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Agriculture bio : l'Etat se désengage des aides au maintien

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La France veut recentrer ses aides sur le soutien aux nouveaux producteurs bio. Photo AFP

Mauvaise nouvelle pour la bio. Mercredi 20 septembre, le ministre de l’Agriculture, Stéphane Travert, en visite au salon Tech et Bio à Bourg-lès-Valence (Drôme), a annoncé que l’État allait « recentrer » ses aides sur le soutien aux nouveaux producteurs. Soit se désengager des aides au maintien, une part des soutiens versés aux agriculteurs qui veulent passer à une pratique plus respectueuse de l'environnement. Devant le dynamisme commercial du secteur, le ministre juge que « c’est au marché de soutenir le maintien de l’agriculture biologique », Un choix qui conforte le syndicat des agriculteurs conventionnel, la FNSEA, mais déçoit la Confédération paysanne et la filière bio. « Quand il y a une politique incitative forte les résultats sont là, le marché ne peut pas tout », a réagi dans un communiqué la  Fédération Nationale d'Agriculture Biologique (FNAB).

L'aide au maintien aux régions, l'aide à la conversion à l'Etat

Ce sont les régions qui vont prendre le relais. L'État va leur confier le financement, après 2018, des nouvelles aides au maintien des producteurs bio. Le ministre, qui dit vouloir recentrer les budgets de disponibles sur le financement des nouveaux d'aide à la conversion,  affirme toutefois que l'Etat s'engage à honorer les contrats pluri-annuels en cours et à maintenir au-delà de 2017 les allègements fiscaux dont ils bénéficient. 

Selon la région où ils habitent et malgré des politiques régionales variables sur le sujet, beaucoup d’agriculteurs bio devraient néanmoins continuer de toucher des aides au maintien. Versées jusqu’à cinq ans après les trois premières années d’activité, elles sont destinées à stabiliser et pérenniser une jeune exploitation bio. La plus grosse composante de ces aides provient des fonds européens agricoles pour le développement rural (Feader), gérés par les régions depuis 2014. 

Les régions ont souhaité "unanimement" mardi conserver la gestion de cette enveloppe lors d’un Comité État-régions, fait-on valoir au ministère qui a précisé que c’est l’abondement de l’État qui s’interrompra à partir de 2018 et qui venait en complément des fonds Feader. "Les régions pourront continuer de financer des aides au maintien sur de nouveaux contrats mais elles devront le faire en responsabilité et sans mobiliser les crédits du ministère", a résumé Stéphane Travert.

La déception de la FNAB 

En choisissant de ne plus soutenir l'aide au maintien, l'Etat est en phase avec le syndicat agricole FNSEA. Mais pas la principale fédération de producteurs bio, la FNAB. Même si l’État s’engage à honorer jusqu’en 2020 "les contrats pluri-annuels signés cette année" et précise que le crédit d’impôt dont bénéficient les producteurs bio sera prolongé au delà de 2017 alors qu’il devait être supprimé, la FNAB n’a pas caché sa déception. "C’est à ne plus rien comprendre, toutes les conditions sont réunies pour faire de la bio un succès collectif français, et c’est ce moment que choisit l’État pour se retirer alors que nous avons besoin d’un soutien public fort" a déclaré Stéphanie Pageot sa présidente dans un communiqué. Même son de cloche du côté de la Confédération paysanne qui parle d'"un nouveau renoncement" et trouve "scandaleux" le retrait de l’État du financement de l’aide au maintien des exploitations. 

 8,5% de surfaces en bio en 2020

Le ministre a aussi annoncé l’objectif de faire augmenter l’emprise de l’agriculture bio à "8,5% des surfaces agricoles utilisables" d’ici 2020, soit d’ici la fin de la programmation actuelle de la PAC, contre 6,5% en 2016. Ce qui constitue une deuxième déception pour la principale fédération d’agriculteurs bio. Selon la FNAB, une "véritable politique publique en matière d’agriculture bio" devrait tabler sur un objectif ambitieux de 20% d’ici 2022, afin de devenir le premier pays bio d'Europe et répondre à la forte demande des consommateurs de l'Hexagone.

"Manque criant de courage politique face à l'agro-industrie et l'agro chimie"

Enfin, pour les représentants de la filière bio, la suppression des aides au maintien ne tient pas compte du rôle positif de l’agriculture bio pour la l'environnement et des services rendus à la collectivité : la préservation des nappes phréatiques devrait être reconnu et récompensé. "Cette décision vient contredire les promesses de campagne du Président de la République sur les paiements pour services environnementaux (PSE) et l’introduction de produits bio dans les cantines" déplore Stéphanie Pageot en précisant : "Sur les sites pilotes Eau et Bio soutenus par les agences de l’eau, on est déjà à 10% des surfaces en bio contre 6,5% sur le reste du territoire".  Pour la FNAB, "Cela témoigne d’un manque criant de courage politique face à l'agro-industrie et l'agro chimie". 

Quid des retards de paiements des aides ?

De nombreux producteurs bio souffrent toujours de retards de paiement accumulé des aides. Le ministre s’est aussi engagé une nouvelle fois sur leur résorption. Avec deux ans de retard : "Le versement des aides à l’agriculture biologique au titre de la campagne 2015 interviendra à partir de novembre 2017. Le paiement des aides 2016 débutera à compter de mars 2018", a-t-il affirmé.

Développement d'une filière bio

Stéphane Travert s’est par ailleurs déclaré prêt à accompagner le développement d’une "filière bio", incluant transformation et distribution des aliments, afin que les produits bio puissent être écoulés à prix correct et sans gaspillage sur le marché. En suggérant la mise en place d’un "fonds privé" pour "financer des projets de développement et de structuration des filières bio", il dit compter sur les États généraux de l’alimentation (Egalim) en cours, pour élaborer des « propositions concrètes » sur le sujet.

Révision européenne du règlement bio

Enfin, le ministre de l'agriculture a estimé qu’un accord européen sur la révision de la définition même de l’agriculture bio est "atteignable (…) avant la fin de l’année". Après vingt mois de discussion, les négociateurs du Parlement européen et du Conseil ont trouvé le 28 juin 2017 un accord sur le projet de révision du règlement bio. Celui-ci prévoit des contrôles plus stricts sur la chaîne d'approvisionnement, des règles plus sévères pour les importations et des mesures pour éviter les contaminations par les pesticides. L'objectif étant que le consommateur puisse avoir une plus grande confiance dans le secteur biologique. Le texte qui doit désormais être adopté par la commission de l'agriculture, le Parlement et le Conseil, devrait s'appliquer à partir du 1er juillet 2020.  A suivre.

Cathy Lafon

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