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Viticulture : le réchauffement climatique au menu de Vinexpo 2017

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Avec le réchauffement climatique, la vigne risque disparaitre de certaines régions du monde. Photo archives "Sud Ouest"

Pour la première fois de son histoire, l'édition 2017 de Vinexpo qui s'est achevée ce mercredi 21 juin à Bordeaux, affichait clairement la couleur verte. Lors du plus fameux salon international du vin qui, cette année, a mis à l'honneur le bio, le gotha mondial des acteurs du vin et des spiritueux a placé au coeur de ses préoccupations l'impact du réchauffement planétaire sur la viticulture, en associant des experts à la réflexion des professionnels du marché viticole.

Réussir l'adaptation au changement climatique, un enjeu vital pour la viticulture

Sur ce sujet du changement climatique, la viticulture a définitivement fait son aggiornamento et, dans le monde du vin, les climatosceptiques pointent désormais aux abonnés absents. "Le changement climatique est une préoccupation grandissante pour tous les producteurs de vins partout dans le monde car les plus petites fluctuations de température ou la pluie ont des incidences directes sur la production" affirme Guillaume Deglise. En la matière, pour le directeur général de Vinexpo, le rôle du grand rendez-vous bordelais consiste donc à "faire un état des lieux de la situation et de réfléchir ensemble afin de continuer à développer des stratégies à succès pour l’avenir de toute la filière viticole."

Il est vrai que pour la viticulture, réussir l'adaptation au réchauffement climatique est un enjeu de taille. Dans le meilleur des cas, les rapports successifs du GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) indiquent que la température à la surface du globe devrait augmenter de + 1,5° à + 2° d’ici à 2050. Une donnée climatique qui n’est évidemment pas sans conséquences pour le vignoble, l’une des cultures les plus sensibles aux variations climatiques.

Des vins plus concentrés, un degré d’alcool plus élevé

La hausse des températures modifie dores et déjà le degré d’alcool des vins et leur acidité. Dans les régions du Sud comme le Languedoc Roussillon, les vins sont de plus en plus concentrés et les vendanges de plus en plus précoces. Toutefois, le changement climatique affecte la culture de la vigne de façon différente d’un vignoble à l’autre et profite à certains. Ainsi, à l'inverse, en Champagne, le réchauffement semble pour l’instant une bonne chose : des raisins plus mûrs, plus sucrés et moins acides affectent positivement les vins.

Vendanges précoces, rendements en baisse

De son côté, le BNIC (Bureau national interprofessionnel du cognac) qui consigne des données depuis quarante ans, constate que les vendanges se font désormais avec deux à trois semaines d’avance par rapport aux années soixante-dix. La sécheresse fait également baisser les rendements puisque les vignes produisent moins de fruits dans les périodes trop sèches.

Une cartographie mndiale du vignoble modifiée

Il y a quatre ans, en 2013, une étude du climatologue américain Lee Hannah arrivait à la conclusion que, d’ici 2050, la surface de terres propices à la culture de la vigne en Europe devrait diminuer de 68%, en indiquant q'"elles pourraient se réduire dans de nombreuses grandes régions traditionnellement productrices de vin". Globalement, dans le monde, on observe très clairement la montée vers le Nord des conditions favorables à la culture de la vigne. D’ici un siècle, si le réchauffement climatique se poursuit au même rythme, la Grande-Bretagne ou le Danemark pourrait produire d'excellent vins rouges. En France, une véritable culture viticole pourrait se développer en Bretagne ou en Normandie.

Le Bordelais en première ligne

En France, le mercure a grimpé de 1,3°C depuis 1880, une hausse supérieure à la moyenne planétaire, de 0,85°C. En Aquitaine,  l’une des régions où, selon le climatologue Hervé Le Treut, "le réchauffement risque d’être le plus fort en raison de sa situation géographique et de son positionnement par rapport à l’anticyclone des Açores",  la température estivale a augmenté de 3°C durant la seconde moitié du XXème siècle. Le plus grand vignoble de France, le Bordelais, pourrait subir à l’avenir des hausses de température estivale de 5° à 10°C.

"Un bon problème"

vinexpo 2017,réchauffement climatique,adaptation,filière viticolePour l’heure, en Gironde, le soleil qui bonifie le vin réjouit les vignerons. Dans "Menace sur le vin, les défis du changement climatique", un essai revigorant signé de Valéry Laramée de Tannenberg et Yves Leers, sorti en octobre 2015, l'un d’entre eux confie que  le réchauffement est "un bon problème" -  et les vendanges exceptionnelles se multiplient. Mais depuis 30 ans, le vin a gagné 1° d’alcool par décennie. Pour les chercheurs américains, "une température moyenne de 18,8°C lors de la croissance de la vigne, placerait Bordeaux à la limite de la température optimale pour  de nombreux vins rouges".  Son cépage phare, le merlot, supporte mal le réchauffement et à  terme, c’est tout l’équilibre des vins qui pourrait être rompu.

La filière viticole face au changement climatique

Si la filière viticole prend très au sérieux les conséquences d’un tel réchauffement, et si elle a conscience de l'urgence de son adaptation, la situation est très complexe pour les viticulteurs. D'autant que tous ne sont pas logés à la même enseigne face au changement climatique, profitable pour les uns et préjudiciable pour d'autres. Pour préserver leurs intérêts économiques et garantir l'avenir d'une pratique agricole ancestrale, il va leur falloir choisir la (ou les) bonne réponse, dans la palette des solutions qui s'offrent à eux.

Déménagement vers des cieux plus propices, orientation des rangs nord-est/sud-ouest, exposition au Nord, modification des pratiques culturales, des dates et des heures de vendanges, utilisation de cépages plus tardifs et de cépages anciens, développement de "vignes résilientes" venues du sud ou encore sélection génétique de cépages… Autant de thèmes qui agitent aussi le monde scientifique et les chercheurs du CNRS et de l'Inra, débattus lors des deux conférences organisées par Vinexpo  : "Le secteur du vin face aux défis et enjeux du changement climatique", en partenariat avec Wine Spectator, et "La France septentrionale à l’heure du réchauffement climatique" avec les experts en vin Bettane & Desseauve.

Cathy Lafon

A LIRE

  • « Menace sur le vin, les défis du changement climatique », Valéry Laramée de Tannenberg, Yves Leers,  coll. Dans le Vif, Ed. Buchet-Chastel, 122 p., 12 €.

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