Pollution de l'air : en Chine, Pékin a fermé sa dernière centrale au charbon
Pékin est victime d'alertes à la pollution de l'air récurrentes. Photo archives AFP
Alors que le "Décret sur l'indépendance énergétique", signé par Donald Trump le mardi 28 mars 2017, veut réhabiliter les énergies fossiles aux Etats-Unis, "au nom de l'emploi" et pour "concurrencer la Chine", en s'attaquant au plan climat de son prédécesseur démocrate, de l'autre côté de la Terre, la Chine poursuit une dynamique diamétralement opposée. Impulsée en son temps, notamment, grâce au lobbying de... Barack Obama.
Fini le charbon pour l'électricité de Pékin
Après avoir longtemps trainé des pieds, les autorités chinoises ont fini par prendre leur premier engagement international pour le climat à la COP15, à Copenhague en 2009, en annonçant leur volonté de réduire l'" intensité carbone" de leur économie – le volume de CO2 émis par unité de production – de 40 à 45 % entre 2005 et 2020. Un second pas décisif a été franchi lors de la COP21, à Paris fin 2015, où la Chine s’est engagée à atteindre le pic de ses émissions de gaz à effet de serre en 2030, après avoir affiché conjointement avec les Etats-Unis, le 12 novembre 2014, son intention de mener un projet sans précédent de réduction de ses émissions de gaz à effet de serre (GES). Dans cette logique, le premier pollueur de la planète, responsable de 25% des émissions de gaz à effet de serre mondiaux, juste devant les Etats-Unis, vient de fermer la dernière grande centrale au charbon de sa capitale, Pékin, qui compte plus de 20 millions d’habitants. Depuis le dimanche 19 mars 2017, l'électricité de la mégalopole chinoise est désormais exclusivement générée par le gaz.
Le fléau de la sur-pollution
Victime de pollutions chimiques et de contaminations de toutes sortes (eaux, sols, air), la Chine paie aujourd'hui le prix d'un développement économique débridé et forcené, conquis sans mesures de protection environnementale. Pour le pays et ses habitants, l'addition écologique et sanitaire est lourde. Ses grandes villes, notamment, particulièrement le Nord-Est du pays, où se trouvent la capitale et les installations industrielles les plus anciennes et les plus polluantes, sont régulièrement asphyxiées par des nuages de pollution toxique aux particules fines, au détriment de la santé des Chinois. Les enfants, les malades et les personnes fragiles sont les premiers à trinquer. Pour peu qu'ils en aient les moyens, nombreux sont les parents qui cherchent à déménager pour permettre à leur progéniture de vivre dans des milieux urbains plus sains.
"Rendre un ciel bleu aux Chinois"
Pour remédier à une crise environnementale sans précédent qui mécontente et fait réagir la société civile, les autorités ont décidé de frapper vite et fort. A la chinoise. Lors de la fermeture de la session annuelle du Parlement (ANP), le 15 mars, le Premier ministre chinois Li Keqiang avait promis de "rendre un ciel bleu aux Chinois". Annoncée dans la foulée, la fermeture de la centrale thermique de Huangneng est devenue effective trois jours après, dans la nuit du week-end du 18 et 19 mars. Une date éminemment symbolique : le dimanche, la municipalité émettait une nouvelle alerte bleue à la pollution de l’air.
Plus de 1 million de décès prématurés en 2012
Le smog nocif obscurcissait depuis déjà plusieurs jours le ciel de la capitale où le niveau de particules fines à pm2,5, c’est-à-dire d’un diamètre de 2,5 microns, oscillait entre 200 et 330, soit dix fois plus que le niveau maximal recommandé par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Ces particules, qui s’installent profondément dans les poumons et peuvent passer dans le système sanguin, sont responsables de taux plus élevés que la moyenne de bronchites chroniques, cancers du poumon et maladies cardiaques. En Chine, le nombre de décès prématurés en raison de la pollution est de près de 400 000 par an dans l’ensemble du pays selon les chiffres officiels, et plus de 1 million en 2012 selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Pour mémoire, une étude américaine du Health Effects Institutes évaluait en février 2016 à 5,5 millions le nombre des morts prématurés dus à la pollution, par an et dans le monde.
Une réduction de 1% des émissions de CO2 en 2017
Depuis 2014, Huangneng est la quatrième et dernière centrale électrique au charbon à avoir été remplacée à Pékin par une usine fonctionnant au gaz. La capitale devient ainsi la première ville du pays dont l’électricité est intégralement générée par le gaz naturel, ce qui avait été un des objectifs fixés par le plan quinquennal de 2013 de la capitale, inscrit dans le processus de planification national qui prévoit la désintoxication du pays au charbon. Avec un certain succès: selon les prévisions émises fin février par l'Agence de l'énergie chinoise, la Chine devrait ainsi parvenir à une baisse de 1 % de ses émissions de CO2 en 2017. Des chiffres qui, selon Greenpeace, ferait de l'année en cours la quatrième année de déclin ou de stagnation en la matière pour le pays. La Chine, bonne élève dans la lutte planétaire contre le réchauffement climatique, joue aussi le rôle de moteur dans la conversion aux énergies renouvelables (solaire, éolien...), sans lésiner sur les moyens. Dans son plan de développement 2016-2020, l'Agence de l'énergie chinoise préconise notamment d'investir la 335 milliards d'euros dans ce secteur.
Avant de parvenir à reconquérir un environnement sain, la route de la Chine sera longue et le ciel de Pékin n’est pas encore bleu. Mais la capitale chinoise devrait un peu mieux respirer.
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