Panneaux photovoltaïques Photo DR
Sans attendre le printemps ou la fin du débat sur la transition énergétique, la ministre de l'Ecologie Delphine Batho a lancé lundi 7 janvier des mesures de soutien d'urgence promises à la filière solaire en France en septembre 2012, et très attendues par ce secteur industriel. Mesures complétées dès le lendemain par un plan administratif gouvernemental, destiné à relancer l'éolien en mer.
400 mégawatts en photovoltaïque, soit le quart d'un réacteur nucléaire type EPR
Dans le détail, la ministre a indiqué avoir saisi la Commission de Régulation de l'Energie (CRE) d'un projet d'appel d'offres pour des nouveaux parcs photovoltaïques d'un total de 400 mégawatts, soit environ un quart d'un gros réacteur nucléaire type EPR. La moitié sera réservée à des projets "innovants" (solaire à concentration ou avec suivi du soleil) et l'autre moitié à des centrales de type ombrières de parkings et en toiture. Un deuxième appel d'offres sera également lancé en 2013, a promis Delphine Batho. L'autre mesure principale du plan gouvernemental consiste à bonifier de 5 à 10% les tarifs auxquels EDF rachète l'électricité en France lorsque les cellules et les panneaux sont "made in Europe", a expliqué la ministre. Enfin, le gouvernement a également décidé de doubler les volumes cibles pour le photovoltaïque, à 1.000 mégawatts supplémentaires en 2013.
Et du vent dans les pales...
Le mardi 8 janvier, deuxième round. Delphine Batho lançait également la machine administrative pour permettre la construction de deux grands nouveaux parcs éoliens au large du Tréport (Seine-Maritime) et de Noirmoutier (Vendée), une mesure attendue avec impatience par la filière éolienne depuis plusieurs mois. D'une puissance totale de 1.000 mégawatts, les deux parcs, qui comprendront 80 à 100 éoliennes chacun sur des zones de plusieurs dizaines de kilomètres carrés dans la Manche et l'Océan Atlantique, devraient être construits pour une mise en exploitation située entre 2021 et 2023. Ces projets viennent compléter les quatre parcs éoliens qui devraient voir le jour entre 2016 et 2020 - Courseulles (Calvados), Fécamp (Seine-Maritime), Saint-Nazaire (Loire-Atlantique) et Saint-Brieuc (Côtes d'Armor)- remportés en 2012 par EDF-Alstom pour les trois premiers et Iberdrola-Areva pour le dernier. Les six projets désormais lancés représentent 3.000 mégawatts au total. La France n'en est donc qu'à mi-chemin de son objectif officiel de 6.000 mégawatts d'éoliennes en mer d'ici à 2020 (soit à pleine puissance l'équivalent de quatre gros réacteurs nucléaires), et il faudra trouver de nouvelles zones pour le remplir, sans toutefois pouvoir tenir l'objectif de 2020.
Adoption de la proposition de loi sur la tarification progressive de l'énergie
Par ailleurs, l'Assemblée nationale a enfin adopté vendredi 18 janvier, la proposition de loi instaurant une tarification progressive de l'énergie, qui vise " à préparer la transition vers un système énergétique sobre ". Pivot de la nouvelle politique énergétique du nouveau gouvernement, ce texte, qui assouplit les règlements de l'éolien, avait été rejeté en octobre au Sénat, du fait de l'opposition de l'UMP, du centre et du Front de gauche. Les députés ont ainsi voté la suppression des zones de développement éolien (ZDE), un aménagement de la loi littoral pour faciliter l'implantation d'éoliennes dans les départements d'outre-mer et la suppression de la règle exigeant un nombre minimal de cinq mâts par nouveau parc éolien. Ce que réclamaient les industriels du secteur. Mais le ralentissement de l'éolien (1 256 mégawatts en 2010, 830 en 2011, moins de 700 en 2012, selon les chiffres du Commissariat au développement durable) découle aussi de la difficulté à réunir les financements pour de nouveaux parcs. Pour faciliter les investissements, le gouvernement pourrait donc prendre un arrêté en février, autorisant EDF à signer des contrats d'achat du courant éolien avant la construction des parcs, alors que, pour l'instant, les contrats ne sont signés qu'après leur achèvement : un petit coup de pouce, à défaut d'un remède miracle.
Deux futurs champs de panneaux photovoltaïques "tournesols" dans la région
Les panneaux photovoltaïques sur trakers de la ferme solaire du Gabardan (Gers) Photo archives Sud Ouest / Nicolas Le Lièvre
Feu vert pour Valorem en Gironde...
Une bonne nouvelle n'arrive jamais seule. La société béglaise Valorem spédialisée dans les énergies renouvelables, vient d'obtenir le feu vert de la préfectur de la Gironde pour édifier à Naujac-sur-Mer (Nord-Médoc), un parc photovoltaïque de 76 hectares avec deux unités de production, dans lequel une partie des panneaux seraient orientables, comme des tournesols, pour suivre la course du soleil. Un vrai projet durable, "circuit court" et ultra-local, puisque les panneaux photovoltaïques devraient être fabriqués par la société lot-et-garonnaise Fonroche. Montant total de l'investissement : 46 millions d'euros.
.... et le soleil continue de briller pour Solarezo dans les Landes
Toujours dans la région, à Pontonx-sur-l'Adour, Solarezo vient de fabriquer, le 3 janvier, le premier module photovoltaïque de son prochain parc solaire au sol d’envergure à Garein (Landes). L'entreprise doit poursuivre la fabrication de 47 980 modules, dans le cadre de la construction de ce parc solaire de 12 MWc, à Garein. Les études seront réalisées par Gleize Energie, maître d’oeuvre spécialisé dans les énergies renouvelables et le bâtiment, et ce parc solaire sera équipé de trackers sur un axe, pour suivre le soleil, et permettra de produire 15.600 MWh d’électricité, soit l’équivalent de la consommation électrique de 5.000 foyers. Dans un contexte économique morose, où tout le monde invoque le « made in France » mais y parvient rarement, Solarezo illustre dans les Landes, comme Valorem en Gironde, la réussite d’un projet local et durable, créateur d'énergie renouvelable et d'emplois.
De futurs emplois tricolores sous le soleil
Selon les estimations de l'Agence de l'Environnement et de la Maîtrise de l'Energie (Ademe), 14.500 emplois ont été détruits dans la filière photovoltaïque entre 2010 et 2012, soit près d'un poste sur deux en France... Ces "mesures d'urgence", promises par l'exécutif en septembre, étaient attendues avec impatience par les filières françaises des ENR, à la peine depuis environ deux ans du fait de la forte concurrence des panneaux chinois pour le photovoltaïque et de tarifs bonifiés de rachat très fortement abaissés depuis fin 2010. Delphine Batho, chargée de lancer la "transition écologique" voulue par François Hollande, a défendu l'idée qu'"on ne pouvait pas attendre" la fin du débat national sur cette transition, qui doit durer jusqu'à l'été.
Cathy Lafon
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