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Pesticides : l'Inra vient de créer 4 variétés de vignes naturellement résistantes au mildiou et à l'oïdium

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Les chercheurs de l'Inra ont mis au point des vignes naturellement résistantes aux maladies. Photo archives "Sud Ouest".

Bonne nouvelle pour la planète, les viticulteurs et les amateurs de bons vins ! L'Inra s'est engagé en 2000 dans un programme de création de variétés possédant une résistance durable aux principales maladies fongiques de la vigne. Dix-huit ans plus tard, le projet des chercheurs vient d'aboutir à l'inscription au catalogue officiel de quatre variétés dotées de résistances naturelles au mildiou et à l'oïdiumCerise sur le gâteau, la qualité de leurs vins est d’un niveau équivalent à celle des cépages traditionnels. 

"Artaban, Floreal, Vidoc et Voltis, ouvrent la voie vers une viticulture performante plus respectueuse de l'environnement, en permettant de réduire de façon drastique l'utilisation des produits phytosanitaires", explique Christophe Schneider, responsable du programme d'innovation variétale Inra-ResDur, dans un communiqué publié le 24 janvier 2018.

vigne pesticides traitement.jpgLe contexte 

20 % des produits phytosanitaires consommés en France sont dédiés à la vigne alors qu’elle n’occupe que 3 % de la surface agricole utile. Dans l’objectif du plan gouvernemental Ecophyto, la réduction d’usage des pesticides chimiques,  dont la dangerosité potentielle pour la santé des salariés de la vigne et celle des consommateurs est désormais avérée, est impérative pour cette culture. Dans ce cadre, l’Inra, l’IFV et les viticulteurs ont travaillé à développer de nouveaux cépages résistants aux maladies fongiques, classées « vignes à raisin de cuve » pour la campagne 2018.

Des résistances provenant d'ancêtres américains

"Ces quatre nouvelles variétés sont le fruit de croisements entre, d’une part, des géniteurs Inra sélectionnés par Alain Bouquet et, d’autre part, deux obtentions du Julius Kuhn Institut (Allemagne). Ces "parents" ont été choisis pour leurs traits qualitatifs et pour leur origine de résistance différente", détaille Christophe Schneider. Cette stratégie de croisements, propre au programme Inra-ResDur, a permis d'associer deux gènes de résistance au mildiou et deux gènes de résistance à l'oïdium, provenant, d’une part, de l’espèce Vitis rotundifolia et, d’autre part, d'un groupe d'espèces où domine Vitis rupestris.

Vitis rotundifolia, ou muscadine, ou encore soco ou liane de soco en Louisiane, est une espèce de vigne originaire du sud-est des États-Unis, qui pousse dans des régions ayant un climat chaud et humide, où les températures baissent rarement en dessous de 12° C. Vitis rupestris ou vigne des rochers, est une espèce d'arbrisseaux sarmenteux. Cultivée pour ses fruits en grappes, cette vigne américaine atteint des hauteurs de 0,6 à 2 m, et se localise principalement dans les états du Tennessee, du Kentucky, de l'Illinois, du Missouri, du Kansas, du Nouveau-Mexique, de l'Oklahoma, de l'Arkansas, du Texas, de Louisiane et du Mississippi. 

Les nouvelles variétés sont ainsi dotées de résistances polygéniques, qui permettent une lutte efficace contre les maladies des plantes cultivées en confortant leur potentiel de durabilité.

Comment les scientifiques ont-ils procédé ? 

Les croisements réalisés dans le programme Inra-ResDur ont généré des descendances de plusieurs milliers d'individus. Ces descendants sont triés dans un premier temps en fonction de leurs caractéristiques de résistance. Pour gagner du temps et intégrer avec certitude les gènes de résistance, l'Inra a mis au point des marqueurs moléculaires spécifiques de chaque gène. Ils permettent de réaliser, dès dix semaines après le semis, la sélection précoce des individus répondant aux critères de résistance polygénique, qui selon le cas ne représentent que 5 à 10% des descendants. Deux étapes de sélection au vignoble, de six ans chacune, sont ensuite nécessaires pour évaluer les caractères culturaux et technologiques, et sélectionner les variétés retenues pour l'inscription au catalogue. Le processus de sélection nécessite au total une quinzaine d'années.

"Une résistance totale à l'oïdium et élevée au mildiou" 

Les quatre variétés obtenues présentent "une résistance totale à l'oïdium et élevée au mildiou", conclut l'Inra. Selon le niveau de pression de la maladie, un nombre réduit de traitements fongicides complémentaires est toutefois préconisé par les chercheurs. Mais l'économie des produits phytosanitaires, qui se situe entre 80% et 90%, est impressionnante. La précocité des nouvelles variétés convient en outre pour de nombreuses régions viticoles françaises, qui doivent également s'adapter au  réchauffement climatique. Il en est de même pour la productivité, qui s'échelonne entre celles du Chardonnay et du Grenache. Quant à la qualité organoleptique des vins produits - apparence, odeur, goût et texture - l'Inra la jugé comparable aux cépages témoins, avec des profils bien tranchés entre Artaban et Vidoc (vin rouge) et entre Floreal et Voltis (vin blanc). 

Des aptitudes viticoles, œnologiques et environnementales prometteuses

Le travail de l'Inra soulève l'espoir de réduire l'usage des pesticides chimiques pour la viticulture, voire de s'en affranchir définitivement... tout en préservant la santé des salariés de la vigne et des consommateurs, l'environnement et la qualité oenologique des vins. L'année commence bien.

Cathy Lafon

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