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Gros coup de chaud sur l'Arctique : au pôle Nord, la température dépasse de 20°C la normale

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Un ours polaire teste la solidité d'une couche de glace, le 13 septembre 2016 dans l'Arctique - Photo AFP

C'est le monde à l'envers. Au delà du cercle polaire, avec près de zéro degré Celsius au pôle Nord, soit 20°C au-dessus de la moyenne, l'Arctique connaît cet automne une chaleur record. Deuxième inquiétude, confrontée à un « cercle vicieux » qui s’annonce de plus en plus fréquent avec le réchauffement climatique, la banquise polaire est à un minimum historique à cette époque de l'année.

Un deuxième record sans précédent dans l'histoire moderne de la planète qui accentue le réchauffement de l'air. Inédite par son ampleur, la situation, due au dérèglement du climat sur la planète, accentué cette année par le courant cyclique El Nino, interroge les climatologues : les pôles Nord et Sud jouent en effet le rôle de climatiseurs dans l'écosystème Terre.  

Les relevés de l’Institut météorologique danois (DMI) montrent qu'en novembre, les températures journalières de l'air ont excédé de 15°C à 20°C la moyenne de la période 1958-2012. Ces quatre dernières semaines, le thermomètre est resté 9 à 12°C au-dessus de la normale, des niveaux de -5°C ont été relevés au lieu des -25°C habituels en cette saison. Conséquence : une banquise au plus bas, dans une région qui se réchauffe déjà habituellement deux fois plus vite que le reste du monde et dont le sort a un impact majeur sur l’ensemble de la planète.

La banquise n'a jamais été aussi réduite

A la fin de l’été, l’étendue des glaces arctiques était déjà la deuxième plus faible jamais enregistrée (4,14 millions de km2), après celle de 2012, selon le Centre de données sur la neige et la glace (NSIDC) américain. Alors qu'elle se reconstitue ordinairement en cette période de l'année, en octobre, la banquise n’était remontée qu’à 6,4 millions de km2, soit un tiers de moins par rapport à la moyenne de 1981-2010 : la plus faible superficie pour cette saison depuis le début des relevés satellitaires en 1979.

La NASA a reconstitué à partir des données satellitaires la fonte des glaciers de l’Arctique entre 1984 et 2016. Cette modélisation témoigne des conséquences du réchauffement climatique sur les glaces du Grand Nord.

Des anomalies dans la zone polaire... normales dans un climat planétaire qui se réchauffe

Faut-il s'en étonner ? Non, selon la climatologue Valérie Masson-Delmotte : « C’est un record remarquable. Il peut être lié aussi à l’aléa de la météo, mais c’est le type de choses auxquelles on s’attend de toute façon dans un climat qui se réchauffe ». A l’origine de cette situation hors norme, des vents du sud et la chaleur des océans, auxquels s’ajoute cette année le courant cyclique El Nino. Le problème étant que le phénomène s’auto-entretient : la fonte de glace est une conséquence de la chaleur, mais elle en est aussi une cause. « La banquise a un rôle d’isolant, qui empêche la chaleur de l’océan (-2° près du pôle) de passer vers l’atmosphère, préservant ainsi un air froid », explique la scientifique, co-présidente du GIEC. A l’inverse, « l’absence de glace favorise le transfert de chaleur de l’océan vers l’air. Cela fait partie des cercles vicieux » du climat, qui font craindre un emballement.

La fin des glaces d'été dans l'Arctique en 2030 ?

Sur la planète, les dernières années ont été les plus chaudes de l'histoire moderne et 2016 devrait battre de nouveaux records. Sous l'effet du dérèglement du climat, le réchauffement de l'océan se cumule au fil des ans. Chercheur au DMI, Martin Stendel insiste sur ce paramètre qui explique « la spirale vers le bas ». « Vu le réchauffement océanique, la reprise de la glace intervient de plus en plus tard et la fonte de plus en plus tôt », note-t-il. « De la glace ancienne disparaît. Elle n’a plus le temps de se reconstituer et de retrouver une épaisseur suffisante pour tenir l’été » (…).  Pour la première fois cet été, un paquebot a pu traverser l'Arctique, reliant l'Alaska à New York.  Il pourrait être le premier d'une longue série : les chercheurs annoncent à moyen terme un océan Arctique libéré des glaces l’été, avec seulement une banquise fine reconstituée par des glaces jeunes, l’hiver. Pour certains cela pourrait se produire dès 2030.

La banquise régule la température mondiale

Si la fonte de la banquise facilite le transport maritime, ce n'est pas pour autant une bonne nouvelle pour l'avenir de la planète. Il ne faut pas perdre de vue que les glaces du pôle régulent la température mondiale par leur « effet miroir » l’été, permettant, par la blancheur de leur surface, de renvoyer le rayonnement solaire dans l’atmosphère. Leur recul amplifie le réchauffement global, et l’accentue particulièrement sur les continents voisins. La fonte a aussi des effets sur la densité de l’eau de mer, car ce rejet supplémentaire de sel agit sur la formation des grands courants océaniques profonds. « Tous ces effets sont intimement liés les uns aux autres », rappelle Valérie Masson-Delmotte. Aussi, appréhender l’impact du recul de la banquise sur la dynamique de l’atmosphère est devenu une priorité des scientifiques.

Sur le banc des accusés, les gaz à effet de serre, émis par les activités humaines et issus pour l’essentiel de l’usage du charbon, du gaz et du pétrole, responsables du réchauffement en cours, sont à l'origine de la fonte accélérée de la banquise. Une tonne de CO2 émise (soit un vol New York-Paris pour un passager) entraîne la disparition de trois m2 de glace arctique, a récemment montré une étude. La communauté internationale s’est engagée en décembre 2015, à Paris, à contenir le mercure mondial sous 2°C par rapport au début de l'ère industrielle, à la fin du XXIe siècle, en limitant les gaz à effet de serre. Mais les engagements nationaux sont encore insuffisants...

Si les scientifiques ne connaissent pas exactement les conséquences qu'aura la réduction comme peau de chagrin des glaces des mers, ils savent que, parmi les nombreux impacts du réchauffement, la seule fonte de la cryosphère arctique a des conséquences majeures. Les phénomènes observés dans l'Arctique nourrissent les inquiétudes des spécialistes du climat du Giec, qui préparent un rapport spécial sur les océans, la glace et le changement climatique.

Cathy Lafon

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