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Quand Nicolas Sarkozy vire au climato-scepticisme

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En 2007, Nicolas Sarkozy avait signé le Pacte écologique de Nicolas Hulot. Photo archives AFP

Mais quel moustique tigre a donc piqué Nicolas Sarkozy ? Telle une girouette, le signataire du Pacte de  Nicolas Hulot pour l’écologie à la présidentielle de 2007, qui a lancé dans la foulée, au début de son quinquennat, le Grenelle de l’environnement, effectue un virage à 180 degrés et vire au climato-scepticisme. L’ex-président UMP, candidat Les Républicains à la primaire de la droite pour 2017, a affirmé ce mercredi devant l'Institut de l'Entreprise, que "l'homme n'était pas le seul responsable du changement climatique", suscitant la polémique, y compris dans son propre camp politique. Alain Juppé, son grand rival à la primaire, n'a pas manqué de le tacler.

"Ca fait 4,5 milliards d'années que le climat change"

"On a fait une conférence sur le climat. On parle beaucoup de dérèglement climatique, c'est très intéressant mais ça fait 4,5 milliards d'années que le climat change. L'homme n'est pas le seul responsable de ce changement", a affirmé l'ex-chef de l'Etat. Nicolas Sarkozy a ajouté : "Le Sahara est devenu un désert, ce n'est pas à cause de l'industrie. Il faut être arrogant comme l'homme pour penser que c'est nous qui avons changé le climat..." Je préférerais qu'on parle d'un sujet plus important: le choc démographique. La France doit porter une conférence sur la démographie. Jamais la terre n'a connu un choc démographique tel qu'elle va le connaître, puisque nous serons onze milliards dans quelques années. Là, l'homme en est directement responsable. Et personne n'en parle".

"Vraiment pitoyables"

De quoi faire bondir les scientifiques et les écologistes de tout poil. Ainsi, le climatologue Jean Jouzel, l'ancien vice-président du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (Giec) dont les travaux font autorité, a jugé que ces déclarations, "vraiment pitoyables pour quelqu'un qui a lancé le Grenelle de l'environnement" sous son quinquennat, traduisaient un "mépris de la communauté scientifique".

"Régressif et rétrogade"

La secrétaire d'Etat de François Hollande chargée de la Biodiversité, Barbara Pompili, a qualifié pour sa part le propos de Nicolas Sarkozy de "régressif et rétrogade". "Comment Nicolas Sarkozy peut-il mieux savoir que toute la communauté scientifique, qui est aujourd'hui d'accord sur le fait que l'homme a une influence sur le réchauffement climatique? Pour des raisons très certainement politiciennes, on voit que le discours est un discours régressif, rétrograde, et qui va nous faire perdre des dizaines d'années d'avancée", a-t-elle réagi sur iTélé. Quant à l'eurodéputé Yannick Jadot, candidat EELV à la primaire écologiste, il a vertement dénoncé la sortie de Nicolas Sarkozy sur son compte Twitter jeudi : "En 2007 Nicolas Sarkozy voulait liquider l'héritage de Mai 68. En 2016 il veut liquider la science le climat et notre avenir!".

"Nier une réalité"

Alain Juppé, dont on connaît le penchant pour l'écologie, a répliqué aussi sec que toute réfutation du rôle de l'activité humaine dans le réchauffement de la planète revenait à "nier une réalité" . "Je suis convaincu que [...] l'activité humaine porte une lourde part de responsabilité dans la production de gaz à effet de serre et donc dans le réchauffement climatique" , a déclaré le maire de Bordeaux, en marge du Salon international des productions animales, près de Rennes.

Double mensonge

Reste que les propos de Nicolas Sarkozy sont surtout doublement mensongers. D'un, la réalité du réchauffement climatique, déjà observé aux quatre coins de la planète, ne fait plus débat chez les scientifiques du monde entier. Les résultats de leurs travaux s'accumulent par ailleurs pour mettre en évidence la responsabilité des activités de l’homme en la matière et les multiples dangers que ce changement climatique fait peser pour la survie de l’Humanité sur Terre. Quant à la menace potentielle que ferait peser l'évolution démographique sur la planète, elle constitue, avec la chute inquiétante de la  biodiversité, une préoccupation majeure pour les écologistes, qu'ils soient citoyens lambda, ONG ou politiques.

Certes, l’ex-président qui veut être de nouveau président avait eu une première petite attaque d’écolo-scepticisme en mars 2010, en déclarant au Salon de l’Agriculture : "L’écologie, ça commence à bien faire".  Deuxième symptôme de ce revirement inquiétant, lors de la campagne pour la présidence de l'UMP, en 2014, Nicolas Sarkozy s'était prononcé pour l'exploitation du gaz du schiste, alors qu'il est lui-même l'auteur de son interdiction, en 2011. Mais là, les bras nous en tombe.

"Non, mais allô, quoi, Nicolas !"

D'abord, on a quand même envie de dire : "Non, mais allô, quoi, Nicolas ! Chacun son boulot !" Les chercheurs mettent des décennies à faire le leur, avant d'oser commencer à en tirer, avec moultes précautions, la moindre conclusion. De quel droit les politiques invalideraient-ils - ou même valideraient-ils - en deux ou trois phrases lapidaires, les résultats de leurs travaux ? Louis XIV, c'est fini, Nicolas ! Le réchauffement climatique n'est pas plus une croyance qu'une opinion politique. Il s'agit d'une réalité objective, aux causes et aux conséquences de mieux en mieux connues scientifiquement. Ensuite, faire du Trump à la française, pour des raisons électoralistes, en tenant des propos climato-révisionnistes, dignes du café du Commerce du siècle dernier et négateurs de l’intelligence humaine elle-même, est-ce cela que l’on attend d’un responsable politique qui prétend à la fonction suprême, quand chacun sait que les grands défis économiques et sociaux du XXIe siècle sont aussi écologiques ? Assurément non. Si la politique se résume à cela, quelle tristesse.

Cathy Lafon

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