de sa piste pendant neuf semaines environ pour la réalisation des travaux, coûterait elle, entre 365 et 460 millions d'euros - rénovation de l'aérogare comprise. Soit nettement moins que le chiffrage annoncé jusqu'ici par la Direction générale de l'aviation civile (DGAC) en 2013 (825 millions), mais bien plus que celui avancé par les opposants au déménagement (175 millions d'euros).

Travaillant sur la base d'un trafic de neuf millions de passagers à l'horizon 2040, la mission préconise dans son rapport, «dans l'hypothèse où le choix gouvernemental conduirait à un réaménagement de Nantes-Atlantique répondant aux besoins de mobilité de court et moyen terme», de «garder la maîtrise foncière des terrains acquis sur le site de Notre-Dame-des-Landes» pour laisser «la liberté de choix (...) à nos successeurs».

2. L'impact écologique : le réaménagement est meilleur pour l'environnement

Maîtrise de l'étalement urbain, valorisation des terres agricoles dans le contexte de l'artificialisation galopante des surfaces agricoles, et préservation de la biodiversité,faune et flore, dans une zone humide qui joue le rôle de bassin-versant : pour toutes les questions environnementales soulevées par les opposants au projet de Notre-Dame-des-Landes, l'évaluation penche nettement en faveur du réaménagement de l'aéroport actuel. Le rapport souligne notamment la sous-évaluation des impacts majeurs écologiques du projet, et met en garde sur la faisabilité des compensations environnementales. En revanche, les nuisances sonores pour les riverains de l'actuel aéroport sont réelles et impactent plus d'habitants que ne le ferait une nouvelle infrastructure en plein bocage.

3. Quid du déni de démocratie ?

aéroport notre-dame-des-landes,nantes,nddl,rapport,médiateurs,expertsLes partisans du transfert de l'aéroport nantais à Notre-Dame-des-Landes, fustigent le réaménagement de l'aéroport actuel qui serait, selon eux "un déni de démocratie". Ils rappellent les multiples décisions de justice en faveur du projet et font valoir le résultat de la consultation organisé en juin 2016, où 55% des 51% d'électeurs participants (soit en réalité à peine plus d'un quart du corps électoral) s'étaient prononcés en faveur de la construction d'une nouvelle infrastructure.

L'argument du respect du vote citoyen ne semble plus gêner aujourd'hui Emmanuel Macron. Durant la campagne présidentielle, le candidat d'En Marche avait dit que pour lui, dans le dossier Notre-Dame-des-Landes, la consultation citoyenne était primordiale. Mais, toujours dans "Le Monde" de ce mercredi, pour le président de la République, c'est avant tout dans le dossier lui-même que réside le déni de démocratie, voire la tromperie politique. "La mission des médiateurs mettra en évidence le fait que le débat autour de Notre-Dame-des-Landes s'est polarisé autour d'une information insuffisante. On prend toujours les meilleures décisions en acceptant le débat démocratique, mais instruit et informé de manière indépendante", a conclu le président.

De fait, les médiateurs qui évoquent dans leur rapport un déni de démocratie dès le départ du projet lancé en 1974 sans aucune alternative, proposent aussi que tout projet d'équipement de ce type fasse l'objet dorénavant d'un projet de territoire, élaboré avec tous les acteurs locaux concernés, afin d'éviter pour l'avenir que ne se reproduisent de nouveaux "drames"... des Landes.

Si le gouvernement et Emmanuel Macron choisissent en janvier de moderniser l'aéroport existant de Nantes-Atlantique, sur la base de critères environnementaux liés à l'impératif climatique et sur les conclusions d'une étude fouillée et parfaitement indépendante, ils enverront un signal fort au pays. On pourra en effet se dire que les choses peuvent enfin changer en France. Sur la méthode comme sur le fond. 

Cathy Lafon

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