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La Grande barrière de corail est estimé à 37 milliards d'euros. Et alors ?

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Le cabinet Deloitte chiffre à 19,6 milliards d'euros la valeur touristique du récif - SARAH LAI/AFP


Faut-il mettre un prix à ce qui est tellement précieux sur Terre qu'il est irremplaçable et donc, comme l'amour ou l'amitié, n'a justement pas de prix ? Pour protéger la nature et faire prendre conscience à l'humanité de l'infinie richesse que représentent pour elle ses innombrables merveilles, faut-il comme pour la Grande barrière de corail, tenter d'estimer leur valeur économique ? Il y a débat. 

Un emblème qui n'a pas de prix pour les Australiens

barrière de corail,site menacé,prix,monétarisation,réchauffement climatiqueLa Grande barrière de corail, inscrite au Patrimoine mondial de l'Unesco, menacée par la prolifération des acanthasters, étoiles de mer dévoreuses de coraux, vient de subir deux graves épisodes consécutifs de blanchissement de ses coraux imputés au réchauffement climatique. Cet écosystème unique au monde et aussi victime des ruissellements agricoles et  des pollutions liées à un développement économique mal maîtrisé. C'est aussi un joyau unique et un emblème "qui n'ont pas de prix" pour les Australiens. Pourtant, à la demande de la Fondation de la Grande barrière de corail, les experts du cabinet Deloitte Access Economics ont estimé sa "valeur" économique et sociale à 56 milliards de dollars australiens (37 milliards d'euros). Avec pour objectif d'accroître la prise de conscience de la richesse que représente pour l'Australie ce récif de 2 300 kilomètres.

Valeur touristique et valeur "indirecte"

Pour les besoins de cette étude, 1 500 personnes originaires de 10 pays ont ainsi été interrogées sur ce qui faisait selon eux la valeur du récif, qu'il s'agisse de sa valeur touristique, de son importance pour la biodiversité mondiale ou pour l'image de l'Australie. Dans un rapport diffusé lundi 26 juin, le cabinet estime donc à 29 milliards de dollars australiens (AUD) la valeur touristique du récif, dont 64 000 emplois dépendent. Il chiffre à 24 milliards AUD la valeur "indirecte" de la Grande barrière, à savoir celle auprès des gens qui ne se sont jamais rendus sur le récif mais qui savent qu'il existe.

Un "actif"

Combien vaut l’Everest ? Le Mont-Blanc ? Le Grand Canyon ? La Méditerranée ? L'Antarctique ? L'Arctique ? La forêt amazonienne ? Le golfe du Mexique ? Il est évident que la Grande barrière est "irremplaçable et n'a pas de prix", pas plus que les sites naturels du monde les plus remarquables au monde, a déclaré John O'Mahony, directeur de Deloitte Access, loin d'être bêtement mercantile. "Mais nous l'avons étudiée comme un "actif" qui a une valeur incroyable à plusieurs titres, sur le plan de la biodiversité, des emplois qu'elle génère et de son image pour les visiteurs internationaux", a-t-il expliqué.

12 Opéras de Sydney

Conclusion : cette étude montre que la Grande barrière contribue plus que tout autre site australien à l'image internationale de l'Australie, selon Steve Sargent, directeur de la Fondation de la Grande barrière. "La valeur estimée de la Grande barrière représente l'équivalent de 12 Opéras de Sydney", explique-t-il. Une métaphore qui fait tilt chez  le contribuable australien. Surtout, "ce rapport montre que la Grande barrière de corail - en tant qu'écosystème, que ressource économique ou que trésor mondial - est trop importante pour disparaître", veut-il croire.

Donner des droits à la nature

barrière de corail,site menacé,prix,monétarisation,réchauffement climatiqueOn peut pourtant légitimement s'interroger : donner préventivement un prix à la nature contribue-t-il vraiment à sa protection ? Donner ou plutôt reconnaître, comme pour la vie humaine, une valeur intrinsèque, non monétisée, à la nature qui n'est pas l'esclave des êtres humains et a le droit d’exister pour elle-même, ainsi que le réclame la juriste en droit international Valérie Cabanes, auteure du passionnant essai "Un nouveau droit pour la Terre" (Seuil), ne serait-il pas plus pertinent ? Pour la survie de la biodiversité mais aussi de l'humanité elle-même ? 

Réparer les dommages

Reste que pour nous autres occidentaux, plutôt durs de la comprenette et pour qui tout s'achète et tout se vend, monétiser des éléments naturels peut quand même faire oeuvre utile de pédagogie, en donnant un aperçu de leur valeur. Sans compter que cela peut avoir du sens dans le cadre d’un procès, suite à une catastrophe industrielle provoquée par l'homme (marée noire, etc.), le juge pouvant utiliser une estimation pour demander réparation des dommages. Le bémol étant que le principe du pollueur-payeur, encore difficilement appliqué, n'est pas encore assez dissuasif pour les grands groupes industriels, imprégnés en outre de l'idée illusoire, que l'on peut remplacer ailleurs la nature que l'on a détruit ici, à condition d'y mettre les moyens. Bref, il y a vraiment débat.

Cathy Lafon

►A LIRE

 "Un nouveau droit pour la Terre : pour en finir avec l'écocide", Valérie Cabannes, Edition Le Seuil, 20 euros.

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