Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

andré cicolella

  • Cancer : pour le toxicologue André Cicollela, on peut faire reculer l'explosion de la maladie

    cicolella.jpg

    André Cicolella. Photo archives Sud Ouest/Stéphane Lartigue

    Le journal "Le Monde" a publié ce mercredi des chiffres plus qu'inquiétants sur l’évolution du cancer depuis les années 80, qui montrent que la maladie touche les populations de plus en plus jeunes. Pour André Cicolella, chimiste, toxicologue et lanceur d'alerte, le vieillissement et l'amélioration du dépistage ne peuvent expliquer que très partiellement  "l'épidémie" de cancers : "Si certains cancers se multiplient, comme ceux du sein ou de la prostate, c'est que les facteurs de risques présents dans notre environnement quotidien se sont aussi multipliés", explique-t-il.

    "Les facteurs environnementaux sous-estimés par les autorités"

    Cancer-couve-1C-240x313.jpgL'ancien conseiller scientifique à l'Ineris et enseignant en santé environnementale à Sciences Po Paris, qui vient de publier "Cancer du sein, en finir avec l'épidémie", dans le cadre d'Octobre rose, travaille depuis des années sur la question. S'appuyant sur les enquêtes scientifiques les plus récentes, il a a passé au crible tous les facteurs environnementaux, du DDT des années 1950 au bisphénol A, en passant par l'alimentation, la sédentarité ou le conditions de travail. Pour le toxicologue, qui appelle de ses voeux la création d'un Giec de la santé environnementale, à l'instar du climat, les autorités des pays développés sous-estiment totalement les facteurs environnementaux dans l'explosion de la maladie.

    Les enseignements du critère de l'âge

    "On disposait des données globales concernant l’évolution mais pas par tranche d’âge", explique-t-il en commentant les chiffres publiés par "Le Monde", qui révèlent des évolutions très contrastées selon les générations, principalement pour les cancers hormono-dépendants, du sein et de la prostate. La progression a été continue pour les femmes 30-39 ans (+ 65%), de 40-49 ans (+ 58%), alors qu’après avoir connu un pic en 2002 -2004, le nombre de nouveaux cas a diminué pour les tranches d’âge 50-59 ans et 60-69 ans.

    Le nombre de cancers du sein dans le monde a doublé entre 1990 et 2013. La Belgique connaît 22 fois plus de cas que le Bhoutan et en France, le risque pour une femme entre 30 et 44 ans de mourir d'un cancer du sein est 4 fois plus élevé que de mourir d'un accident de la route, rappelle le toxicologue. "Cette croissance ne peut évidemment s’expliquer que très partiellement par le vieillissement de la population, argument utilisé généralement pour expliquer la croissance, mais pas non plus par le dépistage qui concerne les femmes de 50 à 69 ans", analyse-t-il.

    Pour la prostate, la croissance est encore plus spectaculaire : + 1033% pour les 50-59 ans. Là aussi, insiste André Cicollela, "le dépistage ne peut à lui seul expliquer cette croissance, car la croissance est moins forte dans les classes d’âge 60-69 ans (+437%) et 70-79% (+180%)". Par ailleurs, le cancer du testicule, autre cancer hormono-dépendant progresse de 176% chez les 30-39 ans, alors qu’il n’y a pas de dépistage.

    Bébés pré-pollués ?

    Pour lui, ces données confirment l’importance du lien entre cancer et environnement. "Le développement du cancer chez les jeunes adultes correspond à des générations exposées in utero aux substances chimiques du type perturbateurs endocriniens", pointe-t-il. Les biberons, comme les résines polyépoxy dans contenants alimentaires au bisphénol A ont commencé à être utilisés massivement à partir des années 70 et on sait que "les expositions de l’espèce humaine sont de même niveau que celles qui induisent des tumeurs mammaires chez le rat et la souris après exposition maternelle", précise-t-il.

    Eradiquer les principaux perturbateurs endocriniens

    « Il est temps que l’Institut National du Cancer se préoccupe sérieusement des causes environnementales du cancer ». André Cicolella.

