Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Soupçons de "falsifications" dans une usine d'Areva: ce nouveau dossier qui ébranle le nucléaire français

areva,sécurité,usine,le creusot

L'usine d'Areva au Creusot (Saône-et-Loire). Photo AFP

L’audit lancé fin 2015, après la découverte d’une "anomalie" sur la cuve de l’EPR de Flamanville (Manche), a révélé des incohérences dans les dossiers des contrôles de fabrication des composants nucléaires au sein de l'usine d'Areva Creusot-Forge (Saône-et-Loire), où l’acier du couvercle et du fond de cuve défaillante du réacteur nucléaire de l'EPR a été forgé.

Selon le journal "Les Echos", qui a révélé ce mardi cette inquiétante information, il est possible en outre que les dossiers de ces pièces aient été falsifiés pour dissimuler les anomalies détectées. Une éventualité que n'exclut pas Philippe Knoche, directeur général d’Areva, un groupe désormais au bord du gouffre financier et menacé de quasi-démantèlement.

"Je ne peux pas l'exclure"

D’après "Les Echos", un opérateur réalisait des essais sur une pièce métallurgique et inscrivait sur le dossier de fabrication "les résultats sur l’analyse chimique de coulée, les paramètres de forgeage, l’historique de traitement thermique, les résultats des essais mécaniques". "En cas de valeur obtenue dans le haut de la norme requise, les procès-verbaux de certains dossiers de fabrication auraient été modifiés", révèle le journal, citant une source anonyme. Une histoire totalement invraisemblable ? Pas sûr, hélas. "Je ne peux pas l'exclure. On a des procès-verbaux contradictoires. Soit il y a eu des essais complémentaires qui ne sont pas tracés, et il faut qu’on ait la conviction qu’ils existent. Sinon, il faudra en tirer les conséquences", a déclaré aux "Echos" Philippe Knoche. Pour sa part, Bercy attend les résultats complets de l’audit mené sur les fabrications de Creusot-Forge, avant de se prononcer. 

Le dossier noir des EPR

areva,sécurité,usine,le creusotCette nouvelle affaire vient alourdir la barque déjà bien chargée des soucis d'Areva, déjà plombé, entre autres, par les EPR.  Le chantier de l'EPR d'Olkiluoto en Finlande, conduit par le groupe français, après avoir démarré en 2005, accuse 9 ans de retard. Son coût a explosé, de 3,5 à 8 milliards d'euros. Idem pour le second chantier majeur à problème d'Areva, l'EPR de Flamanville, qui affiche 6 ans de retard (il devait entrer en production en 2012 et ne fonctionnera pas au mieux, avant 2018) et accuse un dérapage financier de 3,3 à 10,5 milliards d'euros.

Dette colossale

Le géant du nucléaire français victime d'une dette colossale, affiche déjà 7 milliards d'euros de perte depuis 2014 et a annoncé 2.700 suppressions de postes en France d'ici l'année prochaine. EDF doit d'ailleurs débourser 2,5 milliards d'euros - sur les 5 milliards nécessaires pour renflouer le groupe français - afin d'acquérir la branche Areva NP, à laquelle appartient Creusot-Forge, chargée de la conception des réacteurs nucléaires. Cette affaire, mauvaise pour l'image de la filière nucléaire française, pourrait donc également compliquer la restructuration d'Areva.

La sécurité des centrales nucléaires françaises en question ?

Des pièces équipant les deux réacteurs EPR sur le site de Taishan, dans le sud de la  Chine, sortent de l'usine du Creusot. Au-delà de la cuve d'acier de Flamanville, l'éventualité de "falsifications" sur la qualité de pièces d'aciers sorties de l'usine d'Areva au Creusot, destinées à contenir la radioactivité, questionne aussi sur la sécurité du parc électronucléaire français en fonctionnement. Ces pièces en acier peuvent être des rotors de turbine, des éléments de cuve, des pièces pour les générateurs, comme ceux qui viennent d'être remplacés à la centrale de Blaye, 35 ans d'âge...

400 dossiers

Sur environ 10.000 dossiers de fabrication, sur une période remontant à une cinquantaine d’années, ce sont 400 dossiers de fabrication de pièces de centrales nucléaires qui auraient été falsifiés dans l'usine du Creusot qui appartient à Areva depuis 2006, après avoir été reprise par Arcelor à la suite de la faillite de Creusot-Loire. Une cinquantaine d'entre elles seraient installées sur le sol français, selon l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) qui a indiqué ce mardi avoir été informée par Areva de ces anomalies. Dans quelles centrales ?

Des premiers tests "bons"

Selon la ministre de l'Environnement Ségolène Royal, les premiers résultats des tests menés par Areva sur son usine du Creusot sont "bons", car ils montrent que les anomalies pointées par l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) concernent les documents et non les pièces elles-mêmes. "J'attends la suite des contrôles avant de constater les faits", a toutefois ajouté ce mercredi la ministre sur RTL. 

Pour le réseau Sortir du nucléaire, qui fustige au passage "l'excellence française dans le nucléaire", que les dossiers de fabrication de pièces destinées à équiper des sites nucléaires vieillissants puissent avoir été bidonnés serait tout simplement "criminel". Areva a demandé un délai de quinze jours pour évaluer l'impact de ces "anomalies". L'ASN publie ensuite les résultats complets des tests.

Cathy Lafon

►LIRE AUSSI

Les commentaires sont fermés.