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Nucléaire : inquiétudes sur l'état des groupes électrogènes de secours des 19 centrales françaises

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Concernant les groupes électrogènes de secours des centrales nucléaires françaises, Paluel (Manche) fait partie des "cancres" pointés par une note interne d'EDF. Photo archives AFP

Selon une information révélée le 11 mars dans le Journal de l'énergie et reprise ce mercredi par Le Parisien Aujourd'hui en France, un document interne d'EDF pointe du doigt l'état de délabrement des groupes électrogènes de secours censés prendre le relais en cas de coupure de courant dans nos 19 centrales nucléaires.

Les groupes électrogènes diesel de secours de nos centrales nucléaires sont censés prendre le relais en cas de coupure d'électricité, quelle qu'en soit l'origine, et continuer à fournir une alimentation électrique à leurs 58 réacteurs. Les enseignements de la catastrophe de Fukushima survenue il y a tout juste cinq ans, le 11 mars 2011, ont démontré le caractère crucial du rôle qu'ils sont appelés à jouer, en cas d'accident, pour assurer la sécurité et les fonctions vitales de la centrale durant quinze jours et notamment le refroidissement du combustible nucléaire.

L'enseignement de Fukushima

 sécurité,accdent nucléaire,edf,polémiqueOr, d'après une note interne d'EDF qui a fuité dans la presse, l'état de ces générateurs est décrit comme étant "à surveiller", "dégradé", voire "inacceptable". Un constat plus qu'inquiétant quand on sait qu'à Fukushima (photo AFP ci-contre), ces diesels avaient été noyés par le tsunami et que la fusion du coeur des réacteurs s'en était suivie en quelques heures. Et quand on se souvient que, lors de la tempête du siècle, en 1999, une grande partie du réseau électrique français étant resté à terre durant au moins un ou deux jours, selon les départements, plusieurs centrales nucléaires françaises s'étaient retrouvées sans électricité. Les diesels avaient alors pris le relais. A Braud-et-Saint-Louis, à une soixantaine de kilomètres de Bordeaux en Gironde, la centrale nucléaire avait également été menacée par la montée des eaux et l'inondation.

En 2014, aucun des systèmes de secours n'a été classé "correct"

Selon cette même note interne, sur l'ensemble de l'année 2014, aucun de ces systèmes de secours n'a été classé en état "correct". Plus grave  : 42,9 % d'entre eux sont "à surveiller", 43,9 % jugés "dégradés" et 13,2 % dans un état carrément "inacceptable". Par "inacceptable", il faut entendre, par exemple, des demandes de travaux de maintenance qui s'accumulent. Parmi les problèmes identifiés, des "fuites d'air ", "d'huile" ou encore "de carburant". La centrale nucléaire de Flamanville (Manche), avec celle de Paluel (Seine-Maritime) fait partie des centrales les plus mal notées.

Les mises en garde de l'ASN

Le patron de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN), Pierre-Franck Chevet, qui a émis des doutes en janvier 2016 sur les capacités des ressources financières et humaines d'EDF à assurer correctement dans un proche avenir l'entretien, la sécurité et le prolongement de la durée de vie du parc électronucléaire français, juge que l'électricien "a des progrès à faire, notamment dans la gestion des anomalies et des délais éventuels de réparations".  EDF reconnaît d'ailleurs devoir effectivement remplacer une partie des composants, et assure organiser ces travaux avec ses ressources internes ou en faisant appel à des sous-traitants spécialisés qui viennent en renfort. 

Alors, l'état des centrales nucléaires françaises est vraiment"dégradé"?

Interrogé ce matin sur France Info par la journaliste Anne-Laure Barral, Philippe Sasseigne, directeur de la production nucléaire France d'EDF s'est efforcé de relativiser la portée inquiétante des mots utilisés dans la fameuse note interne à son entreprise. De nombreux essais sont effectués régulièrement à titre préventif, destinés à noter tout ce qui doit être amélioré, explique-t-il et le terme "inacceptable" a surtout "vocation à améliorer la maintenance". "La situation n'est pas inquiétante", car "de nombreux diesel fonctionnent correctement. Si ce n'est pas le cas, on arrête le réacteur, ce qui est d'ailleurs déjà arrivé", souligne-t-il. "La maintenance étant très exigeante, ces matériels retournent en usine tous les 15 ans pour une remise à neuf" explique-t-il encore. Bref, pas de quoi s'inquiéter pour EDF.

Pas vraiment sur la même longueur d'ondes, on s'en doute,  le Réseau sortir du nucléaire dénonce pour sa part dans un communiqué, "cet exemple de dégradation des installations", qui "conforte la nécessité de l'arrêt des réacteurs vieillissants, ceux qui ont dépassé leur durée de fonctionnement initialement assignée".

10 ans de plus pour les centrales nucléaires, est-ce bien raisonnable ?

On peut se demander d'où vient la fuite qui rajoute une couche aux dossiers noirs atomiques, déjà bien fournis, de l'électricien français, en plein marasme financier. Reste que la note existe. Quel que soit le sens que l'on veuille donner aux mots - "délabré" et "inacceptable" ne signifient peut-être pas la même chose dans la langue EDF que dans le langage courant - reste qu'elle est carrément embêtante, au moment où EDF, avec l'aval de la ministre de l'Ecologie,  Ségolène Royal, veut prolonger d'au moins 10 ans, la durée de vie des réacteurs qui atteignent l'âge de trente ans.

D'autant que, pour l'ASN, dans un certain nombre de centrales, les moyens humains et le savoir-faire qui va avec sont dores et déjà aujourd'hui insuffisants.

Cathy Lafon

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