    La bonne nouvelle, pour le toxicologue, qui prône une révolution de la santé, qui doit soigner mais aussi prévenir en s'attaquant aux causes, c'est qu'il n'y a pas de fatalité et qu'il est possible de faire reculer l'explosion de la maladie. A condition de bien identifier les causes et de mener les politiques publiques adéquates. Promouvoir une bonne alimentation et une bonne hygiène de vie, diminuer le stress au travail... et supprimer du quotidien les molécules chimiques dangereuses pour la santé. "Plus que jamais, il est nécessaire d’éliminer de notre environnement les perturbateurs endocriniens", insiste-t-il, en soulignant le rôle leader qu'a joué la France dans ce domaine. La deuxième phase de la Stratégie Nationale Perturbateurs Endocriniens devrait être, selon lui, lui l’occasion de fixer un cap ambitieux : l’éradication des principaux perturbateurs endocriniens comme le bisphénol ou les phtalates.

    Cathy Lafon

    ►A LIRE

    • "Cancer du sein : en finir avec l'épidémie", André  Cicolella, éd. Les Petits Matins, 10 euros.

    ►LIRE AUSSI

    ►PLUS D'INFO

    • Les scientifiques du réseau Habitat Santé Environnement (HSEN), auquel appartient la Bordelaise Isabelle Farbos, docteur en génétique et biologie moléculaire, ont mis en place un protocole "Maternité saine". Parmi les actions : mettre en place un nettoyage des locaux sans perturbateurs endocriniens, ni CMR, distribuer des cosmétiques bébé sans perturbateur endocriniens, sélectionner un doudou sans plastique, sans rembourrage (présence de bromés contre le feu, de formaldéhyde contre les moisissures), sélectionner les peintures sans COV pour rénover les lieux, sélectionner les matériaux pour la nouvelle construction.

    ►EN CHIFFRES

    • Le cancer du sein en France : au 1er rang de cancers en terme de fréquence (33,5% de l'ensemble des nouveaux cas de cancer). 53 000 nouveaux cas par an. 11 500 décès par an. 75% se déclarent après 50 ans. Source Globocan2012 (IARC) : la Ligue contre le cancer.
  • Maladies chroniques: André Cicolella lance l'alerte dans le livre "Toxique Planète"

    pollution,maladie,fertilité,edition,rencontre,andré cicolella

    André Cicolella, photo archives Sud Ouest/Stéphane Lartigue

    couv toxique planète.jpgAndré Cicolella, le président du Réseau environnement santé, présente aujourd'hui en Gironde son dernier ouvrage, "Toxique Planète, le scandale invisible des maladies chroniques", publié aux éditions du Seuil.

    Deux rencontres sont prévues avec le toxicologue à l'origine de l'interdiction du bisphénol A dans les biberons et les contenants alimentaires, de l'interdiction du trichloréthylène dans les pressings ou de la prise de conscience des effets de l'aspartame. La première à 15h00 à la librairie La Machine à lire, à Bordeaux, la seconde à 19h30 à Libourne, au Grand Café de l'Orient, pour un débat avec Caroline Chenet-Lis, agricultrice à Saujon, Charente Maritime et vice-présidente de l’Association Phyto-victimes, dont le mari est décédé à cause de l'emploi de pesticides.

    pollution,maladie,fertilité,edition,rencontre,andré cicolellaLa progression exponentielle des maladies chroniques et des cancers en France

    Aujourd’hui, selon le chercheur, deux décès sur trois dans le monde sont le fait des maladies chroniques : maladies cardio-vasculaires ou respiratoires, cancers, diabète... En France, ces maladies progressent quatre à cinq fois plus vite que le changement démographique. Les cancers déferlent : 1.000 nouveaux cas surgissent toutes les vingt-quatre heures en France. Une progression de 89% entre 1980 et 2006. Le cancer touche un homme sur deux et deux femmes sur cinq et les coûts générés font imploser les systèmes de santé. En 2015, 70% des dépenses de la Sécurité sociale iront à la prise en charge de ces maladies chronique, non transmissibles, qui continuent leur irrésistible progression.

