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Pesticides. Des épandages aériens d'insecticides "mettent le feu" dans le Gers et en Haute-Garonne

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Epandage aérien 18 juillet 2012 / France 3 - Midi Pyrénées. Pour voir la vidéo : cliquer ICI

Dans le Sud-Ouest, les préfets de la Haute-Garonne et du Gers ont pris début juillet des arrêtés dérogatoires autorisant l'épandage aérien de pesticides sur les cultures de maïs du département, contre l'avis de nombreux élus et des apiculteurs : depuis hier, des épandages par avion de pesticides sont en cours dans ces deux départements. Ces traitements dérogatoires rendus légaux par une circulaire ministérielle, relancent la guerre pas vraiment éteinte, entre les défenseurs de l'environnement, les cultivateurs bio, les apiculteurs, les populations riveraines et les commanditaires de des épandages.

apiculture,maïsiculture,pesticidesUne interdiction d'épandage aérien et sept pesticides "autorisés"

Si l'épandage aérien de pesticides est interdit en France (arrêté du 31 mai 2011, qui découle de la loi Grenelle 2) car cette technique présente "des risques importants pour la santé et l'environnement", une circulaire du ministère de l'Agriculture en date du 5 mars, publiée discrètement, a introduit de nombreuses exceptions à une interdiction pourtant très claire.  Intitulé « Liste des produits phytopharmaceutiques autorisés ou en cours d'évaluation pour les traitements par aéronefs », ce texte fournit aux pouvoirs publics départementaux la possibilité de délivrer des dérogations pour toute une série de fongicides, herbicides, insecticides destinés à traiter le maïs, le riz, la vigne et les bananiers. La circulaire du 5 mars émane de la direction générale de l'alimentation et donne la liste de sept pesticides «autorisés », dans la mesure où ils ont été évalués par l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation de l'environnement et du travail (Anses), spécifiquement pour être appliqués par voie aérienne.

Le feu dans les maïs gersois et toulousains

Selon France 3 / Midi Pyrénées les communes concernées par les épandages hier dans le Gers étaient Samatan et Bezeril. En Haute-Garonne : Le Castera, Villaudric, Villematier, Castelginest, Caignac, Montaut. Aujourd'hui, c'est le tour de Carbonne, Salles, Saint-Elix, et Lavelanet de Comminges. Les traitements se font par hélicoptère. Le produit utilisé serait un insecticide le Sherpa 2 GC (cyperméthrine) en micro granulé. Il est utilisé contre la pyrale du maïs, un insecte ravageur pour cette culture. Au total, "Sud Ouest" précisait le 10 juillet que dans le Gers, le Préfet avait accordé l'autorisation à 14 communes sur 45 qui demandaient un épandage dérogatoire.

En Haute-Garonne, l'arrêté du Préfet  porte sur 8.000 hectares et sur quatre zones classées Natura 2000  (ce qui est vraiment paradoxal) et restera en vigueur jusqu'au 12 septembre. Il autorise des entreprises spécialisées de survoler les champs de maïs à une altitude d'une cinquantaine de mètres pour y épandre de la deltamétrine, de la cyperméthrine et du chlorantraniliprol pour traiter les insectes ravageurs du maïs. Dans le Gers,  14 communes sont concernées, mais aucune zone Natura 2000. Si  ces arrêtés mettent aujourd'hui le feu entre apiculteurs, écologistes, élus locaux, maïsiculteurs et pouvoirs publics, c'est que les épandages n'auraient en outre pas été annoncés en Haute-Garonne. Les apiculteurs et les défenseurs de l'environnement, très remontés, font en effet valoir que même si l'autorisation dérogatoire est légale, ce contre quoi ils mènent une guerre acharnée, l'obligation est aussi faite aux épandeurs de prévenir les populations et les exploitants agricoles riverains 72 heures à l'avance, afin de leur permettre de prendre les mesures de précaution qui s'imposent. Toujours selon France 3 / Midi Pyrénées, associations environnementales et apiculteurs dénoncent ainsi « la violation de nombreux articles de l’arrêté signé par le préfet de Haute-Garonne le 5 juillet 2012 » comme le « non respect du délai d’information des apiculteurs », « la non communication des parcelles traitées » ou encore « du maïs en fleur dans certaines communes concernées ».

Les abeilles et les hommes menacés : en Haute-Garonne, il y a de la colère dans l'air

apiculture,maïsiculture,pesticidesNombre d'études mettent désormais en corrélation l'incidence des pesticides sur l'augmentation de certaines maladies chez les agriculteurs (cancers, maladie d'Alzheimer). Quant aux apiculteurs, ils  dénoncent aussi les conséquences de ces épandages aériens sur les abeilles avec « un effet de mortalité dans la ruche » ou encore un risque de perturbation du comportement de l’abeille.

