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Agriculture et pesticides : ces alternatives naturelles au glyphosate qui existent déjà

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La société corrézienne Eco-Agri propose des bio-stimulants naturels à base de végétaux et d'algues, comme alternatives aux produits chimiques, y compris pour la vigne. Photo archives Sud Ouest

Comme attendu, ce lundi, la France a mis son veto contre le renouvellement du glyphosate pour une durée de cinq ans, « seule proposition sur la table » de l’ultime réunion à Bruxelles. Elle n'a pas voté d'autorisation supérieure à trois ans, conformément à la position exprimée à plusieurs reprise par Nicolas Hulot.« Considérant les risques, la France s’opposera à cette proposition et votera contre. La France veut construire une sortie progressive du glyphosate et, avec plusieurs partenaires, pense qu’une durée plus courte serait possible », avait précisé ce dimanche dans le JDD Brune Poirson, secrétaire d’Etat auprès du ministre de la Transition écologue, à la veille du vote de la Commission européenneLe glyphosate, herbicide phare de la société Monsanto, est considéré comme cancérogène probable par l'OMS. 

Cela n'a pas suffi. Après un feuilleton de deux ans, l'Union européenne a fini par voter ce lundi la reconduction pour cinq ans de l'herbicide controversé. La Commission européenne a réuni la majorité qualifiée de 18 Etats-membres : l'Allemagne, qui s'abstenait jusque là, a fait basculer la balance, en votant pour le renouvellement de l'exploitation du produit. La sortie du glyphosate, soutenue par une pétition européenne qui a réuni plus d'1 million de signatures, était pourtant voulue au départ par le Parlement européen...

Parmi les arguments massues avancés par les partisans du glyphosate : pour les agriculteurs, il n'y aurait pas de solution de remplacement rentable au puissant produit chimique. Pourtant, Ma Planète en a repéré au moins deux. 

Bio-stimulants à base d'une algue marine

La première gamme de solutions, est proposée par Eco-Agri. Implantée en Nouvelle-Aquitaine à Segonzac, près de Brive en Corrèze, cette société distribue plusieurs bio-stimulants fabriqués à base d'extraits végétaux et d'une algue marine récoltée en mer de Norvège. Ciblés, ils sont destinés à améliorer les capacités des plantes contre le stress abiotique (les plantes recréent leur propre système immunitaire, leurs antibiotiques), en rétablissant la vie microbienne du sol et en améliorant l'efficacité des traitements, chimiques ou non.

Avec comme première conséquence, explique Jean-Claude Simiot, chargé d'affaires de la société, "un moindre besoin d'arroser (voire pas du tout), le sol retenant l'eau en restituant aux plantes les nutriments dont elle a besoin". Ca vaut pour tous les végétaux, fleurs, fruits et légumes : les tomates, les poireaux, les carottes... ou encore le maïs et la vigne. Et en seconde lame, la réduction voir la suppression de l'usage des pesticides. 

"Le parcours du combattant"

Et pour tous les usagers, particuliers comme professionnels : agriculteurs, viticulteurs, maïsiculteurs, mais aussi gérants de terrain de golf, de foot, de rugby, d'espaces verts publics... Le large éventail des produits naturels labellisés "Agriculture biologique" distribués par Eco-Agri sont très attendus notamment par les collectivités locales engagés dans le "zéro phyto", pour les entretiens de leurs stades et de leurs espaces verts. Pas plus chers que les produits chimiques et moins coûteux en main d'oeuvre, car nécessitant moins d'application, ils développent aussi la rentabilité des cultures. Parmi les clients d'Eco-Agri, "les services environnement de Bordeaux Métropole ou le Jardin botanique de Bordeaux", détaille Jean-Simiot. La société prépare la mise sur le marché d'un désherbant qui serait fabriqué en France par une PME et se substituerait avantageusement au glyphosate controversé. Mais pour ce faire, il faut une AMM, une autorisation de mise sur le marché. Normal. "Le problème, c'est que pour des produits comme les nôtres, elle est très compliquée à obtenir, un vrai parcours du combattant", déplore le représentant d'Eco-Agri, qui pointe aussi le coût de la démarche, de 100 000 euros.

En Bretagne, Osmobio a développé un désherbant naturel

La deuxième solution nous vient de Bretagne. Le 20 octobre 2017, sur son site Internet, Ouest France racontait l'histoire des déconvenues en série d'Osmobio. Installé à Loudéac (Côtes d'Armor), ce concepteur et fabricant de produits biologiques pour le jardin, la maison et les collectivités, a créé un désherbant naturel aussi efficace que les produits chimiques à base de glyphosate et sans danger pour l'homme et l'environnement. L'absence de toxicité a d'ailleurs bien été confirmé en 2012 par l'Institut national de l'environnement industriel et des risques (Ineris). Sauf que l'ingénieur agronome Jacques Le Verger, fondateur d'Osmobio, qui cherche à obtenir une AMM depuis 2009, doit toujours batailler. Il a déposé son dossier en 2015 auprès de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) en vue d'une commercialisation, mais l'agence l'ayant jugé incomplet, il a dû soumettre une nouvelle formule à l'Ineris, avant de déposer un nouveau dossier auprès de l'Anses...  

Pour l'agriculture, il semble bien qu'il soit possible de changer de modèle. Pas du jour au lendemain, comme l'expliquait ce lundi l'agronome Claude Bourguignon sur France Info, et en accompagnant les agriculteurs. La première étape pour eux, insiste le scientifique, consiste à "arrêter le labour, afin d'en finir avec les mauvaises herbes." Avec une autre technique, le semis direct sous couvert, qui consiste à implanter une culture directement dans un couvert végétal qui étouffe les herbes indésirables, assouplit la terre et peut être détruit juste avant le semis par le gel ou par un rouleau écraseur, on peut passer en bio et éviter l'emploi d'herbicides. Une pratique en outre plus rentable pour les exploitants, car elle utilise des tracteurs moins puissants et réduit le nombre de passages dans les champs, ce qui diminue la consommation de fuel et nécessite moins d'engrais, précise Claude  Bourguignon.

On le voit, les solutions alternatives aux pesticides, elles existent déjà et elles ne se résument pas à l'huile de coude... Par ailleurs, le changement de modèle ne serait pas obligatoirement plus coûteux et ne diminuerait pas non plus forcément la rentabilité des cultures. Au contraire, si l'on en croit les travaux des scientifiques et les retours d'expérience, comme celui d'Eco-Agri. En revanche, si comme l'a réaffirmé Emmanuel Macron ce lundi, la France interdira le glyphosate "au plus tard dans trois ans", malgré le vote des Vingt-Huit, il devient urgent d'homologuer les produits naturels alternatifs existants dont la non-toxicité a été prouvée, afin de les commercialiser. Et d'aider la recherche à développer ce secteur. Avec la promesse d'un nouveau business (plus vert) à la clé.

 Cathy Lafon

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