    cancersein.jpgHalte aux idées reçues

    Dans son dernier livre, André Cicolella lance l'alerte. Ces maladies chroniques en expansion ne sont ni un simple effet du vieillissement, ni une fatalité : notre environnement moderne est en cause. Des milliers de molécules chimiques l’ont contaminé mais aussi la malbouffe, la sédentarité, la pollution urbaine, le travail précaire et stressant et les inégalités au Nord comme au Sud. Durant quarante ans, le toxicologue a récolté et analysé des monceaux de données statistiques. Ce qui lui permet de battre en brèche bon nombre d'idées reçues. L'augmentation des maladies comme les cancers n'est pas due au seul vieillissement de la population. Au contraire, le cancer du sein, par exemple, touche des femmes de plus en plus jeunes. De même, les Français ne sont pas tous égaux devant le risque de la maladie. Selon les régions et les départements où l'on habite, on est plus ou moins exposés à telle ou telle pathologie.

    pesticides vignes épandage.jpgLa pollution de notre environnement est en cause

    Si tel est le cas, c'est bien parce que le contexte environnemental, selon André Cicollela, serait à l'origine de plus de 50 % des cancers constatés. Les émissions toxiques d'origine agricole, avec l'usage des pesticides notamment, les pollutions industrielles ou urbaines, souvent invisibles, avec les particules fines émises par les moteurs diesel, varient fortement d'une région à l'autre. Ce qui expliquerait pourquoi, par exemple, dans les départements agricoles et viticoles, les taux de certains cancers sont supérieurs à la moyenne nationale : en Aquitaine, le chercheur note ainsi une grande prévalence des cancers et surtout des tumeurs cérébrales, sans doute due aux pesticides. Mais aussi pourquoi, les maladies respiratoires sont en expansion dans les grandes zones urbaines. Ou encore pourquoi l'infertilité en France augmente à la vitesse grand V : 14 % des couples ne pouvaient concevoir après douze mois sans contraception en 1991, ils sont aujourd'hui de 18 % à 24 %. Selon une étude française publiée en 2012, la diminution du nombre de spermatozoïdes pour un homme de 35 ans a baissé de 32,2% de 1989 à 2005...

    Pour l'économie et notre bien-être

    La médecine sous nos latitudes soigne de mieux en mieux, et c'est tant mieux. Mais à l'heure où l'on tente à tout prix de préserver notre système de santé et de sauver l'Assurance-maladie, plutôt que de réduire les dépenses en dé-remboursant tel ou tel médicament ou de sabrer dans les financements de l'hôpital, ne vaudrait-il pas mieux s'attaquer aux causes de ce qui constitue une véritable "catastrophe sanitaire" ? 83% des dépenses remboursées par l'Assurance-maladie sont attribués aujourd'hui aux maladies chroniques, rappelle André Cicollela, pour qui la question est aussi économique.

    "Toxique planète" met en garde la société française : il est plus que temps de réagir en luttant efficacement contre la pollution chimique généralisée. Pour notre santé, notre bien-être et aussi la Sécu.

    Cathy Lafon

    PRATIQUE Rencontre-décidace avec André Cicolella à 15h00 à la librairie La Machine à lire, à Bordeaux. Réunion publique et débat avec Caroline Chenet-Lis, vice-présidente de l'association Phyto-victimes et élue à la chambre d'agriculture, Dominique Técher viticulteur Bio, vice-président de l’Association Agrobio 33 et François Dupont, animateur EELV Aquitaine, Commission Santé et Environnement, Commission Europe, à 19h30 à Libourne, au Grand Café de l'Orient. 

    LE LIVRE "Toxique planète, le scandale invisible des maladies chroniques", Le Seuil, collection Anthropocène, 19€.

    L'AUTEUR André Cicolella est chimiste, toxicologue, conseiller scientifique à l'Institut national de l'Environnement et des Risques (INERIS) et enseignant à l'École des affaires internationales de Sciences Po Paris. Il est cofondateur et président du Réseau environnement santé  qui est à l'origine de l'interdiction du bisphénol A dans les biberons et les contenants alimentaires, de l'interdiction du trichloréthylène dans les pressings ou de la prise de conscience des effets de l'aspartame.  Premier président de la Fondation Sciences Citoyennes, il a déjà publié notamment "Alertes Santé" (Fayard, 2005) et  "Le défi des épidémies modernes " (La Découverte, 2007).

    PLUS D'INFO

    LIRE AUSSI