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Nuage radioactif russe détecté en France : retour sur un "incident" qui a bien contaminé l'Europe et la France

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La centrale nucléaire de Saint-Pétersbourg (Russie) en 2013. Photo archives AFP

Trente ans après la catastrophe nucléaire majeure de Tchernobyl en Ukraine, il semble que la Russie n'ait pas beaucoup évolué sur le sujet de la transparence... C'est finalement la conclusion la plus alarmante (pour nous) à tirer d'un "'incident" nucléaire récent, selon l'expression consacrée. A savoir le survol de la France par un mystérieux nuage radioactif fin septembre début octobre, en provenance de la Russie dont les autorités auront mis 50 jours à avouer qu'elle était bien à l'origine de la pollution radioactive détectée. Sans pour autant reconnaître qu'un incident ou une panne s'était produit sur leurs installations nucléaires. Cela ne console pas vraiment, mais la bonne nouvelle (si l'on peut dire), c'est que ceux qui en doutaient encore sont définitivement rassurés sur les capacités d'observation et d'analyse des institutions européennes qui surveillent la radioactivité dans l'atmosphère. Dont, en  France, l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) qui avait bien élucidé le mystère de cette pollution. Bref, l'IRSN est au top ! Explications.

nuage radioactif,pollution radioactive,nucléaire,irsnk,russie,europeFin septembre début octobre, un mystérieux nuage radioactif avait été détecté en Europe et notamment en France, composé de ruthénium-106. Au vu des résultats d'une étude de 368 mesures issues de 28 pays européens, plusieurs réseaux européens de surveillance de la radioactivité dans l’atmosphère dont, en France, l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), avaient alors évoqué la possibilité que la pollution viennent de Russie, vraisemblablement de l'Oural. Mais le pays avait alors refusé de confirmer qu'il était à l'origine de la fuite. Mi-octobre, Rosatom, l'agence fédérale de l'énergie atomique qui gère l’activité de toutes les entreprises du secteur nucléaire en Russie, avait assuré dans un communiqué que « dans les échantillons relevés du 25 septembre au 7 octobre, y compris dans le sud de l’Oural, aucune trace de ruthénium-106 n’a été découverte à part à Saint-Pétersbourg ».

L'IRSN en pointe

Le 9 novembre, l'IRSN qui n'avait pas lâché l'affaire, publiait sur son site Internet une note d'information qui rappelait que le nuage radioactif n’était plus détecté en France depuis le 13 octobre, que « les niveaux de concentration dans l’air en ruthénium-106 qui ont été relevés en Europe et a fortiori en France étaient sans conséquence tant pour la santé humaine que pour l’environnement » et enfin, que la zone de rejet « la plus plausible se situait entre la Volga et l’Oural ». En raison de la quantité importante du rejet, l’institut estimait qu’il était dû à un accident. Compte tenu de la nature des radionucléides relevés, l'IRSN excluait la possibilité d'un rejet issu d'un réacteur nucléaire et retenait plutôt l'hypothèse d'un rejet par "des installations du cycle du combustible nucléaire ou de fabrication de sources radioactives".  Les autorités russes avaient alors répondu "ne pas être au courant d'un accident sur leur territoire".

C'était pourtant bien vu de la part de l'institut français, premier à suspecter l’origine de la pollution. Champion modèle mathématique de la « modélisation inverse », un champ scientifique dans lequel les Français sont pionniers, qui consiste à reconstituer le passé au lieu d'anticiper l'avenir, l'IRSN s'est servi des  conditions météorologiques fournies par Météo France et des résultats de mesures radiologiques de voisins européens,  pour déterminer l’origine de la pollution radioactive constatée. Et avait raison.

Ce lundi, Rosguidromet, une agence météorologique russe, a fini par confirmer qu'une concentration très élevée de ruthénium-106 avait été détectée entre le 25 septembre et le 1er octobre sur son territoire, dans le sud de l’Oural, la région suspectée par l'IRSN comme étant à l’origine de la fuite. « Le radio-isotope Ru-106 a été détecté par les stations d’observation d’Arguaïach  et de Novogorny » entre le 25 septembre et le 1er octobre, a précisé l’agence dans un communiqué, ajoutant qu’à Arguaïach, un village du sud de l’Oural situé à 30 kilomètres du complexe nucléaire Maïak, touché par un des pires accidents nucléaires de l’histoire en 1957 et servant aujourd’hui de site de retraitement de combustible nucléaire usé, « une concentration extrêmement élevée » de ruthénium-106 « excédant de 986 fois » les taux enregistrés le mois précédent avait été détectée.

En France, l'incident aurait probablement été classé 5 sur une échelle de 7, au regard de l’ampleur de la pollution. Le ruthénium-106 a ensuite été détecté au Tatarstan puis dans le sud de la Russie, avant qu'il ne se fixe à partir du 29 septembre dans tous les pays européens, à partir de l'Italie et vers le nord de l'Europe et n'atteigne le Sud-Est de la France le 2 octobre.

carte nuage radiactif1.jpg

Carte IRSN

Pour notre santé, c'est grave ?

Vu les taux relevés en Europe et en France, non, selon l'IRSN. "Parmi les produits de fission, le ruthénium-106 fait partie de ceux les moins disponibles pour l'absorption par les plantes". Le ruthénium n’étant pas un analogue d’un élément biologique essentiel, son absorption par les plantes est faible et les productions animales (lait, viande) ne sont alors que très faiblement contaminées. D’après les estimations de l’Institut, pour cet événement, seuls les champignons cueillis dans une zone de 40 kilomètres autour du site ayant rejeté du ruthénium sont susceptibles de présenter une contamination supérieure aux normes européennes. La Suisse a enregistré une quantité maximum de 1900 micro-Bq/m3. C’est 350 fois inférieur à la limite d’émissions dans l’air fixée pour ce radionucléide dans l’Ordonnance sur la radioprotection. La quantité en France étant 38 fois inférieure à celle de la Suisse, il n’y a par conséquent aucun risque pour la santé de la population française ou suisse, garantit l'IRSN. Ce qui n'est sûrement pas le cas pour les populations russes résidant à proximité du site de l'"incident".

Dans un communiqué publié sur son site internet, Greenpeace Russie a appelé Rosatom à « mener une enquête approfondie et à publier des données sur les évènements arrivés à Maïak ». » L'ONG a ajouté qu'elle enverrait une lettre au parquet pour demander l’ouverture d’une enquête sur la dissimulation éventuelle d’un incident nucléaire », ajoute ce communiqué publié sur le site internet de l’association. Ce mardi, au lendemain des déclarations de l’agence de météorologie Rosguidromet, le conglomérat nucléaire public russe Rosatom a affirmé que la Russie n'avait enregistré aucun incident ni panne sur ses installations nucléaires... Contradictions, mensonges... Têtus, les Russes.

Cathy Lafon

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