Le changement climatique devrait décupler les effets dévastateurs de La Niña
Inondations, sécheresses : le réchauffement climatique devrait intensifier les catastrophes naturelles. Photo NASA
Connaissez-vous La Niña ? Il s'agit d'un phénomène climatique qui provoque périodiquement sécheresses et orages dévastateurs et qui, contrairement à ce que son nom pourrait le laisser croire, n'est ni petit, ni mignon... Il va falloir s'habituer à le voir s'inviter plus régulièrement sur la planète : selon les scientifiques, le réchauffement climatique en accentuera probablement la fréquence et la violence au XXIe siècle, provoquant davantage de pluies en Asie du Sud-Est et un climat plus frais et sec en Amérique latine.
Qu'est-ce que La Niña ?
La Niña (la "fillette" en espagnol) intervient environ tous les quatre à cinq ans dans l'océan Pacifique, le long de l'Equateur, et dure un à deux ans. Elle suit généralement un autre épisode climatique extrême d'El Niño ("petit Jésus"), qui pourrait aussi de son côté devenir plus récurrent et plus violent. Au contraire de son frère jumeau qui atteint son apogée au moment de Noël et se traduit par une sécheresse en Asie et de fortes pluies sur l'Amérique latine, La Niña se caractérise par des températures de surface froides dans la partie centre-est de l’océan Pacifique, et par une différence plus grande avec la température de la terre dans des pays du Pacifique ouest comme l’Indonésie, la Malaisie, les Philippines, Singapour, le Bangladesh et le Vietnam.
Comment ça marche ?
Concrètement, les vents alizés qui soufflent d'est en ouest, de l'Amérique vers l'Asie et l'Ausralie, poussent avec eux les eaux chaudes en surface. Parallèlement, pour les remplacer les eaux froides des profondeurs remontent le long de la côte de l'Amérique latine : résultat, de fortes pluies en Asie du Sud-Est et la sécheresse en Amérique latine. La Niña exceptionnelle de 1998 et 1999, qui avait suivi un El Niño tout aussi exceptionnel en 1997 et 1998 (photo AFP ci-contre) avait ainsi transformé les sécheresses en inondations dans les pays du Pacifique ouest, et le temps humide en grave sécheresse dans le sud-ouest des Etats-Unis.
Les effets du réchauffement climatique
Le réchauffement climatique pourrait augmenter le contraste entre les températures de l’eau et de la terre qui a une influence sur le flux d’air atmosphérique et les précipitations. Une différence plus forte entraîne plus de précipitations dans les pays du Pacifique ouest et un temps plus sec pour les Amériques, écrivent les auteurs. Dans une étude parue dans la revue Nature Climate Change, les climatologues de l'Ocean University of China à Shadong, estiment que les épisodes météorologiques exceptionnellement sévères comme celui qui avait fait des milliers de morts et des millions de déplacés en 1998 et 1999, seront presque deux fois plus fréquents au XXIe siècle qu’au XXe.
Des prévisions basées sur le scénario le plus pessimiste du Giec
Réalistes à défaut d'être optimistes, les chercheurs ont basé leurs calculs sur le scénario le plus pessimiste en matière de réchauffement climatique qu'écrirait pour la planète l'humanité si elle continuait à émettre des gaz à effet de serre au rythme actuel. Soit une élévation de la température moyenne sur Terre de +3,7°C d'ici à la fin du siècle, selon le Groupe intergouvernemental d’experts du climat (Giec). Dans cette hypothèse, si les émissions de gaz à effet de serre ne diminuent pas, les chercheurs ont modélisé l'apparition d'un phénomène La Niña « extrême » en moyenne tous les 13 ans, au lieu d'une fois tous les 23 ans, comme c'était jusqu'à présent le cas.
De graves conséquences socio-économiques
« Cela signifie davantage d’événements météorologiques dévastateurs et plus fréquemment des changements d’un extrême à l’autre, d’une année sur l’autre, avec de profondes conséquences socio-économiques », soulignent les chercheurs, dont l'étude a été réalisée à l’aide de 21 modèles climatiques. Selon eux, en moyenne, pour la période 2000-2099, il devrait y avoir huit épisodes extrêmes de La Niña. Une prévision à prendre avec prudence, toujours selon les scientifiques: les deux événements El Niño et La Niña restent encore mal connus, faute de mesures fiables avant le début des émissions de gaz à effet de serre.
Le plus beau démenti de ses prévisions pessimistes pourrait provenir de la réussite de la conférence de Paris sur le climat, fin décembre, qui s’est fixé pour objectif de limiter cette hausse à +2°C par rapport à l’ère pré-industrielle. Croisons les doigts.
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