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chiffres - Page 16

  • Rio J-15 . C02 : l'atmosphère n'en peut plus

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    L'Arctique. Photo DR

    "Atmosphère, atmosphère, est-ce que j'ai une gueule d'atmosphère ?" A 15 jours de l'ouverture du Sommet de la Terre de Rio (20 au 22 juin), l'Arctique se pose la question avec angoisse. C'est que la banquise est encore sous le coup d'une bien mauvaise nouvelle, hélas prévisible : le seuil de 400 ppm de CO2 dans l’atmosphère vient d'être atteint au-dessus de l'Arctique. Et pour les chercheurs, le reste de la planète devrait atteindre bientôt le même seuil. "Et alors ?", me direz vous.   "Ca nous fait une belle jambe ! A quoi peut bien rimer ce nième message écolo-codé ? Et d'abord, pourquoi ce serait si grave ? La Terre en a vu d'autres, et on est toujours là !"

    Explications.

    "Les ppm de C02", kesaco ?
     
    A la belle ère de l'"anthropocène" qui est la nôtre, pour les climatologues et les écologistes, les "ppm de CO2", c'est la cata !  Mais au fait, que sont ces ppm, qui prolifèrent sur nos têtes ? Une partie par million (en abrégé ppm) est l'équivalent d'un pourcentage, et un terme fréquemment utilisé par les scientifiques. Au sens strict, un ppm correspond à un rapport de 10-6, soit, par exemple, un milligramme par kilogramme ; au sens large, un ppm correspond à un milligramme par litre. En outre, le ppm n’est pas une concentration mais un rapport, c’est-à-dire un quotient sans dimension, à l’instar d’un pourcentage.
    Le CO2, ou dioxyde de carbone,  est naturellement présent dans l'atmosphère terrestre, le ppm de CO2 est donc la partie par million de CO2 présent dans l'air que nous respirons. Le CO2 était présent  à une concentration de près de 0,039 % en volume au début des années 2010, c'est-à-dire 390 ppmv (parties par million en volume) ou 591 ppmm (parties par million en masse). En 2009, cette concentration atteignait précisément 386 ppmv, contre seulement 283,4 ppmv en 1839 d'après les carottes de glace prélevées dans la région du cap Poinsett dans l'Antarctique, soit une augmentation globale de 36,2 % en 170 ans.  Or, plus besoin de vous faire un dessin, plus de CO2 dans l'atmosphère, c'est le réchauffement climatique assuré...
     
    Bienvenue dans l'ère de "l'anthropocène" !
     
    Les scientifiques s'accordent désormais, dans leur très grande majorité, à attribuer l'augmentation de CO2 observée actuellement à l'activité humaine : d'où le nom d'"anthropocène" donné à notre ère qui a débuté avec la Révolution industrielle, au XIIIème siècle.  Avec l'ère industrielle a en effet débuté une période à partir de laquelle l'influence de l'humanité sur le système terrestre est devenue prédominante.
     
    concentration record de CO2 au dessus de l'Arctique.jpgRevenons à nos fameux "ppm de CO2". Avant l’ère de l'anthropocène, le chiffre de ppm de CO2 était de 275. Aujourd'hui, le niveau mondial moyen atteint 395 ppm. Le seuil des 400, qui vient d'être franchi dans l'Arctique devrait être le prochain niveau mondial de C02 dans notre atmosphère. Or, pour de nombreux chercheurs, 350 particules de dioxyde de carbone par million constituent déjà le seuil à ne pas dépasser pour préserver le climat. Imaginez un autocar, prévu pour transporter 50 passagers, qui ont droit chacun à une valise comme bagages, mais qui arrivent avec deux fois, puis trois, puis quatre fois plus ?  La place étant toujours la même dans l'autocar, la situation devient vite invivable pour les passagers... Surtout si le nombre de passagers augmente également. C'est un peu le même scénario avec le CO2 sur notre planète, qui est elle aussi, ne l'oublions pas, un monde "fini".

    Au-delà de 395 ppm : vers une situation incontrôlable
     
    Selon l'agence Science Presse du 3 juin, des stations de mesure basées en Arctique ont enregistré, pour la première fois, la présence de plus de 400 particules de dioxyde de carbone par million (ppm) dans l’air. Ces niveaux ont été atteints durant le printemps, rapporte The Guardian dans son édition en ligne du 1er juin. Selon la communauté scientifique, ce seuil est une étape importante dans l’augmentation de la concentration de dioxyde de carbone dans la haute atmosphère parce qu’au delà de 395 ppm la situation deviendrait incontrôlable à cause des boucles de rétroaction positives. Une estimation, qui n'est pas une prévision -  la communauté scientifique se refuse à jouer le rôle de "voyante"-  et qui ne date pas d'aujourd'hui. Certes, c'est en Arctique que ce seuil vient d'être franchi, mais les climatologues précisent que les régions polaires sont à l’avant poste de la hausse. Les autres régions terrestres vont suivre...
     
    + 2° C à la surface du globe : "Adieu veau, vache, cochon, couvée..."
     
    Jean de la Fontaine avait tout juste : emportée par ses rêves glorieux, Perrette a bien gaspillé son avenir, en perdant  son lait et cassé en outre le pot qui le contenait. L'objectif de + 2°C de hausse des températures terrestre semble désormais impossible à tenir : selon les scientifiques, on ne peut espérer stabiliser le climat, c'est à dire contenir une hausse moyenne de + 2°C sur notre bonne vieille planète, avec plus de 350 ppm de C02 dans l'atmosphère.
     
    Jim Butler, directeur de la surveillance globale au NOAAE (National Oceanic and Atmospheric Administration's Earth), a rappelé à l'Associated Press, le 1er juin, que cela fait 800 000 ans que la Terre n’a pas connu une telle concentration de ce gaz dans son atmosphère. « Cela permet à chacun de se rappeler que nous n’avons pas encore résolu la question et que nous faisons encore face à ce problème », avertit Jim Butler. Et ce n'est pas fini : comme l’a annoncé l‘Agence Internationale de l’Énergie la semaine dernière, les émissions de dioxyde de carbone d’origine anthropique ont atteint un record de 34,8 milliards de tonnes en 2011, une progression de 3,2 % (ou 1 milliard de tonnes) par rapport à 2010.
     
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    De son côté, toujours selon l'Associated Press, Al Gore, l’ancien vice-président américain engagé dans la lutte contre le réchauffement climatique met en garde : « des stations ont mesuré des concentrations au-delà de 400 ppm dans l’atmosphère. Cela constitue une preuve supplémentaire que les décideurs mondiaux –à quelques notables exceptions– échouent de façon catastrophique à répondre aux enjeux du changement climatique. L’Histoire ne les comprendra pas ou ne les excusera pas ».
     
    Sacrifier quelques bagages, pour poursuivre notre voyage sur Terre
     
    Il apparaît désormais très peu probable, voir quasiment impossible, que l’espèce humaine arrive à limiter la hausse des températures terrestres à 2°C (objectif de l’Union Européenne) au dessus de celle qui prévalait avant la révolution industrielle.
    Ceux qui vont à Rio, auront-ils bien présent à l'esprit cette nième preuve du dérèglement climatique et feront-ils preuve d'une vraie détermination à enfin agir pour réduire efficacement au niveau mondial nos émissions de gaz à effet de serre ? L'espèce humaine va-t-elle enfin accepter de sacrifier la partie superflue de ses bagages, pour pouvoir continuer le voyage dans l'autocar planétaire sans se retrouver
    un jour, comme Perrette,  " Gros-Jean comme devant "? Le doute est, hélas, permis.
     

    Cathy Lafon

     
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