Biodiversité : la France doit sauver ses libellules !
Une libellule de la famille des Calopterygidae, sur une feuille, dans le nord de l'Allemagne. Photo AFP
Le saviez-vous ? Pour les gracieuses libellules, la vie n'est pas si belle... Au bord des cours d’eau et des étangs, dans les mares et les tourbières, sur les 89 espèces présentes sur le territoire métropolitain, onze espèces de libellules, ou odonates, selon leur nom scientifique, sont aujourd'hui menacées de disparition en France. La bonne nouvelle, c'est qu'on peut encore les sauver.
Cordulie splendide, Agrion bleuissant et Déesse précieuse : retenez bien ces trois noms enchanteurs, car les insectes qui les portent pourraient disparaître de nos paysages, si nous ne faisons rien pour les protéger. Treize autres membres de la grande famille des odonatoptères sont sur le même et triste chemin : ke nombre de libellules menacées pourrait doubler à l’avenir si l'on ne fait rien pour préserver les zones humides où elles vivent, et dont elles dépendent pour se nourrir. Un inquiétant état des lieux publié le 30 mars dernier, résultat d'un travail du Comité français de l’UICN et du Muséum national d’Histoire naturelle, mené en partenariat avec l’Office pour les insectes et leur environnement et la Société française d’Odonatologie, pour la Liste rouge nationale des espèces en danger en France.
Les zones humides, indispensables à la survie des libellules
Quand on vous dit que la Journée mondiale des zones humides, ce n'est pas juste pour faire joli. Innombrables sont les animaux et les plantes dont le cycle de vie est intimement lié à la présence d’eau. C'est le cas des libellules, dont les bébés, les larves, ont besoin du précieux liquide pour se développer. Comme pour trop d'espèces vivantes, si leur situation est préoccupante, c'est parce que leur habitat naturel est mis à mal par les actions humaines. Petit tour d'horizon des menaces qui assombrissent l'avenir des odonatoptères.
Les modifications des cours d'eau
Le dragage du fond des cours d'eau, la rectification et le déboisement de leurs berges, qui entrainent souvent la disparition des bras morts et des prairies humides attenantes, affectent directement les habitats au riche garde-manger où se plaisent à voler les libellules. Ces trois facteurs constituent une forte menace notamment pour la Cordulie splendide, une libellule de grande taille classée "Vulnérable".
Les aménagements des lagunes, des mares et des étangs
Les activités humaines transforment aussi considérablement l'écosystème des mares et des étangs où fourmillent aussi les libellules. Leur comblement dans le cadre d’aménagements, leur entretien par curage, le remodelage de leurs berges et l'artificialisation du littoral affectent notamment le Leste à grands ptérostigmas, qui fréquente les lagunes, mares et étangs saumâtres atlantiques et méditerranéens. Au bord de l'extinction en Poitou-Charentes, cette libellule se trouve désormais classée dans la catégorie "En danger".
La pollution et l'assèchement des eaux
La dégradation de la qualité de l’eau constitue un autre facteur de régression des populations d'odanates. Les pollutions industrielles, agricoles et domestiques, de même que les prélèvements excessifs dans les nappes phréatiques conduisant à un assèchement précoce des ruisseaux et des rivières, sont autant de menaces dans les régions où vit l’Agrion bleuissant classé "En danger", notamment dans le Sud-Est du pays.
Les espèces invasives
Il y aussi les espèces animales exotiques envahissantes, particulièrement friandes des larves des libellules, comme les écrevisses américaines introduites dans l'Hexagone, dont la prolifération perturbe et transforme les habitats naturels humides, notamment dans le Sud-Ouest.
La disparition des tourbières
Enfin, en Europe, de nombreuses espèces de libellules vivent dans les tourbières, un milieu très particulier et original, qui a tendance à disparaître, victime de l'assèchement et du boisement naturel. C’est le cas de la Cordulie alpestre, classée "Quasi menacée", dont les habitats se font de plus en plus rares et morcelés, ou encore de la Déesse précieuse, classée "En danger critique". Le réchauffement climatique en cours ne devrait pas arranger la situation.
Des mesures de préservation à renforcer
Il y a donc bien quelque chose de pourri, au royaume des libellules. Mais pour nos délicates amies ailées, tout n'est pas perdu. Une vingtaine d’espèces d'odonates bénéficient déjà d’un plan national d’actions visant à développer les connaissances à leur sujet et à améliorer leur état de conservation. Au-delà de ces mesures à poursuivre, il faut aussi nécessairement renforcer la préservation des zones humides, leurs habitats.Telles sont les solutions qui sauveront les libellules et avec elles, toute une faune et une flore, à la riche diversité.
Finalement, au regard du fabuleux gain pour l'avenir de biodiversité sur la planète, ce n'est pas cher payé... Sans compter l'ineffable beauté que nous procure le ballet des libellules, qui illumine notre quotidien et qui n'a pas de prix.
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