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Des cosmétiques antipollution: réalité ou miroir aux alouettes?

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L'efficacité des cosmétiques anti-pollution ne repose sur aucune réalité scientifique. Photo AFP

"Bouclier urbain", "City Block", "City Defense"… Les fabricants de cosmétiques sont toujours plus nombreux à lancer des produits censés protéger la peau des effets néfastes de la pollution atmosphérique dans les grandes villes. Malgré l’absence de tests d’efficacité standardisés, au vu des potentiels de vente énorme de ces produits, la plupart des grandes marques ont investi le créneau, de Dior (groupe LVMH) à Chanel en passant par le japonais Shiseido, Clinique (groupe Estée Lauder), Clarins, ou encore L’Oréal avec ses marques Lancôme, Vichy, La Roche Posay ou SkinCeuticals. Mais ces cosmétiques anti-pollution tiennent-ils toutes leurs promesses ? Rien n'est moins sûr.

Un potentiel de vente "énorme"

« Les consommateurs sont de plus en plus conscients des effets de la pollution de l’air sur la peau et l’apparence, et c’est ce qui stimule la demande pour ces produits dans le monde ». Maria Coronado Robles, analyste chez Euromonitor.

La tendance des cosmétiques estampillés "anti-pollution" est née en Asie depuis une dizaine d'année mais elle "a pris de l’ampleur depuis deux/trois ans", relève Sharon Kwek, analyste à Singapour du cabinet d’études Mintel. Cette catégorie représentait, en 2016, 1% des produits de beauté lancés au niveau mondial, mais son potentiel de ventes est "énorme" à l’avenir. "C’est une catégorie du soin de la peau qui est partie pour durer", confirme Maria Coronado Robles, analyste chez Euromonitor.

En hausse lors des pics de pollution

En France, le distributeur sélectif de cosmétiques Nocibé a indiqué avoir enregistré des hausses dans les ventes de ce genre de produits en 2016, notamment lors des pics de pollution en fin d’année. En parapharmacie également, les ventes de cosmétiques anti-pollution semblent s'accélérer : "Depuis deux ans ça augmente, particulièrement depuis cet été, et cet hiver encore plus", confie Marie-Hélène Gondran, gérante d’une pharmacie du réseau Pharmabest à Lyon.

La pollution aggrave les problèmes de peau

Pour les clientes, reste à savoir si les produits qu'elles achètent ont une réelle efficacité. Une chose est sûre : la pollution atmosphérique, dont on sait qu'elle est mauvaise pour la santé, n'est pas meilleure pour la peau. En 2015, L’Oréal a notamment publié deux études scientifiques sur l’impact de la pollution sur la peau de centaines de femmes volontaires au Mexique et en Chine."Ces études ont montré que la pollution augmentait la production de sébum, et donc pouvait engendrer plus de points noirs, plus d’imperfections. La pollution augmente aussi la sensibilité, fragilise la barrière cutanée et aggrave systématiquement les problèmes de peau existants", résume Brigitte Liberman, directrice générale de la division Cosmétique Active chez L’Oréal.

Les effets néfastes du cocktail soleil-pollution

D’autres études ont par ailleurs indiqué que les rayons solaires UVA étaient un facteur aggravant de l’impact de la pollution sur la peau. D’où des produits anti-pollution associant souvent des filtres UV, que l’on retrouve dans les crèmes solaires, et des antioxydants, bien connus des produits anti-âge. S'il n'y a pas de "grandes innovations en termes d’ingrédients" pour les produits anti-pollution, comme le reconnaît Emmanuelle Moirand, directrice scientifique de Clinique Europe, "cela a permis de les utiliser en synergie". Les fabricants associent  des antioxydants avec des réparateurs de la barrière cutanée, des protecteurs UV… Quant aux formules, elles sont aussi un peu plus élaborées et plus ciblées.

Pas de protocoles standardisés

Mais il est bien difficile de savoir si ces produits marchent, car il n’existe pas à l’heure actuelle de protocoles standardisés pour mesurer leur efficacité : chaque marque base ses affirmations sur ses propres méthodes de tests. Par conséquent, les fabricants de cosmétiques ne sont absolument pas en mesure d’indiquer au consommateur le niveau de protection offert contre la pollution, sauf en ce qui concerne la protection solaire où des indices existent.

"Un domaine qui vend du rêve"

"L’industrie a mis la charrue avant les boeufs" avec les cosmétiques anti-pollution, regrette Céline Couteau, maître de conférences en cosmétologie à la faculté de pharmacie de Nantes, qui juge aussi "très excessifs" certains termes utilisés dans le marketing de ces produits, qui sous-entendent parfois une protection totale. "On est dans un domaine qui vend du rêve", estime l'universitaire.

"On apprend au fur et à mesure"

"On est encore un petit peu novice sur l’impact de la pollution en fonction des doses reçues et de ses différences sources. C’est très compliqué de proposer des protocoles standards adaptés à tous ces agresseurs", admet Marie-Hélène Lair, directrice de la communication scientifique de Clarins. "On en discute, mais pour l’instant on n’a pas trouvé (…). On apprend au fur et à mesure, on fait de vrais progrès et il faut les mettre à disposition du plus grand nombre", tranche Brigitte Liberman de L’Oréal.

Alors, faut-il ou pas acheter des cosmétiques anti-pollution ? Réduire la pollution atmosphérique, ne serait-il pas le meilleur moyen de protéger sa peau et sa santé en général ? Mesdames (et Messieurs), à vous de juger.

Cathy Lafon avec l'AFP

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