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Sivens (Tarn) : le projet de barrage était "illégal", tranche la justice

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Sur le site de Sivens, en 2014. Photo archives AFP

En juillet 2014, la Commission européenne avait jugé le projet du barrage de Sivens (Tarn) en infraction avec la directive européenne sur l'eau. Plus d'un an et demi après la mort de Rémi Fraisse, l'évacuation de la ZAD et l'abandon du projet initial, la justice française donne raison aux opposants d'un projet qu'elle juge "surdimensionné", d'un "coût élevé" et porteur d'"atteintes graves" à l'environnement. Et dont elle réfute "l'utilité publique".

Le tribunal administratif de Toulouse a annulé ce vendredi 1er juillet l’intégralité des autorisations administratives délivrée sur le site du barrage de Sivens, soit trois arrêtés. L’arrêté de déclaration d’utilité publique (DUP) de 2013 de la retenue d’eau de Sivens, et deux autres concernant l'aspect environnemental du dossier : l'un permettait de déroger à la loi sur la protection des espèces protégées et l’autre autorisait le défrichement de la zone.

"Il aura fallu un mort pour que tout s'arrête"

Le "surdimensionnement" du projet, ainsi que son "coût élevé" et ses "atteintes graves" à l'environnement "excèdent l'intérêt de l'opération", a estimé le tribunal. Autant de points déjà soulevés par la ministre de l'Ecologie Ségolène Royal, lors de sa décision d'abandonner le projet dès janvier 2015. "C'est la confirmation par la justice que ce projet était bien illégal et que, donc, les opposants, y compris les zadistes, avaient raison", a réagi Ben Lefetey, porte-parole du Collectif Testet, qui réunit de nombreux opposants et qui n'oublie pas le jeune écologiste Rémi Fraisse, décédé le 26 octobre 2014 dans l'explosion d'une grenade de la gendarmerie lors d'affrontements sur le chantier du barrage. "Il aura fallu un mort pour que tout s'arrête", déplore aussi l'opposant pour qui la victoire juridique a un goût amer.


Sivens: 300 zadistes évacués par les gendarmes

"Pas de compensation mais une remise en l'état"

Les juges ont, en revanche, rejeté le recours déposé par France Nature Environnement Midi-Pyrénées et le collectif Testet, visant à contester le protocole d’accord signé en décembre 2015 entre l’Etat et le conseil départemental. Pour les associations, une autre bataille juridique reste donc à mener : "le protocole entre l’Etat et le département prévoit seulement de compenser les atteintes au milieu. Nous, nous réclamons une remise en l’état", a précisé Alice Terrasse, l’avocate des associations, qui réfléchit à interjeter appel du rejet de sa requête.

"Ce projet, s'il avait été construit, aurait été déclaré illégal"

"Cette nouvelle donne raison aux opposants. Ce projet, s'il avait été construit, aurait été déclaré illégal", a commenté Guillaume Cros, vice-président Europe Ecologie-Les Verts du Conseil régional d'Occitanie. Force est de reconnaître que sans la mobilisation des opposants écologistes, le barrage de Sivens aurait été achevé courant 2015 et déclaré illégal par la justice aujourd’hui. Ce qui justifie aussi la stratégie des porteurs de projet qui débutent les travaux dès l’obtention des autorisations, la justice mettant des années à se prononcer. Une fois que l'équipement est construit, il est assez rare qu'on le détruise, même s'il est déclaré illégal...

sivens rémi.jpgLa douleur de la famille de Rémi Fraisse

Par l'intermédiaire de ses avocats, la famille de Rémi Fraisse a "salué" le jugement, constatant "avec douleur que si les recours administratifs et le dialogue environnemental avaient été respectés, les travaux n'auraient pas démarré cette tragédie ne serait jamais arrivée". Autrement dit, si les lois censées protéger l'environnement avaient tout simplement été respectées, sans dérogation, il n'y aurait pas eu de mobilisation d'opposants défenseurs de la nature, ni de ZAD, ni de violences, ni de mort.

Ce jugement aura-t-il une résonance sur ces autres grands ou petits projets d'infrastructures dont l'utilité est contestée pour des raisons environnementales, et dont les sites sont parfois occupés par des zadistes? Et si oui laquelle ? Nul doute qu'à Villenave-d'Ornon (Gironde), notamment, où s'est installée récemment une ZAD contestant un projet de golf immobilier sur une zone Natura 2000 la décision de justice sera lue et relue à la loupe par les écologistes comme par les promoteurs immobiliers et les collectivités locales.

Cathy Lafon

►REPERES

2001 : Dans une étude pour le Tarn, la Compagnie d'aménagement des coteaux de Gascogne conclut à la nécessité d'un barrage de 1,5 million de mètres cubes dans la forêt de Sivens.

2013 : La Déclaration d'utilité publique (DUP) intervient alors que le Conseil national de la protection de la nature a émis de sérieuses réserves sur le barrage.

Septembre 2014 : Défrichage de la forêt et face-à-face immédiat entre les forces de l'ordre et les zadistes.

26 octobre 2014 : Mort de Rémi Fraisse. Au cours d'une manifestation, le militant écologiste, 21 ans, est tué par une grenade lancée par un gendarme.

6 mars 2015 : Nouveau projet : le Tarn vote pour un barrage réduit. La ZAD est évacuée.

►LIRE AUSSI

  • Les articles de Ma Planète sur le barrage de Sivens : cliquer ICI
  • Les articles de Ma Planète sur les ZAD : cliquer ICI

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