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"Sécurité nucléaire : le grand mensonge", l'enquête choc à regarder ce soir sur ARTE

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"Sécurité nucléaire : le grand mensonge". Photo Arte

Avec "Sécurité nucléaire : le grand mensonge", Eric Guéret signe avec Laure Nouhalhat, une enquête choc qui pointe les défaillances du secteur en matière de sécurité. 

 

Secret défense

Alors que les accidents de Tchernobyl ou de Fukushima ont alerté sur la sûreté nucléaire, la sécurité des installations, classée secret défense, reste encore entourée d'un épais mystère. "Ce silence dépasse le domaine de la sécurité. Les citoyens ne sont pas informés sur le nucléaire dans son ensemble. A cause de ses origines militaires, cette industrie a toujours été couverte par le secret. Aujourd'hui, pour ne pas risquer d'informer un ennemi potentiel: il ne faut rien dire : au prétexte de la sécurité, on brandit le secret défense", dénonce Eric Guéret, auteur de deux documentaires sur l'industrie nucléaire pour ARTE. Un argument que le film, après deux ans d'enquête, réfute : ceux qui souhaiteraient perpétrer un attentat ont tous les moyens nécessaires en terme d'investigation et d'experts pour s'informer. Sans compter l'argent, le nerf de la guerre, qui semble faire justement cruellement défaut à l'industrie nucléaire, désormais incapable de sécuriser des installations extrêmement dangereuses.

Glaçant

Des États-Unis à l'Allemagne en passant par la France et la Belgique, cette enquête révèle les failles abyssales des systèmes de protection de sites nucléaires, conçus pour la plupart avant les attaques du 11-Septembre. Selon le vice-amiral Georges-Henri Mouton, interviewé dans le film, le secret défense cache d'énormes vulnérabilités face à d'éventuelles attaques commandos terrestres. En témoignent ces activistes de Greenpeace qui ont réussi à pénétrer sur le site de Cattenom et à tirer un feu d'artifice au pied des piscines de refroidissement de combustible irradié, avant même l'intervention des gendarmes. La cybersécurité, trop lente à se  mettre en place, ou encore la défense aérienne, sont deux autres fragilités extrême pointées par cet expert, directeur général adjoint chargé des missions relevant de la défense de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN). Contrairement au mythe entretenu par l'industrie nucléaire, en cas d'attaque aérienne, ou tout simplement en cas d'accident et de chute d'un avion de ligne, les réacteurs nucléaires ne résisteraient pas. Quant aux petits avions civils, moins contrôlés et plus rapides, ou encore les drones, ils font peser des risques tout aussi importants. On veut nous rassurer, en affirmant que "les drones ne sont pas dangereux", relève Eric Guéret, car ils seraient "incapables de transporter des charges". Encore un mythe qui tombe : faux, montre le film. Ces engins peuvent embarquer jusqu'à 40 kilos de matériel et donc, potentiellement, des explosifs. Chacun a en mémoire les multiples survols des centrales nucléaires françaises par des drones restées inexpliquées.

Des piscines de refroidissement bien fragiles

Le grand point faible des centrales, ce sont les piscines de refroidissement des combustibles, beaucoup moins protégées que les réacteurs. L'ONG Greenpeace, spécialiste des actions coup de poing sur les sites nucléaires pour dénoncer l'insuffisance de leurs systèmes de sécurité, l'a également prouvé à plusieurs reprises ces mois derniers. Même le transport des matières fissiles n'échappe pas à ce passage en revue sans concession des dangers structurels de l'industrie nucléaire françaises. Le plutonium, une des matières les plus dangereuses au monde, est fabriqué à La Hague dans la Manche, mais transformé à Marcoule, dans le Sud-Est, à 800 km à vol d'oiseau... Chaque semaine un convoi de plutonium traverse donc l'Hexagone, sans qu'il soit possible de le sécuriser totalement.

Bref, commandos terrestres, avions suicides, attaques par des drones, cyberattaques... Implacable, l'enquête du documentaire déroule sa démonstration: aucun dispositif n’est à la hauteur pour prévenir le risque terroriste. En témoignent les experts, membres de Greenpeace et politiques interrogés par les réalisateurs. D'autant que l'industrie nucléaire, au bord de la faillite en France, en Europe ou encore aux Etats-Unis, n'a pas les moyens financiers de mieux sécuriser ces installations sur une très longue durée. Y compris après la fermeture des sites, car les combustibles vont y rester. Et pour des décennies.

"L'évolution du risque terroriste en quarante ans change tout"

Lanceur d'alerte, le film en fait la preuve : incompatible avec le contexte terroriste actuel, le nucléaire va droit vers une catastrophe financière. Il vient appuyer les conclusions plus qu'alarmantes de sept experts internationaux des questions nucléaires et du terrorisme, mandatés durant dix-huit pois par Greenpeace pour échafauder les pires scénarios d'attaques sur nos 19 centrales nucléaires. Selon leur rapport final, remis en octobre 2017 : "nous connaissons un déficit historique de la protection de nos installations, et notamment des piscines de refroidissement..../... A l'époque du lancement du programme nucléaire français, l'attention a été portée uniquement sur le risque d'emballement du coeur du réacteur. L'évolution du risque terroriste en quarante ans change tout. » 

On l'a compris, pour les réalisateurs, le nucléaire, il faut en sortir, en reconnaissant qu'il est dangereux et qu'il n'est pas compétitif tant ses coûts pour la sécurité seront hors budget. Mais ce sont bien les citoyens qui doivent pouvoir décider, en toute connaissance de cause, s’ils assument ce risque. Ou pas. Captivante autant qu’alarmante, cette enquête devrait les y aider.

Cathy Lafon

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