#Sivens : il y a un an, la mort de Rémi Fraisse
Rémi Fraisse est décédé le 26 octobre 2014, après une manifestation contre le projet de barrage de Sivens, dans le Tarn. Archives AFP
Rémi Fraisse, un jeune botaniste, militant pacifiste écologiste de 21 ans (photo ci-contre), est mort dans la nuit du 25 au 26 octobre 2014, peu avant 2 heures du matin, sur le site de la construction contestée du barrage de Sivens (Tarn), après avoir été atteint par une grenade offensive lancée par un chef de groupe du 4e peloton de l’escadron de gendarmerie mobile de La Réole (Gironde). Depuis plusieurs heures, des gendarmes mobiles retranchés affrontaient de petits groupes de manifestants. Dans l’après-midi du 25, un grand rassemblement avait réuni opposants et personnalités politiques à plusieurs centaines de mètres de là.
"L'enquête recule"
Dans son édition en ligne du 23 octobre 2015, le journal "Le Monde", qui a pu prendre connaissance du retour de commission rogatoire déposé en mars par l’Inspection générale de la gendarmerie nationale (IGGN) sur le bureau de la juge Anissa Oumohand, chargée de l’instruction ouverte pour "violences par une personne dépositaire de l’autorité publique ayant entraîné la mort sans intention de la donner", dénonce une enquête de la gendarmerie "bâclée". "Le Monde" explique qu'au lieu d'avancer, même lentement, comme souvent dans les enquêtes pour violences policières, "l'enquête sur la mort de Rémi Fraisse recule". Le quotidien national écrit que "Pour l’essentiel, les gendarmes n’ont pas enquêté sur les faits, mais sur le climat qui régnait sur la ZAD (zone à défendre) du projet de barrage de Sivens dans les semaines qui les ont précédés – dont la violence justifierait la réplique de la nuit du 25 au 26 octobre – et sur la personnalité de la victime – totalement et irrémédiablement pacifique".
Contradictions et zones d'ombre
"Le Monde" relève les contradictions de la thèse officielle évoquée par les ministres Bernard Cazeneuve et Manuel Valls dans les jours qui ont suivi la mort du jeune militant écologiste, selon laquelle, à Sivens, les gendarmes ont riposté "à des violences caractérisées, croissantes et incessantes". Les magistrats, assure le quotidien, ont refusé aux avocats de la famille de Rémi Fraisse, Mes Claire Dujardin et Arié Alimi, les auditions du préfet et de son directeur de cabinet, pourtant responsables des opérations de maintien de l’ordre, au prétexte que "très indirectement liées aux faits" elles ne seraient "pas, en l’état, utiles à la manifestation de la vérité". "Aucun acte d’investigation n’a été ordonné depuis mars", pointe encore le site du "Monde".
Un monument à la mémoire de Rémi Fraisse, érigé en une nuit sur le site du barrage de Sivens à Lisle-sur-Tarn, le 20 octobre 2015. Photo AFP
Et le barrage ?
Le 16 janvier 2015, Ségolène Royal, a finalement laissé tomber le projet initial de barrage à Sivens, contesté sur le plan environnemental depuis plusieurs années par des associations locales. Il "n'apparaît pas comme une solution adaptée", concluait un nouveau rapport remis à la ministre de l'Ecologie, qui a affirmé que sa réalisation n'était "plus d'actualité", en précisant, par ailleurs, qu'elle "validait" les "nouvelles solutions proposées" dans le rapport. La France échappait ainsi à une nouvelle mise à l'index par l'Europe sur l'environnement : la Commission européenne avait annoncé, le mercredi 26 novembre 2014, l'ouverture d'une procédure d'infraction contre le pays pour non-respect de la législation européenne dans ce projet controversé et "violation présumée de la directive européenne sur l'eau". Les deux options présentées dans le rapport des experts devaient, elles, faire l'objet d'études plus approfondies par des maîtres d'ouvrages locaux avant un choix définitif.
Le rapport accablant de la Ligue des Droits de l'Homme
De son côté, la Ligue des Droits de l'Homme a constitué une commission d'enquête citoyenne pour tenter, de son côté, de comprendre les circonstances du drame en étudiant les opérations de maintien de l'ordre menées autour de Sivens. Pour cela, 34 militants ont été entendus et des blogs et vidéos ont été pris en compte et la LDH dénonce "une violence considérable" dans un "rapport d'enquête citoyen", accablant sur les circonstances qui ont conduit au drame.
Sa famille, toujours dans l'expectative et dans la douleur, pleure Rémi Fraisse. Les écologistes, eux, n'ont pas oublié que l'un des leurs a laissé sa vie pour lutter contre la construction d'une infrastructure qui s'avère bel et bien inadaptée, ainsi qu'ils l'ont dénoncé depuis des années.
#RémiFraisse #Sivens
A LIRE
- Jean-Pierre Fraisse : "On a utilisé contre mon fils une grenade de guerre", entretien sur France Bleu Toulouse, 22 octobre 2015.
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