Albert Jacquard, compagnon de route de l'écologie, est mort
Albert Jacquard, photo DR
Dure année pour l'écologie. Le généticien et militant de gauche, Albert Jacquard est décédé le mercredi 11 septembre au soir, à son domicile parisien (VIe arrondissement), emporté par une forme de leucémie, à l’âge de 87 ans. Connu pour ses engagements citoyens, humanistes et écologistes, ce polytechnicien, né le 23 décembre 1925, était président d’honneur de l’association Droit au logement (DAL). Les écolos le pleurent, comme ils ont pleuré Stéphane Hessel, le 27 février dernier, avec lequel il avait publié un livre (« Exigez ! Un désarmement nucléaire total », Stock). "Ma Planète" lui rend hommage.
De Polytechnique à la génétique
Parallèlement à l’enseignement et son travail d’expert à l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), il n’aura alors de cesse de démonter les arguments prétendument scientifiques des théories racistes et sera même témoin en 1987 au procès du nazi Klaus Barbie pour crimes contre l’humanité. Ses premiers livres, comme "Eloge de la différence : la génétique et l’homme" (1978) rencontrent un grand succès qui ne se démentira pas, même quand il dérivera vers la philosophie, la vulgarisation scientifique ou l’humanisme anti-libéral. Le professeur Jacquard remet aussi en question le libéralisme et s'intéresse à la politique. Il sera ainsi candidat aux législatives à Paris en 1986 sur une liste soutenue par divers mouvements de la gauche alternative, puis en 1999 sur la liste écologiste conduite par Daniel Cohn-Bendit (en 84e position).
Le combat pour les mal-logés et les sans-papiersDans les années 1990, Albert Jacquard va mettre sa verve médiatique au service d’une autre cause : les mal-logés et les sans-papiers. Occupation d’un immeuble rue du Dragon en 1994, de l’Eglise Saint-Bernard en 1996... Son visage de vieux faune grec devient vite aussi familier que celui de l’Abbé Pierre, Mgr Gaillot ou Emmanuelle Béart, ses compagnons de lutte.
Développer, en la réinventant, l'humanité sur Terre, tout en respectant notre planète
L’âge aidant, le président d’honneur du DAL (Droit au logement) s’était fait plus discret tout en continuant à soutenir les démunis et à pousser des coups de gueule, y compris contre le nucléaire. Jusque dans son dernier livre, "Réinventons l'humanité" (édition Sang de la Terre), Albert Jacquard se sera interrogé : "Qu’est-ce qu’être humain" ?". Dans un monde où l’intolérance devient un mode d’action, nous avons plus que jamais besoin de paroles nous rappelant nos valeurs éthiques. Etre humain, pour le généticien, c'est "faire partie, si nous l’acceptons, de l’unique forme du vivant capable d’inventer l’humanité. L’humanité reste une adhésion. Un choix collectif. Un défi sans cesse relevé depuis que l’homme est homme : celui d’innover. La question n’est pas pour nous de sauver la Terre, mais de développer, en la réinventant, l’humanité sur Terre. Ce ne sera possible qu’en respectant notre planète et en nous respectant nous-mêmes, humains d’aujourd’hui, d’hier et à venir.»
L'espoir
Avec l’aide de la journaliste Hélène Amblard, sa complice depuis plus de trente ans, Albert Jacquard nous a offert en guise d'adieu ce petit ouvrage qui nous concerne tous et qui résonne comme un cri d’alarme sur l’avenir de l’homme. C'est aussi un livre plein d'espoir pour réinventer l’humanité, destiné à faire vivre le débat entre tous, pour enfin mieux vivre ensemble. Adieu, Albert. Et merci.
Cathy Lafon avec l'AFP
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