La feuille de route énergétique de la France pour 2023, critiquée sur le nucléaire
L'évolution du bouquet énergétique tricolore permettra-t-il d'atteindre les les objectifs de la loi sur la transition énergétique votée en août 2015 ? Photo AFP
Avec plusieurs mois de retard, la feuille de route énergétique de la France jusqu’en 2023, a enfin été publiée fin octobre au Journal officiel. Ce texte, appelé Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), est d'une grande importance : il fixe la trajectoire d’évolution du bouquet énergétique (pétrole, éolien, nucléaire, solaire, etc.) du pays pour les sept prochaines années, pour atteindre les objectifs de la loi sur la transition énergétique votée en août 2015.
"Efficace pour le combat climatique"
Comme de juste, la ministre de l’Environnement et de l’Energie, Ségolène Royal, s'est félicitée de ce "texte principal, qu’on attendait depuis le vote de la loi" Elle y voit une "PPE ambitieuse, notamment pour les énergies renouvelables", mais aussi "efficace pour le combat climatique" et "énergique pour la préparation du modèle économique de demain", basé sur une croissance moins émettrice en CO2.
Malgré les ajustements du gouvernement, le texte reste pourtant critiqué, notamment sur le volet sensible du nucléaire. Voici pourquoi.
Le flou du nucléaire
Initialement attendue au premier semestre, sa présentation avait d’abord été reportée, puis le texte a été amendé par le gouvernement après les critiques émanant de plusieurs organismes (comité d’experts, autorité environnementale, conseil national de la transition écologique, etc.), qui ont été consultés avant sa parution. Ils reprochaient notamment un certain flou sur le volet sensible du nucléaire alors que la loi prévoit de ramener la part de l’atome dans la production nationale d’électricité de 75% aujourd’hui à 50% d’ici à 2025.
Quid des fermetures de réacteurs nucléaires ?
Sur ce point, une phrase a été ajoutée à la synthèse accompagnant le décret. Elle précise que la fourchette anticipée de baisse de la production d’électricité nucléaire contenue dans la PPE "pourra également être révisée (…) en fonction de l’augmentation de la production renouvelable et des efforts d’efficacité énergétique". Mais elle ne mentionne toujours que la fermeture de la centrale de Fessenheim (Haut-Rhin) (photo ci-contre), sans préciser le nombre d’autres réacteurs qui pourraient être fermés d’ici 2023, laissant ainsi sur leur faim des ONG, appuyées par un rapport parlementaire publié cet été, qui réclamaient un objectif chiffré.
Le décret lui-même oblige l’exploitant nucléaire EDF, "dans un délai maximal de six mois" après sa publication (soit juste avant l’élection présidentielle de 2017), à établir "un plan stratégique compatible avec les orientations de la programmation pluriannuelle de l’énergie".
"Renoncement" du gouvernement, pour Greenpeace
Dans un communiqué, Greenpeace a dénoncé une PPE "incohérente" qui "n’indique aucune trajectoire de réduction de la part du nucléaire". L’ONG estime qu’il faudrait fermer entre 21 et 23 réacteurs d’ici à 2023 pour atteindre l’objectif de la loi. "Le gouvernement laisse à EDF la main" pour "dire comment ils feront", puisque la trajectoire pour atteindre les 50% "n’est pas décrite", insiste Cyrille Cormier, chargé de campagne Energie au sein de l’ONG, parlant d’un "renoncement" du gouvernement.
Des objectifs cohérents pour les énergies renouvelables, sauf pour l'éolien en mer
C’est "surtout la clarté des objectifs qui a été renforcée", a expliqué la ministre, alors que la PPE avait aussi été critiquée sur le manque de cohérence entre ses différents volets (consommation et production d’énergie). Désormais, "plus de 90%" des textes d’application de la loi sur la transition énergétique ont été publiés, a-t-elle ajouté, les autres étant en cours d’examen au Conseil d’Etat ou à la Commission européenne. Le Syndicat des énergies renouvelables (SER) a lui salué des objectifs à 2023 "cohérents" avec une production d’énergie à 32% issue des énergies renouvelables en 2030.
Mais dans l’éolien en mer, il n’y a "plus d’échéance après 2016 pour l’éolien en mer: la PPE ne donne pas à la filière la visibilité nécessaire", a critiqué sur Twitter le directeur général de la filiale française du groupe allemand WPD, Vincent Balès.
Cathy Lafon avec l'AFP
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