Les apiculteurs en pointe

Pour Olivier Fernandez, président du syndicat des apiculteurs de la Haute-Garonne, qui s'appuie sur trois études réalisées par des chercheurs du Centre National d'Études Vétérinaires et Alimentaires Sophia, Antipolis et de l'institut de recherches en apiculture de l'académie des sciences agricoles de Pékin,"la deltamétrine et la cyperméthrine sont des insecticides toxiques pour les abeilles". C'est ce qu'il expliquait à La Dépêche du Midi, le 5 juillet dernier. Selon lui, la décision préfectorale fragilise encore le rucher du département déjà frappé chaque année par un taux de mortalité de 60 % de son cheptel d'abeilles, alors que le taux moyen national est de 35 %. Il précisait par ailleurs que des rotations de cultures et des techniques de lutte intégrée qui sont pratiquées dans le Gers et dont l'efficacité est reconnue par l'INRA (Institut national de recherches agronomiques) permettent de lutter contre les insectes ravageurs du maïs sans avoir recours aux pesticides.

Les élus locaux vent debout

greze.jpgLa député européenne Europe écologie-Les Verts Catherine Grèzes, et le député maire de Saint Jean Gérard Bapt ont aussi écrit au préfet de la Haute-Garonne pour attirer son attention sur les risques encourus par le rucher départemental et le réseau hydrique ainsi que sur les conséquences pour la santé publique de ces épandages qui seront réalisés à 50 mètres des habitations. Un courrier a également été adressé au préfet par le président du conseil général Pierre Izard.

La préfecture veut relativiser

De son côté, dans un communiqué de presse, la préfecture de la Haute Garonne a expliqué que « ces traitements sont indispensables pour prévenir des maladies pouvant entraîner le développement de produits toxiques dans le maïs destiné à la consommation animale et humaine. » La secrétaire générale de la préfecture rajoutait par ailleurs "que ces traitements aériens ont déjà été pratiqués en 2011 et qu'un seul cas de mortalité d'abeilles a alors été constaté dans le département".

L'épandage aérien dans les Landes fait le buzz sur internet 

apiculture,maïsiculture,pesticidesSi les épandages aériens en cours suscitent des réactions de colère en Haute-Garonne et dans le Gers, dans les Landes, où le préfet devait autoriser le 18 juillet des dérogations, une pétititon fait le buzz sur internet. Adressée au préfet , elle demande l'arrêt des dérogations d'épandages aériens pesticides sur 8000 ha du département. Soutenue par les Amis de la Terre 40, la SEPANSO 40, le CiVAM Bio 40, ATTAC Landes Côte Sud, INDECOSA CGT 40, la pétition rappelle  que "la préfecture des Landes s'apprête à autoriser les dérogations demandées par des producteurs (AGPM, association des groupements de producteurs de Mais) et la coopérative Euralis (64) sur le mais doux et le maïs semence". Elle précise que "les insecticides utilisés (Coragen, Protech, Balthazar) sont dangereux pour la sante humaine, les abeilles et l’environnement, notamment dans l'eau, où leur dispersion est très toxique pour les organismes aquatiques". Dans un passé récent, des cas d’intoxication liés aux produits phytosanitaires, dont un grave à Port-de-Lanne, se sont en effet produits lors d’épandages dans les Landes. Les opposants ne nient pas l'existence d'insectes très nuisibles pour les cultures, comme la pyrale, mais ajoutent qu'il existe des solutions biologiques pour lutter contre eux. Ils appellent enfin à "modifier les pratiques agricoles de monculture intensive", qui ont, selon eux, "pour conséquence la présence de ces insectes nuisibles, tout en conduisant à la dégradation rapide de l’environnement, des sols, des ressources en eau, qui ne pourront que détériorer la santé des habitants".

Pour les écologistes, la question de l'épandage aérien des pesticides n'est finalement qu'un maillon de toute la chaine des pratiques agricoles intensives majoritaires aujourd'hui, qu'il faudrait modifier pour préserver l'environnement et la santé humaine.

Selon le site Actu-environnement, huit cents opérations d’épandage aérien sont autorisés cette année en France, la grande majorité Outre-mer. Une réalité bien éloignée de l'objectif d'interdiction des pesticides affiché dans le Grenelle 2 de mai 2011, contourné par la circulaire du ministère de l'Agriculture du gouvernement précédent, en date du 5 mars 2012...

Cathy Lafon

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